Google et Kairos Power s’engagent pour déployer une flotte de SMR
Google et Kairos Power ont signé un contrat pour sécuriser 500 MWe de nucléaire d’ici à 2035. Le contrat de long terme va permettre à Google de s’assurer d’un approvisionnement stable en électricité bas carbone et à Kairos Power de dérisquer le déploiement de sa technologie avec le lancement d’une première série de réacteurs.
Pour Google, l’Intelligence artificielle est une révolution qui permet « des avancées scientifiques majeures, qui améliore les services aussi bien à destination des entreprises que des clients et qui stimule la compétitivité et la croissance économique »[1]. Un développement néanmoins énergivore qui nécessite, à l’heure de la lutte contre le changement climatique, de reposer sur des énergies bas carbone. Selon IDC Research[2], les besoins électriques de l’Intelligence artificielle (IA) dans les data centers sont en croissance de 40 %/an et représenteront 145 TWh en 2027. La consommation totale des data centers croît de 20 % /an et pourrait atteindre 850 TWh en 2028. C’est près de deux fois la production électrique de la France[3] ! Afin d’allier déploiement de l’IA et lutte contre le changement climatique, Google porte le projet ambitieux d’atteindre une neutralité carbone effective chaque jour à toute heure grâce à un réseau électrique décarboné. C’est en ce sens que l’entreprise a signé un contrat avec Kairos Power pour une puissance de 500 MWe, soit de quoi déjà constituer une flotte avec ce SMR de 140 MWe.
Neutralité carbone : des problèmes comptables à résoudre
Une récente étude[4] du journal britannique The Guardian montre que les Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazon, et Microsoft) sous-estiment les émissions carbones réelles de leurs centres de données. Cela est notamment dû aux certificats d’origine qui permettent à un acteur de coupler virtuellement sa consommation électrique à une production d’énergie renouvelable sans limites géographique ou temporelle. Par exemple, un acteur peut s’attribuer la production bas carbone d’un champ éolien situé à 3 000 km alors que son usine est physiquement alimentée par une centrale au charbon voisine. Ce système dit de garanties d’origine a été pensé pour financer le développement des énergies renouvelables, mais est aujourd’hui la cible d’importantes critiques. Selon The Guardian, les émissions des data centers seraient ainsi « probablement 7,6 fois plus importantes que déclarées ».
Google revoit ses standards à la hausse
En 2023, Google a relevé ses standards à la hausse et le géant n’affiche plus la « neutralité carbone » que lui offrait l’achat de garanties d’origine à l’international. Selon les nouveaux objectifs, l’entreprise vise une neutralité carbone réelle chaque jour à toute heure dès 2030. Géothermie, solaire, éolien, l’entreprise mise sur toutes les énergies bas carbone afin de transformer les réseaux électriques qui l’alimentent. Concernant le nucléaire, Google souligne que l’accord avec Kairos Power « permettra d’alimenter les réseaux électriques américains avec 500 MWe supplémentaires d’énergie bas carbone, 24h/24 et 7j/7, et d’aider davantage de collectivités à bénéficier d’une énergie nucléaire propre et bon marché ».
Un intérêt marqué pour le nucléaire
Cette annonce rappelle celle de Constellation Energy et de Microsoft planifiant le redémarrage d’un réacteur de 900 MW à Three mile Island et celle d’Amazon pour le rachat d’un data center (0,9 GW) alimenté par la centrale nucléaire de Susquehanna (2,5 GW). Cependant, les spécificités de l’annonce de Google lui donnent un écho particulier pour le nucléaire. En effet, elle ne concerne pas un réacteur du parc historique, mais bien une nouvelle technologie : un réacteur à haute température refroidi avec des sels fondus aussi appelée FHR. Plus encore, elle marque un engagement contractuel pour une flotte de réacteurs, l’unité de Kairos Power visant une puissance de 140 MWe, l’accord concernerait alors la construction de quatre unités (560 MWe). Une première pour un réacteur de quatrième génération.
Kairos Power a célébré en 2024 les premiers travaux de construction de son démonstrateur Hermès. L’entreprise déploie une stratégie itérative avec la construction et l’exploitation de plusieurs démonstrateurs eux-mêmes soutenus par des installations de recherche. Globalement, l’idée est de multiplier les fabrications et les tests à l’image de ce qu’a réalisé SpaceX dans l’aérospatial.■
[1] https://blog.google/outreach-initiatives/sustainability/google-kairos-power-nuclear-energy-agreement/
[2] https://www.idc.com/getdoc.jsp?containerId=prUS52611224
[3] RTE, 2023, production de 497 TWh.
[4] https://www.theguardian.com/technology/2024/sep/15/data-center-gas-emissions-tech