Taxonomie : le nucléaire au rang des énergies durables en Europe
Mercredi 3 février, la Commission européenne a publié la version définitive de l’acte délégué de la taxonomie européenne dédié au gaz et au nucléaire. Pour la première fois, un texte européen affirme le rôle de l’atome dans la lutte contre le changement climatique, même si des conditions à revoir sont imposées. Une bonne nouvelle pour le climat et l’Europe.
Fin décembre 2021, la Commission a entamé la consultation de la plateforme sur la finance durable et le Conseil européen sur l’acte délégué de la taxonomie européenne dédié au nucléaire et au gaz. La taxonomie est un classement des activités vertes favorable à l’atteinte de la neutralité carbone en 2050, en orientant les flux financiers. La version finale de l’acte délégué a été rendue publique le 2 février.
Le nucléaire fera bien partie de la taxonomie européenne au titre d’énergie de transition, tout comme le gaz. Cela signifie que l’atome est perçue comme un outil transitoire vers un système 100 % renouvelable, comme l’a expliqué Mairead McGuinness, commissaire chargée des services financiers, à l’occasion d’une conférence de presse.
Un texte équilibré selon la Commission
Elle explique : « Aujourd’hui, nous exposons comment le gaz et le nucléaire pourraient contribuer à la difficile transition vers la neutralité climatique. Nous mettons en place des conditions strictes pour leur inclusion dans la taxonomie. Ils sont soumis à des limites et à des périodes de suppression claires ». Elle ajoute toutefois que « les États membres restent pleinement responsables de la décision de leur bouquet énergétique ».
Mairead McGuinness juge que la Commission « a trouvé un équilibre entre des opinions fondamentalement différentes en soutenant la voie de la décarbonation ». De son côté, Yves Desbazeille, directeur général de Foratom, se dit « déçu que le nucléaire continue d’être traité comme une technologie de transition. Nous sommes fermement convaincus que le nucléaire contribue aux objectifs d’atténuation du changement climatique et ne cause pas plus de dommages que toute autre technologie de production d’électricité déjà considérée comme conforme à la taxonomie. Cela a été confirmé par les experts de la Commission du Centre commun de recherche eux-mêmes ».
Des conditions à revoir
Lors de l’examen du texte, la Sfen s’était félicité que, pour la première fois, un texte européen reconnaisse l’apport essentiel du nucléaire dans la lutte contre le changement climatique et l’atteinte des objectifs de baisse d’émission de l’UE. La Sfen a également émis, dans un papier de position, une série de recommandations pour améliorer l’acte délégué. Il serait par exemple nécessaire de :
1. Sortir le nucléaire des énergies de transition et l’inclure dans les énergies durables
2. Intégrer les activités du cycle du combustible (enrichissement, retraitement, etc.)
3. Inclure les opérations de maintenance des installations nucléaires dans la taxonomie
4. Revoir les dates limites pour la construction et la prolongation des réacteurs.
5. Revoir les dates sur le stockage géologique
6. Ne pas toucher aux responsabilités ni entraver l’action des autorités de sûreté
7. Ne pas exiger le recours aux Accident Tolerant Fuel (ATF)
Désormais, l’acte délégué est soumis pour une période de quatre à six mois à consultation. Le document n’est plus amendable. En revanche, il peut être rejeté si 20 pays membres s’y opposent, ce qui est impossible puisque de plus en plus de pays en Europe se tournent vers le nucléaire pour garantir leur sécurité d’approvisionnement et se débarrasser des énergies fossiles. Le Parlement pourrait également s’y opposer avec un vote de la majorité des parlementaires.