Canicule : les dérogations de rejets de réacteurs nucléaires prolongées jusqu’au 7 août - Sfen

Canicule : les dérogations de rejets de réacteurs nucléaires prolongées jusqu’au 7 août

Publié le 2 août 2022
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La France va affronter sa troisième vague de chaleur de l’été 2022. Ces épisodes ont un impact sur la température des cours d’eau, au point d’atteindre les limites réglementaires prévues pour les rejets de certains réacteurs. En conséquence, les dérogations accordées à quatre centrales par l’ASN sont prolongées jusqu’au 7 août.

L’ASN a acté la prolongation de la dérogation temporaire sur les rejets thermiques des centrales de Golfech, de Saint-Alban, du Blayais et du Bugey jusqu’au 7 août 2022. Une décision motivée par le nouvel épisode caniculaire qui touche le pays. Lors du dernier passage de fortes chaleurs fin juillet, seule la centrale de Bugey avait finalement eu recours à cette dérogation. Ces dispositions sont nécessaires pour préserver localement la stabilité du réseau électrique, c’est-à-dire l’équilibre entre production et consommation.

Le réchauffement climatique global et les épisodes caniculaires entrainent une élévation globale de la température des cours d’eau. Or la réglementation en France n’autorise pas un réacteur à rejeter de l’eau chaude, si en amont la température de l’eau est déjà supérieure aux limites prévues. Des dernières sont propres à chaque centrale nucléaire. Quand bien même les rejets d’eau des centrales (environ 98 % de l’eau prélevée) ne sont que de quelques dixièmes de degrés supérieurs à l’eau de la rivière après dilution, les réacteurs d’une centrale peuvent être amenés à réduire leur puissance, voire être arrêtés. C’est le premier niveau de limite. À noter que les centrales situées en bord de mer (14 réacteurs sur les 56), sont peu, voire pas, impactées. L’eau y est plus froide et abondante, et les rejets n’ont qu’un très faible impact thermique au-delà de la zone proche de l’endroit des rejets.

Trois niveaux de limites

Toutefois, un deuxième niveau limite est prévu « si le gestionnaire du réseau électrique (RTE) exprime le besoin de maintenir une puissance minimale pour assurer la sécurité du réseau électrique. Il s’applique sans décision de l’ASN qui en est toutefois informée. Il est associé à un programme de surveillance renforcée de l’environnement », explique l’Autorité de sûreté nucléaire. Le troisième niveau de limite, comme déployé actuellement, s’applique en cas de très haute vague de chaleur, alors que le maintien des réacteurs « relève d’une nécessité publique ». Auquel cas c’est le code de l’environnement qui s’applique et permet à l’ASN d’encadrer temporairement ces rejets.

Sur la base de travaux d’EDF réalisés depuis plus de trente ans, on constate que la situation de la faune et de la flore en amont et en val des centrales nucléaires n’est pas différente. « La demande d’EDF a été acceptée au regard du retour d’expérience de la surveillance de l’environnement spécifiquement réalisée lors d’épisodes caniculaires antérieurs ainsi que du suivi de long terme des écosystèmes concernés », explique l’ASN. En revanche il est constaté que les cours d’eau doivent s’adapter au changement climatique global. Dans un entretien de La Tribune, l’inspecteur en chef de l’ASN, Christophe Quintin, juge qu’avec la canicule, « il faudrait repenser les seuils de température des cours d’eau ». Ceux-ci se reposent sur des éléments des années 60 et 70.

Pour l’heure, la production nucléaire est relativement peu affectée par le changement climatique. Selon RTE, entre 2015 et 2020, les indisponibilités de réacteurs nucléaires s’élèvent en moyenne à 1,4TWh/an, soit moins de 0,4 % de la production nucléaire annuelle. En revanche dans son étude « Futurs énergétiques 2050 », RTE note que « l’augmentation des situations de sécheresse à la fin de l’été et à l’automne pourra également conduire à des périodes de tension pour l’équilibre offre-demande d’électricité, d’autant plus si ces sécheresses se combinent avec des périodes de faible vent ». ■

Par Ludovic Dupin (Sfen)
Photo : La Garonne près de Toulouse –  ©Frederic Scheiber / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP

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