La ministre en visite au Creusot à l’occasion de l’annonce d’une nouvelle relocalisation

Alors que la France organise une vaste relance de sa filière nucléaire, elle vise aussi à localiser le maximum de la chaine de valeur sur le territoire national. Dans ce contexte, la ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher s’est rendue à l’usine de Framatome du Creusot pour annoncer la relocalisation de la fabrication d’internes de cuve.
La ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher était en visite le vendredi 3 mars dans l’usine de Framatome au Creusot (Saône-et-Loire). Le premier objectif était de marquer l’anniversaire du discours d’Emmanuel Macron à Belfort en février 2022, qui envisageait une grande relance de la filière nucléaire. Le second objectif était d’inaugurer le lancement d’un nouveau projet de relocalisation de la filière, celui des internes de cuve.
L’usine du Creusot est l’une des seules forges au monde capables de réaliser les pièces de grande taille indispensables à la fabrication des composants primaires de l’îlot nucléaire pour des réacteurs nucléaires de troisième génération. Le site réalise le forgeage, le traitement thermique et l’usinage préalable à l’assemblage des composants de la boucle primaire. Au total, Framatome accueille aujourd’hui près de 3 000 salariés en Bourgogne Franche-Comté. Il recrute et forme près de 400 personnes par an sur la région. L’usine du Creusot se prépare déjà depuis 18 mois pour le programme français afin, en particulier, de standardiser tous les réglages des futures fabrications.
Point sur la relance de la filière nucléaire
Un an après le discours de Belfort, Agnès Pannier-Runacher a cité le Président Emmanuel Macron : « Notre avenir énergétique et écologique passe par le nucléaire ». Compte tenu, des exigences que pose aujourd’hui la lutte contre le réchauffement climatique, il est interdit de se priver d’un levier de décarbonation, assure-t-elle. « Dire le contraire, c’est faire le jeu des climatosceptiques », ajoute-t-elle encore.
Elle a ensuite fait le point des travaux menés depuis un an, et de ceux qui restent à accomplir. Elle a rappelé que nous venons de dépasser le premier jalon, celui sur la démocratie du débat public. La concertation nationale citoyenne sur le mix énergétique, close le 18 janvier, a recueilli plus de 30 000 contributions. Elle s’est terminée par un forum des jeunesses avec 200 participants âgés de 18 à 35 ans tirés au sort sur tous les territoires français. Quant au débat public sur le programme de construction de nouveaux réacteurs EPR2, organisé par la CNDP, il s’est terminé le 27 février.
Le second jalon pour EDF, une fois les conclusions du débat rendues, sera de déposer son dossier de demande d’autorisation de la première paire d’EPR2 à Penly. Le troisième jalon, c’est la restructuration de la filière, avec en particulier la création de la Délégation interministérielle au nouveau nucléaire, qui veillera à ce que « les meilleures pratiques d’organisation, de pratiques industrielles, et de conduite des projets soient mises en œuvre ». Il s’agira pour l’État d’accompagner ce projet, qui sera « le plus grand projet industriel lancé depuis le début de ce siècle ».
Pour la ministre, l’ambition et la feuille de route sont désormais très claires. Et « ce qui fera la réussite de ce programme, sera les hommes et les femmes, que ce soit chez EDF, que ce soit chez Framatome, que ce soit dans toute la filière, que ce soit au niveau des autorités de contrôle et de l’expertise ». La ministre a rappelé la nécessité que l’année 2023 soit celle d’un « Plan Marshall des compétences » : la filière doit recruter, rien que sur les entreprises EDF, Framatome, et Orano, plus de 5 500 personnes par an, et plus de 10 000 par an dans l’ensemble de la filière.
Elle a ajouté, à la veille de l’opération sur les métiers du nucléaire lancée par la filière, « qu’il faut que nous nous donnions les moyens de recruter les meilleurs, de les motiver, de les conserver et de faire en sorte que plus de jeunes et plus de personnes en reconversion puissent venir sur ce programme, sans déshabiller d’autres industries ».
Le projet de relocalisation des internes de cuve.
Framatome a aussi engagé un certain nombre de projets de relocalisation de fabrications et d’activités stratégiques notamment pour le programme EPR2. Le 3 mars a été annoncée la ré-internalisation chez Framatome au Creusot de la fabrication des internes de cuve pour l’EPR2, actuellement fabriqués en République tchèque chez Skoda. Pour mémoire les internes de cuve forment le support pour les assemblages de combustibles au cœur du réacteur et sont donc des éléments essentiels à la sûreté nucléaire. Ils sont composés de différentes pièces en acier inoxydable (interne inférieur, interne supérieur, cloisonnement lourd, guides de grappes) qui assurent le maintien des éléments de combustibles ainsi que le guidage des guides de grappes et des thermocouples passant à travers le couvercle de la cuve.
Historiquement, les internes de cuve du parc électronucléaire français ont été fabriqués en Bourgogne. Néanmoins, celle des cuves EPR a été sous-traitée par Framatome, depuis OL3 (Olkiluoto3 – Finlande) jusqu’à la fabrication de HPC (Hinkley Point C. La France ne dispose pas aujourd’hui de moyens industriels permettant de fabriquer les internes de cuve EPR2. Dépendre d’un seul sous-traitant représente un risque en termes de robustesse de chaine d’approvisionnement.
Pour ce projet de relocalisation, Framatome a fait l’acquisition d’un bâtiment situé au Creusot. Le nouvel atelier sera structuré et dimensionné pour répondre aux exigences de fabrication des internes EPR2 (tailles de pièces, matériau inox, tolérances dimensionnelles) et pour prendre en compte le retour d’expérience des fabrications précédentes (usinage, soudage). Framatome prévoit d’acheter des équipements lourds et de moderniser des outils existants.
Cette relocalisation d’activité s’accompagnera de la création d’au moins 50 emplois directs fortement qualifiés et plus de 150 emplois indirects. La mise en service de l’atelier est prévue en 2025 pour un début de fabrication au premier trimestre 2026. ■