Nucléaire et robotique - Sfen

Nucléaire et robotique

Publié le 10 juin 2016 - Mis à jour le 28 septembre 2021

Plusieurs évolutions structurantes font bouger l’industrie nucléaire et façonneront son avenir : internet des objets pour que les machines communiquent entre elles, puces RFID pour la traçabilité des matériaux, modélisation et réalité virtuelle pour construire, exploiter et démanteler une installation, big data pour exploiter l’ensemble des données. Mais il faut aussi compter sur la robotique qui crée des machines de plus en plus intelligentes, capables d’aller où l’homme ne va pas.

 

En matière nucléaire, la robotique connait plusieurs domaines d’application. Les premiers « robots » développés aux Etats-Unis dès les années 1950, se résumaient à des bras de manipulation, dotés de caméras et de projecteurs. Après l’accident de Three Mile Island en 1979, les tâches de surveillance, d’inspection et de décontamination étaient effectuées par des manipulateurs télécommandés, dont les célèbres Fred (pour la surveillance à distance), SISI, ROSA (pour enlever le combustible du cœur) et autre Louie.

Un des premiers prototypes de robot télé-opéré français construit pour intervenir en terrain très radioactif a été imaginé dès 1975 par le CEA. MERIT (Module d’Entrée et de Réparation Interne de Tuyauteries d’eaux) était capable de monter et descendre les escaliers, franchir des obstacles et se saisir d’objets, tout en résistant aux radiations, pour effectuer des observations vidéo, contrôles de sécurité et des opérations de maintenance dans les circuits hydrauliques des centrales nucléaires.

En 1983, le robot MIR (Machine d’inspection des réacteurs rapides) a suivi son exemple pour réaliser des contrôles de soudures par ultrasons entre la cuve principale et la cuve de sécurité de Superphénix. Vinrent ensuite Centaure, commandé à 500 mètres, pour intervenir en milieu hostile après un accident nucléaire et Sherpa, doté de six jambes télescopiques et d’un plateau pour porter des charges lourdes.

De fait, Centaure a prouvé toute son efficacité après l’accident de Tchernobyl et la création en 1988 du Groupe d’intervention robotique sur accidents (INTRA) par EDF, AREVA et le CEA. INTRA dispose en effet d’un parc de robots dérivés de Centaure, capables d’intervenir à la place de l’homme.

Mais depuis, les matériels d’intervention ont bien évolué dans tous les domaines. Loin de remplacer l’homme, ils permettent de réduire les risques d’exposition en zone hostile. C’est le cas du bras manipulateur Maestro et son logiciel de supervision en temps réel. Issu de 20 ans de R&D entre le CEA, Cybernetix et l’IFREMER, Maestro est capable d’emporter dans des zones très radioactives les scies, perceuses, meuleuses ou cisailles nécessaires pour découper in situ des appareils irradiés. Il peut être installé sur un pont roulant, un monte-charge ou un véhicule selon le chantier.

Dans les centrales nucléaires françaises, tout le monde connait la MIS, machine d’inspection en service. Véritable pieuvre d’acier de 12 tonnes et 7 mètres de haut, la MIS, commandée à distance par 300 mètres de câbles de fibre optique, scrute en une dizaine de jours chaque centimètre carré de la cuve des réacteurs. Vidéo, ultrasons, radiographie… de ses examens dépend la poursuite du fonctionnement de la cuve.

Imaginé et conçu par AREVA, RIANA peut intervenir sur tous les sites nucléaires, à l’extérieur comme à l’intérieur. Véritable 4X4, il est modulaire et peut donc répondre seul à une diversité de missions, là où plusieurs robots seraient nécessaires : cartographies 2D ou 3D, prélèvement d’échantillons solides et liquides, mesures physiques, mesure de la radioactivité…

GETINGE La Calhene, équipementier spécialisé notamment dans les matériels de protection de l’homme en milieu hostile a développé MT200 TAO, un programme de télé-opération assistée par ordinateur qui met à profit de la télémanipulation les travaux des calculateurs rapides et les nouveaux moteurs électriques. Intervenant depuis la fin des années 1970 en milieu nucléaire, Getinge La Calhène a industrialisé avec AREVA, cinq systèmes de TAO dont un en service depuis 2015 à l’usine de retraitement du combustible de La Hague (Manche).

Un domaine d’application important pour la robotique est celui du démantèlement. C’est notamment  grâce aux équipements d’usinage et de soudage conçus et réalisés par PROTEM que s’est réalisé le premier et unique démantèlement dans le monde des internes et de la cuve du réacteur refroidi au sodium KNK II de Karlsruhe en Allemagne.

Pour que les robots soient efficaces en zone fortement exposée aux radiations, leur électronique est  « durcie », l’instrumentation devant résister aux radiations. ERMES, spécialiste en la matière, a développé dans son laboratoire commun avec le CEA,  des solutions très innovantes en matière de vision (caméras et éclairages LED hautement résistants), mesure (dosimètres, codeurs…), analyse (processeurs résistant aux radiations) et transmission (filaire et sans fil). 

Publié par Isabelle Jouette (SFEN)