COP 27 : quel rôle et quelle place pour le nucléaire ?
Une nouvelle COP a ouvert ses portes le 6 novembre en Égypte. Celle-ci vise notamment à mettre au niveau les engagements pris par les États lors de l’Accord de Paris en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, d’adaptation et de résilience face au changement climatique, et de financement des investissements nécessaires à la transition. À chaque COP, le nucléaire est de plus en plus présent, s’imposant comme une solution incontournable.
La 27e Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (COP27) a démarré ce dimanche 6 novembre. Au cours des deux semaines de l’événement (jusqu’au 18 novembre), chefs d’état, entreprises, ONG se réuniront à Charm el-Cheikh en Égypte pour s’entendre sur des engagements actualisés de lutte contre le réchauffement climatique pris en 2015.
Dans le cadre de l’Accord de Paris, presque tous les pays du monde se sont engagés à :
- Maintenir l’augmentation de la température moyenne mondiale à un niveau « bien inférieur » à 2°C, et idéalement à 1,5°C, par rapport aux niveaux préindustriels.
- Renforcer la capacité d’adaptation au changement climatique et la résilience.
- Aligner les flux financiers sur « une trajectoire vers de faibles émissions de gaz à effet de serre et un développement résilient au changement climatique »[1].
L’écosystème nucléaire s’inscrit dans ce triptyque, c’est ce que nous proposons d’examiner successivement dans cet article. Dans le cas de la France, Emmanuel Macron explique que le respect des objectifs du pays reposera sur « la sobriété énergétique, sur le développement accéléré des renouvelables et des solutions qui nous permettent de nous passer durablement des fossiles, comme l’accélération du nucléaire ».
.@EmmanuelMacron à la #COP27 sur la stratégie à mener par les pays riches: sobriété énergétique, accélération des renouvelables et “des solutions qui nous permettent de nous passer de manière durable des fossiles comme l’accélération du nucléaire” pic.twitter.com/Yftgo4RkwK
— Valerie Faudon (@ValerieFaudon) November 7, 2022
Urgence sur les émissions
Pour espérer respecter les engagements de 2°C pris lors de l’Accord de Paris, il faut cesser dès maintenant d’investir dans les énergies fossiles[2]. En conséquence, il est nécessaire d’opérer une transition des systèmes énergétiques encore aujourd’hui dominés à plus de 80 % dans les fossiles vers les énergies bas carbone. Or, il y a aujourd’hui consensus sur le rôle du nucléaire dans la décarbonation de nos économies : « Pays, organisations internationales, experts scientifiques et autres membres de la société civile sont plus univoques que jamais sur le rôle clé que l’énergie nucléaire doit jouer dans la réponse au changement climatique, et le niveau d’acceptation et de l’acceptation et le soutien du public ne cessent d’augmenter »[3]., explique l’Agence internationale de l’énergie atomique dans son rapport Climate Change and Nuclear Power 2022.
Le nucléaire a permis d’éviter l’émission de 70 gigatonnes de CO2 sur les cinq dernières décennies. C’est l’équivalent des émissions de la production d’électricité dans le monde entre 2015 et 2019. L’atome apparaît comme une solution incontournable à la lutte climatique. Globalement, le nucléaire représente 26 % de l’électricité bas carbone consommée en 2021. À l’avenir, l’AIEA estime que le nucléaire permettra d’éviter l’émission d’une gigatonne de CO2 annuellement. Ceci repose sur une estimation de l’intensité carbone du nucléaire comprise entre 5,1 et 6,4 g éq.CO2/kWh. Rappelons que pour le cas français, EDF a produit une analyse du cycle de vie (ACV) donnant une intensité pour le parc historique de 4g éq.CO2/kWh.
La résilience du nucléaire au changement climatique
Le relèvement des normes de sécurité et l’adaptation de la conception des centrales nucléaires réduisent le risque de perte de production des centrales. L’AIEA donne à ce sujet la statistique suivante : malgré une dégradation des conditions météorologiques entre 1990 et 2019, les pertes de capacité nucléaire ont diminué sur la même période. Au global, moins de 0,1 % de la production a été perdue.
De nombreux risques climatiques peuvent être atténués, à condition que les exploitants prennent les mesures d’adaptation nécessaires. Dans ce contexte, l’AIEA a initié un projet technique qui s’appuie sur l’expérience la plus récente des États membres dans l’application de méthodes de prévision du climat pour l’évaluation des risques sur les sites nucléaires existants et nouveaux. En France, EDF travaille avec Météo France à la surveillance des phénomènes météorologiques pour produire l’électricité en toute sécurité.
Flécher les investissements vers le bas carbone
Un des enjeux majeurs pour le nucléaire sera celui de son financement. Projet long, coûteux et avec un risque de construction élevé, le marché actuel n’est pas en mesure de fournir l’investissement dans la capacité nucléaire nécessaire pour atteindre l’objectif zéro émission du secteur électrique, aujourd’hui responsable de 40 % des émissions et également dominé par les fossiles (à plus de 60 %).
Aujourd’hui, plus de 33 pays incluent le nucléaire dans leur taxonomie. Ces taxonomies opèrent une classification des activités économies avec un impact positif sur le climat sont une première étape vers une « finance durable ». ■
Par Ilyas Hanine
Photo : La COP27 se déroule en Égypte du 7 au 18 novembre – ©Javad Parsa / NTB / NTB via AFP
[1] En outre, cette COP mettra l’accent sur l’engagement des pays riches à financer l’action climatique des pays en développement.
[2] Rapport du groupe 3 du GIEC.
[3] AIEA : « . Securing Clean Energy for Climate Resilience”