C’est quoi un AMR ? - Sfen

C’est quoi un AMR ?

Publié le 10 janvier 2024 - Mis à jour le 15 février 2024
Vos questions

SMR et AMR, deux termes proches qui ont désormais fleuri dans le paysage nucléaire. Mais attention à ne pas les confondre. Bien qu’ils soient tous deux des petits réacteurs nucléaires et de potentiels bons candidats pour venir remplacer les sources d’énergie très émettrices de gaz à effet de serre aux quatre coins du globe, on parle de technologies significativement différentes. Les SMR sont basés sur la technologie de réacteurs refroidis à l’eau alors que les AMR non, et ça change tout.

AMR est l’acronyme de « Advanced Modular Reactor », réacteur modulaire avancé en français. Ces nouveaux réacteurs sont actuellement encore au stade de recherche et développement, voire de démonstrateur pour certaines technologies plus avancées. Comme les SMR, ils sont conçus pour être de bien plus petite taille et puissance que les réacteurs de forte puissance. Le terme « modulaire » renvoie à un mode de construction en modules conçus pour être fabriqués en série en usine, puis facilement acheminés et assemblés sur site. Mais ces derniers, puisque le terme regroupe en réalité une variété de technologies, possèdent des caractéristiques techniques différentes permettant d’aller chercher d’importants gains en termes de valorisation des ressources d’uranium et/ou de sûreté.

Point d’origine

Historiquement, les technologies utilisées pour les AMR remontent aux années 1960 et sont regroupées dans l’appellation « génération IV » alors que les réacteurs à eau récents forment la « génération III ». Au début des années 2000, le Forum international Génération IV (GEN IV) identifie six concepts parmi plus d’une centaine pour répondre à cinq objectifs : une meilleure utilisation du combustible, la diminution de la production de déchets, une amélioration de la compétitivité économique, de hauts standards de sûreté, avec, enfin, des critères de non-prolifération nucléaire. Ces technologies GenIV sont aujourd’hui repris pour concevoir des réacteurs de petite taille et modulaires : les AMR.

Le terme AMR regroupe plusieurs familles technologiques

Le terme d’AMR regroupe différentes typologies de réacteurs parfois aussi appelées filières technologiques. Elles se distinguent par leur mode de refroidissement (fluide caloporteur) et leur combustible.

Comme mentionné plus tôt, le Forum GENIV a identifié six technologies, mais aujourd’hui seules quatre majeures font l’objet d’un effort de recherche et développement.

Les réacteurs à haute ou très haute température. Ils sont capables d’atteindre des températures entre 800°C et 900°C. De ce fait, ils sont principalement étudiés pour la production de chaleur et d’hydrogène. Ils sont à neutrons lents comme le parc nucléaire actuel.

Les réacteurs à neutrons rapides à caloporteur au sodium. Ils sont capables d’utiliser comme combustible des matières nucléaires issues du retraitement des combustibles, sans apport de ressource en uranium naturel.

Les réacteurs à neutrons rapides à caloporteur au plomb. Ils reprendraient les mêmes caractéristiques que la précédente famille, mais offriraient une alternative avec le plomb, potentiellement plus compétitive économiquement.

Les réacteurs à sels fondus. Cette typologie comporte une grande variété de concepts dont certains peuvent être à neutrons lents et d’autres à neutrons rapides. En France, c’est ceux à neutrons rapides qui suscitent l’intérêt, car ils permettraient d’utiliser comme combustible de départ des matières fissiles comme l’uranium 235 et le plutonium 239, mais aussi des matières issues du retraitement des combustibles usés, sans apport de ressource en uranium naturel, voire de transmuter les actinides mineurs de manière efficace.

A noter que ces technologies utiliseraient donc des combustibles spécifiques, avec un cycle, en amont et en aval, qui leur est propre et qui doit être développé.

Pour quelles applications ?

Là où les réacteurs REP en France dont la puissance se situe entre 900 et 1 450 MWe, et même 1 650 MWe pour l’EPR de Flamanville, les AMR ont une puissance comprise entre 20 et 300 MWe. Une centrale AMR comme SMR pourra s’adapter au besoin en multipliant le nombre de modules.

Les SMR et les AMR ne sont pas conçus pour remplacer les centrales actuelles, mais permettraient de compléter l’offre nucléaire afin de répondre à des besoins et usages spécifiques. Ils s’installeraient aussi très bien dans les zones reculées, dans une logique du cycle du combustible contrôlé, en s’intégrant facilement sur le réseau électrique grâce à leur petite taille, pour remplacer les sources d’énergie fortement émettrices en CO2.

Quels acteurs en France et dans le monde ?

En France, ce sont très majoritairement des startups, parfois en partenariat avec des entreprises historiques du nucléaire, qui travaillent sur les concepts d’AMR.

La France a ouvert un Appel à projets « Réacteurs nucléaires innovants », organisée par BPIfrance, qui vise à financer partiellement les phases initiales de développement de ces différents acteurs avec l’objectif d’aboutir à la mise en chantier de quelques démonstrateurs à l’horizon 2030.

Dans le monde, l’AIEA (Agence internationale de l’énergie atomique) recense plus de 90 concepts de SMR/AMR. A titre d’exemple, la DOE (Department of Energy) aux Etats-Unis, soutient un projet de démonstrateur d’AMR à haute température refroidi aux sels fondus, du nom d’Hermès et développé par Kairos Power, qui pourrait entrer en exploitation d’ici 2026. En Europe, la création de l’alliance industrielle européenne par la Commission européenne, annoncée en novembre 2023, a pour objectif d’accélérer le déploiement et la recherche des technologies de SMR et d’AMR. ■

Par François Terminet (Sfen)

Photo : Maquette numérique du réacteur AMR à haute température de Jimmy, Source: ©Jimmy

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