La course aux électrons continue aux États-Unis - Sfen

La course aux électrons continue aux États-Unis

Publié le 4 février 2025

Le plus gros exploitant nucléaire des États-Unis d’Amérique voit les choses en grand pour répondre à la hausse de la demande électrique des États-Unis. Ce mois-ci, Constellation Energy a confirmé le rachat de l’électricien Calpine, ajoutant 27 GW de capacité à son portefeuille. Le pays anticipe une importante hausse de la demande d’électricité qui relance un fort intérêt pour le nucléaire, mais pas seulement.

Constellation Energy, dans un contexte national de ruée vers les électrons, part à la conquête de l’ouest. Le plus gros exploitant nucléaire du pays (26 réacteurs répartis sur 15 centrales[1]) a annoncé avoir trouvé un accord pour concrétiser le rachat l’exploitant Calpine. L’électricien va ainsi renforcer sa présence à l’ouest du pays et disposer d’une base installée d’environ 60 GW avec, dans le lot, un certain nombre de centrales à gaz. Cette transaction intervient dans un contexte où la demande électrique américaine est entrainée vers le haut par le développement, entre autres, des centres de données et des véhicules électriques, dont le nombre a par ailleurs triplé entre 2020 et 2023 [2]. La US Energy Information Administration projette une croissance de la consommation électrique d’environ 2 % par an sur la période 2024-2026.

Un intérêt confirmé pour le nucléaire

Dans ce contexte de croissance, l’intérêt pour les moyens de production d’électricité est grandissant, y compris pour le nucléaire. Un changement de paradigme important alors que ces dix dernières années une douzaine de réacteurs nucléaires ont fermé prématurément pour des raisons économiques. Pour Constellation Energy, qui exploite un quart du parc nucléaire américain, cela s’est manifesté ces derniers mois par le projet de redémarrage de Three Mile Island-1 grâce au soutien de Microsoft, mais également par la signature début janvier 2025 de l’équivalent d’un milliard de dollars de contrats afin d’assurer l’approvisionnement en électricité de 19 agences de l’administration américaine pour les 10 prochaines années avec, en plus, la mise en place des mesures d’économies d’énergies sur plusieurs sites. « Il était frustrant que l’énergie nucléaire soit exclue des contrats de fournitures d’électricité durable que ce soit dans le secteur privé ou public, explique le PDG de Constellation Joseph Domingez. Aujourd’hui ce n’est plus le cas, et cet accord est une nouvelle illustration des changements en cours. Dans le cadre de cet accord, le gouvernement des États-Unis rejoint Microsoft et d’autres entités afin de soutenir l’investissement dans l’énergie nucléaire qui va permettre à Constellation de poursuivre sa politique d’exploitation à long terme », explique l’industriel.

Constellation rachète Calpine et son lot de centrales à gaz

En parallèle de ce retour en faveur due l’atome, le 10 janvier 2024, Constellation a confirmé le rachat de l’électricien Calpine. Constellation va être le premier producteur américain d’électricité bas carbone grâce à son parc nucléaire, mais aussi de la géothermie (725 MWe), un peu d’éolien et de solaire. Ceci étant, le rachat de Calpine comprend majoritairement des centrales à gaz. «  Nous sommes convaincus que le gaz naturel et les énergies bas carbone, ensemble, seront attrayants pour nos clients », a déclaré le PDG de Constellation. Alors que la demande électrique pourrait augmenter de presque 16% d’ici à 2029[3] la transition énergétique américaine pourrait tourner au ralenti malgré l’ajout de nouvelles capacités renouvelables. Le développement rapide de projets nucléaires sera déterminant pour s’attaquer à la réduction de la part des énergies fossiles dans le mix électrique américain qui représentait toujours 60 % de la production en 2023.

De grandes ambitions dans le nucléaire : vers un triplement de la capacité

L’objectif du triplement de la capacité nucléaire d’ici à 2050, de 100 à 300 GW,  a été annoncé la première fois en décembre 2023, lors de la COP28 à Dubaï avec une vingtaine d’autres pays. En novembre 2024, en marge de la COP29 à Bakou, a été publié une feuille de route qui définit un jalon intermédiaire : avoir 35 GW de nouvelles installations nucléaires en service ou en construction en 2035 avec un rythme de déploiement, aux États-Unis et à l’export, de 15 GW par an à l’horizon 2040 ! Au programme, réacteurs de forte et de petite puissance dont les fameux petits réacteurs modulaires (SMR) et de technologie avancée (AMR). La sécurisation d’électrons bas carbone a poussé Google à se lier avec le concepteur Kairos Power alors qu’Amazon a lui annoncé un partenariat avec X-Energy. Le nucléaire a ainsi un important rôle à jouer pour la décarbonation de l’économie américaine pour remplacer notamment les nombreuses centrales à gaz et à charbon, qui semblent aujourd’hui faire toujours partie de la future production d’électricité.■

Gaïc Le Gros (Sfen)

Photo – Le réacteur n°1 de la centrale nucléaire de Three Mile Island doit redémarrer en 2028 grâce au soutien de Microsoft qui cherche à sécuriser sur le long terme son approvisionnement en électricité bas carbone – Shutterstock//Aubrie.K.

[1] En comptant TMI-1 qui doit redémarrer en 2028.

[2] https://afdc.energy.gov/transatlas#/

[3] https://gridstrategiesllc.com/wp-content/uploads/National-Load-Growth-Report-2024.pdf