Quand les Néerlandais font du crowdfunding nucléaire - Sfen

Quand les Néerlandais font du crowdfunding nucléaire

Publié le 11 novembre 2023 - Mis à jour le 13 novembre 2023
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Le 31 octobre dernier, à Amsterdam, a été lancé la toute première coopérative de financement du nucléaire. Un mouvement de la société civile inédit et concomitant à une volonté de relance du nucléaire au Pays-Bas depuis 2021.

De Atoomcoöperatie, c’est-à-dire, « la coopérative atomique » en néerlandais, est une initiative unique au monde. Mus par un enthousiasme et une conviction que les Pays-Bas ont fait un bon choix en s’engageant dans une relance du nucléaire, ses membres, tous bénévoles, aspirent à ce que cette relance, qui correspond aujourd’hui à l’étude de construction de deux réacteurs et le déploiement de SMRs, implique de multiples parties prenantes : financiers, citoyens, industriels, etc.

L’initiative est d’autant plus significative que le nucléaire a souvent été pointé du doigt comme une énergie dont la gouvernance était centralisée, aux mains d’un pouvoir technocratique, au contraire des renouvelables : « il existe déjà de nombreuses coopératives énergétiques aux Pays-Bas où les gens peuvent devenir copropriétaires d’un parc éolien ou d’un champ solaire », explique Patrick Bauduin, son cofondateur. « Nous voulons que cela soit également possible pour les centrales nucléaires et nous espérons que les citoyens et les entreprises auront leur mot à dire et bénéficieront de la construction d’une centrale nucléaire ».

Un amorceur de projet

Bien sûr, les montants nominaux à investir dans des technologies nucléaires, même de petite taille, rendent a priori inenvisageable son financement unilatéral par la coopérative. D’autres acteurs devront être mobilisés. L’initiative pourrait alors indirectement attiser l’intérêt d’intermédiaires de marchés plus traditionnels (banques, fonds d’investissement, etc.) rassurés par ce mouvement de soutien au nucléaire.

Concrètement, l’adhésion annuelle de 23,50 euros offre à ses membres une voix sur un modèle démocratique. Dans un premier temps, les sommes récoltées permettront de sonder les opportunités d’investissement qui essaiment (réacteurs de haute puissance ou SMR). Une fois les projets sélectionnés, un nouveau « tour de table » devrait permettre à la coopérative d’injecter les fonds propres dans ces derniers. À la différence du modèle finlandais Mankala, dans lequel les apporteurs de fond sont rémunérés « en nature » via un droit de soutirage, dans la « coopérative atomique », ses membres sont rétribués par le versement de dividendes liés au profit réalisé par les infrastructures financièrement soutenues.

Il faudra toutefois être attentif à ce que la diffusion de l’initiative soit la plus large possible afin de toucher un public le plus représentatif de la société civile et pas uniquement restreint à un ensemble de personnes « initiées ». En outre, un tel dispositif pourrait offrir aux personnes dotées en capitaux économiques (ceux à même d’investir) un instrument de couverture financier, exposant seuls les ménages les plus vulnérables et/ou les moins informés aux risques de marché. Ces enjeux de justice énergétique devront faire l’objet d’étude fine. ■

Ilyas Hanine (Sfen)

Photo : lancement de la coopérative le 31 octobre à Amsterdam

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