Le Sénat veut lever le plafond nucléaire en France

Alors que la France devrait bientôt s’engager dans la relance d’un grand programme nucléaire, le gouvernement soumet au Parlement une loi pour rationaliser les procédures administratives qui précèdent le chantier. À l’occasion de l’examen de ce texte, les sénateurs ont décidé d’ouvrir ce texte à des considérations de politiques énergétiques. Ils ont la volonté en particulier de faire sauter l’objectif de 50 % de nucléaire en France en 2035.
Mardi 17 janvier, les sénateurs ont examiné le texte d’accélération du nucléaire qui prévoit un ensemble de dispositifs pour simplifier le démarrage des nouveaux chantiers de réacteurs nucléaires en France, en particulier en raison de dérives calendaires dues à des démarches administratives complexes. La ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher espère les limiter à moins de 56 mois, soit moins de cinq années.
Mais lors de la discussion, les parlementaires ont toutefois décidé d’aller plus loin en revenant sur des dispositions prises dans la loi de 2015 et dans la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) de 2019. Si ce texte était censé se cantonner à des éléments techniques et ne pas rentrer dans des considérations de programmation énergétique, les sénateurs ont voulu « donner un signal fort de relance du nucléaire », explique le rapporteur Daniel Gremillet (LR), Sénateur des Vosges (LR).
Sans l’appui du gouvernement
Ainsi, les élus ont adopté la suppression de l’objectif de 50 % de nucléaire dans le mix électrique français à l’horizon 2035. Initialement prévue pour 2025, cette échéance avait été reculée de dix ans par Nicolas Hulot, alors ministre en charge de l’énergie. Le maintien d’un tel plafond arbitraire aurait conduit à cranter la fermeture de réacteurs nucléaires, en plus de ceux des deux unités de Fessenheim fermées en 2020. Une perspective qui n’allait pas dans le sens de la volonté du Président de la République de prolonger tous les réacteurs qui le peuvent, comme expliqué lors de son discours de Belfort en février 2022.
Conséquemment, les sénateurs ont également supprimé la puissance nucléaire maximum installée en France, fixée à 63,2 gigawatts dans le code de l’énergie. Ces amendements, qui n’étaient pas demandés par le gouvernement, ont provoqué une réaction de la Commission nationale du débat public (CNDP) qui organise actuellement un débat public sur le futur programme EPR2. Ces mesures prises reviennent « en revanche à considérer comme sans intérêt pour définir la stratégie énergétique les interrogations, les remarques et les propositions faites lors du débat public en cours », jugent Chantal Jouanno, Présidente de la CNDP, et Michel Badré, responsable du débat EPR2.
Pourtant, la filière nucléaire a en effet besoin de signaux clairs sur l’avenir de la filière, en particulier en ce qui concerne les enjeux d’attractivité de la filière et de recrutement. En l’état, la loi française prévoit toujours la fermeture de réacteurs en France et la baisse de la part du nucléaire. Ces horizons devraient être revus dès l’été 2023 à l’occasion du vote de la prochaine loi de programmation énergie climat (LPEC). ■