Comment choisit-on un site d’implantation d’une centrale nucléaire ? - Sfen

Comment choisit-on un site d’implantation d’une centrale nucléaire ?

Publié le 24 septembre 2025
Vos questions

La recherche d’un site d’implantation d’une nouvelle centrale nucléaire est un processus qui prend plusieurs années. Celui-ci est jalonné en trois phases et intègre plusieurs critères impératifs, notamment liés à la sûreté ou encore politiques et économiques. En France, ce cheminement est partiellement d’actualité puisque les nouveaux réacteurs du programme EPR2 seront construits sur des sites de centrales nucléaires existants. Mais il concerne aussi les projets de SMR et d’AMR, dont l’implantation pour certains est prévue sur des sites, industriels ou autres, non nucléaires.

Construire une centrale nucléaire ne se fait pas en un jour et encore moins n’importe où. En effet, la sélection d’un site destiné à accueillir une installation nucléaire doit prendre en compte de nombreux critères, qu’ils soient liés à la sûreté, à l’environnement, au contexte politique et économique de la région ou encore à l’échelle nationale. Trois grandes phases jalonnent le processus de recherche d’un site : la présélection, la sélection et la caractérisation.

Présélection des sites potentiels

Une première phase permet de pré-lister les potentiels sites candidats. Celle-ci consiste plus particulièrement à exclure les zones inadéquates qui présentent des risques environnementaux trop importants et/ou des critères d’exclusion. Sont concernées, par exemple, les zones soumises à des risques sismique et géotechnique trop élevés, à un risque d’éruption volcanique, d’inondation ou encore ne disposant pas d’un point d’eau satisfaisant à proximité pour le refroidissement.

Certaines zones pourront présenter des critères limitants, n’entraînant pas nécessairement leurs exclusions, mais l’appui d’études complémentaires.

Sélection d’un site

Par la suite, une évaluation plus détaillée, sous la forme d’études de projet, est effectuée sur chaque site présélectionné. L’objectif est d’évaluer avec une plus grande précision l’interaction entre une future installation nucléaire et son environnement, en comparant cette sélection avec différents critères. À l’issue de cette deuxième phase, le choix d’un site est en général arrêté par le futur exploitant (plusieurs sites peuvent tout de même rester en lice).

En premier lieu, ces critères sont liés à la sûreté. D’une part, il est impératif que l’environnement ne soit pas propice à des situations accidentelles. Les études sont multiples, allant de la caractérisation précise de la structure géologique et des conditions sismiques et météorologiques de la zone, à la prise en compte des aménagements à risque aux alentours de la future centrale (barrages, industries, etc..). D’autre part, des études sont menées, à l’inverse, sur l’influence de la centrale sur son voisinage. La distance par rapport aux habitations et la faisabilité d’un plan d’urgence (moyens et dispositifs d’intervention à proximité) sont évaluées par exemple.

On retrouve en outre d’autres critères qui ne sont pas liés directement à la sûreté. Ceux-ci intègrent par exemple les enjeux socioéconomiques, politiques, démographiques, de sécurité, de disponibilité des transports et d’accès au réseau électrique de la zone.

Caractérisation du site

Une fois qu’un site a été retenu, une dernière phase dite de caractérisation clôture le processus de choix du site. Celle-ci consiste à approfondir davantage l’ensemble des études qui ont déjà été faites au préalable sur le site pour s’assurer que le projet est viable et conforme sur toute la durée de vie de l’installation (y compris son démantèlement). Elle permet par ailleurs de définir la base de la conception et du design de la centrale et de déterminer les futures technologies à employer (systèmes de refroidissement, dispositifs de rejets d’effluents, etc.). Ces études sont primordiales car elles peuvent sensiblement affecter les délais de construction, les coûts et l’acceptation du public.

Demande d’autorisation de création en France

En France, la création d’une centrale nucléaire (comme de toute autre « installation nucléaire de base ») est soumise à un processus d’autorisation administrative, conformément aux exigences internationales et européennes en matière de sûreté. Le dossier de demande d’autorisation de création de l’installation (et implicitement de choix du site sélectionné) est envoyée par le futur exploitant au ministre en charge de la sûreté nucléaire et à l’ASNR (Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection). Cette dernière est chargée de mener l’instruction du dossier, qui peut durer de 3 à 5 ans, selon sa complexité.

La demande d’autorisation est ensuite transmise au préfet rattaché à la région, qui engagera des consultations locales et une enquête publique. Cette enquête permet d’informer et de consulter le public sur le projet et donne lieu à un avis favorable ou défavorable. La Commission nationale du débat public (CNDP) doit également être saisie (pour tout projet de création d’une INB dont le coût d’investissement dépasse 460 millions d’euros). La CNDP peut décider soit d’organiser un débat, soit de confier au maître d’ouvrage la mise en œuvre d’une simple concertation ou de ne faire ni l’un ni l’autre. En fonction des retours, les consultations peuvent ainsi affecter des points clés ou l’ensemble d’un projet. Le cas échéant, des études supplémentaires seront requises. À terme, un décret, signé par le Premier ministre, autorise la création de la construction d’une nouvelle centrale sur le site choisi.

Il est important de noter qu’en France les réacteurs du programme EPR2 (6 à 14 unités), dont la création a été annoncée par le Président de la République dans son discours de Belfort du 10 février 2022, seront construits sur des sites de centrales existants. Ainsi, tout une partie du processus de sélection n’aura pas lieu de s’appliquer. En revanche, pour les futurs SMR et AMR, qui constituent en tant que réacteurs des « installations nucléaires de base », un processus complet de sélection d’un site devra être mené s’ils sont implantés en dehors des sites nucléaires existants. ■

Par François Terminet (Sfen)

Image : Centrale nucléaire EDF, Source : Shutterstock

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