Égypte : permis de construire pour la centrale russe de El Dabaa

L’Égypte concrétise son projet nucléaire. En effet, la première unité d’El Dabaa, la toute première centrale nucléaire du pays, vient de recevoir son permis de construction. À terme, la centrale comptera quatre réacteurs VVER de 1 200 MW. Un atout pour répondre aux besoins énergétiques croissants du pays. Plus encore, la centrale pourrait alimenter une nouvelle usine de désalinisation.
« En raison des ressources énergétiques limitées en combustibles fossiles[1] et de l’énergie hydraulique presque entièrement exploitée à son maximum, l’Égypte envisage depuis un certain temps différentes options pour satisfaire la demande croissante d’électricité, y compris l’énergie nucléaire », explique Mohamed M. Megahed, du Nuclear Power Plants Authority (NPPA). Il ajoute : « dans le même temps, l’Égypte dépend largement du Nil pour satisfaire ses besoins en eau douce. L’accord sur les eaux du Nil, conclu en 1959 entre l’Égypte et le Soudan, a fixé à 55,5 milliards de m3 le volume annuel des eaux du Nil arrivant en Égypte ».
C’est donc pour répondre à deux défis majeurs, l’accès à l’électricité et à l’eau douce, que la construction d’une centrale nucléaire a été décidée dans le pays. Des défis exacerbés par la forte croissance démographique avec une population qui est passé de 90 millions d’habitants en 2013 à 100 millions en février 2020.
Un mix électrique à diversifier
L’Égypte produit aujourd’hui son électricité avec des combustibles fossiles qu’elle souhaite « préserver » comme indiqué par le futur exploitant. Sur les 194 TWh produits en 2019 – pour comparaison, la France a produit la même année 537 TWh et a consommé 473 TWh -, 150 proviennent des centrales à gaz et 25 TWh du fioul. L’hydraulique compte pour seulement 13 TWh et le solaire, l’éolien se partagent le reste, c’est-à-dire environ 5 TWh (3 % du mix électrique).
Mais Le Caire vise la décarbonation et la diversification du mix électrique grâce au nucléaire et aux énergies renouvelables. Ces dernières pourraient représenter 42 % du mix électrique en 2035 selon le plan approuvé en 2016, nommé The Integrated Sustainable Energy Strategy 2035.
Un projet de longue date contractualisé en 2017 avec Rosatom
Les ambitions d’un programme nucléaire national naissent dans les années 1950 et le site d’El Dabaa, situé sur la côte méditerranéenne à l’ouest d’Alexandrie, est sélectionné en 1980. Le projet sera abandonné après l’accident de Tchernobyl en 1986.
Dans les années 2000, l’Égypte envisage à nouveau un projet nucléaire à El Dabaa avec cette fois-ci une cogénération électricité/eau douce. Un projet qui se concrétise en 2017 lors de la signature du contrat avec le russe Rosatom. Le contrat comprend non seulement la construction de quatre réacteurs russes (VVER) de 1 200 MW mais aussi la formation des équipes, la maintenance pendant les 10 premières années et la fourniture du combustible durant toute la durée d’exploitation. Le projet est financé à hauteur de 85 % par un prêt étatique russe et à 15 % par des fonds égyptiens. [Mise à jour] Le premier béton de l’unité 1 a été coulé le 20 juillet 2022.■
Par Gaïc le Gros (Sfen)
Photo de la signature entre la Russie et l’Egypte en 2017 – Copyright : KHALED DESOUKI / AFP
[1] L’Égypte est un important producteur de gaz, historiquement exportateur, mais peine à répondre à la hausse de la demande domestique. Ainsi dans les années 2010, le pays a dû importer du GNL, note l’US Energy Information Administration. https://www.eia.gov/international/content/analysis/countries_long/Egypt/egypt.pdf