« Une université hors les murs au service de la filière » - Sfen

« Une université hors les murs au service de la filière »

La Semaine des métiers du nucléaire du 9 au 13 mars 2026, co-organisée par l’Université des métiers du nucléaire avec France Travail, est l’occasion d’aller à la rencontre du public et de présenter les métiers qui recrutent dans le nucléaire. Depuis 2023, l’UMN pilote en outre le plan d’action Compétences.  Nommée présidente le 1er juillet 2025, Anne Jancovici fait le point sur les collaborations en cours, leurs avancées concrètes et les perspectives pour 2026.

Qu’est-ce qui fait la spécificité de l’UMN ?

L’UMN1 a fait le choix d’un modèle original : être une université « hors les murs » qui fédère les acteurs publics et privés autour des enjeux de compétences de la filière nucléaire française. Dans cette dynamique, elle s’appuie sur une coopération renforcée avec l’État – en particulier la Délégation interministérielle au nouveau nucléaire (Dinn), les ministères de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, de l’Industrie et du Travail – ainsi que les entreprises et les acteurs de la formation.

L’UMN, association loi 1901, s’engage à valoriser les métiers de la filière, aligner la formation sur les enjeux industriels et sécuriser les quelques 100 000 recrutements que la filière prévoit d’opérer dans la prochaine décennie.

Quelles seront vos priorités en 2026 ?

Les trois priorités structurantes de l’UMN, établies dès le départ, continueront de guider notre ambition : attirer, former et recruter. Pour cela, nous prenons appui sur le plan d’action Compétences remis au gouvernement en 2023. Ce programme de relance actionne sept leviers complémentaires et de nombreux dispositifs territoriaux, en cohérence avec le rapport Match2 du Gifen qui a identifié les métiers en tension.

En 2026, l’accent sera mis sur les TPE et PME/PMI avec un engagement fort dans nos actions en faveur de la mixité et de l’inclusion. On peut rappeler ici deux des grands rendez-vous que nous piloterons en 2026 : le Concours d’attractivité des métiers du nucléaire avec la Dinn, le Gifen et Nuclear Valley et la Semaine des métiers du nucléaire du 9 au 13 mars co-organisée avec France Travail pour aller à la rencontre du public et présenter les métiers qui recrutent. La prochaine édition sera centrée sur la mixité pour continuer à « casser les clichés » et valoriser tous les talents, en démontrant que tous les métiers du nucléaire sont ouverts aux femmes comme aux hommes, du bac pro au diplôme d’ingénieur et plus. En 2025, plus de 28 000 participants ont rejoint la Semaine des métiers du nucléaire.

Alors que les métiers évoluent vite, comment faire de la formation un levier pour recruter les bons profils ?

Une nouvelle dynamique pour l’emploi local montre que notre approche stimule les écosystèmes territoriaux avec lesquels nous avançons ensemble – Campus des métiers et des qualifications, Agences régionales de prestataires (ARP), établissements, entreprises et autres acteurs locaux. Les bourses d’études, par exemple, sont un dispositif national qui a attiré plus de 800 bénéficiaires sur l’Hexagone depuis 2022. Accompagnés par autant de parrains et marraines mobilisés au sein des entreprises, les résultats sont probants : 67 % des boursiers poursuivent leurs études dans un cursus intéressant le nucléaire, tandis que 20 % sont intégrés ou prêts à rejoindre professionnellement notre filière.

Élargir le sourcing et favoriser les reconversions professionnelles constituent des leviers clés pour construire l’avenir. En Normandie, on peut aussi souligner une belle synergie industrielle et territoriale avec le CNPE de Penly et le lycée Pablo-Neruda de Dieppe, qui ensemble ont conçu une licence professionnelle sur mesure pour les compétences du futur EPR 2. À cet égard, nous travaillons étroitement avec le projet normand Nouveau nucléaire, nouvelles compétences (3NC) qui vise à former 15 000 nouvelles personnes (niveaux infrabac à bac+5). Autre exemple à Marseille, où s’est ouvert un nouvel espace de formation de pointe dédié aux métiers de l’ingénierie nucléaire, Oppen, une initiative stratégique pour renforcer en un même lieu, la professionnalisation et les compétences des diverses entreprises du secteur.

Quels sont les axes de réflexion avec l’Éducation nationale ?

Dans le sillage de France 2030 et des projets AMI-CMA3, les services de l’État sollicitent systématiquement l’avis de l’UMN. Nous examinons les initiatives liées aux compétences nucléaires en évaluant leur cohérence, leur complémentarité et leur alignement avec le plan d’action Compétences.

Citons notamment la signature d’une Convention de partenariat avec le ministère de l’Éducation nationale qui a déclenché entre autres le dispositif Passeport nucléaire. Ce programme apporte une coloration nucléaire à des formations généralistes, allant de l’acquisition de connaissances de base sur le nucléaire au développement de compétences. Jusqu’à aujourd’hui, la démarche éducative a concerné près de 120 établissements et 3 000 élèves – étudiants, demandeurs d’emploi, publics en reconversion – en ont bénéficié. Plus récemment, le lancement de Passeport nucléaire plus (PN+) cible les formations diplômantes de niveau bac pro à bac+5 déjà spécialisées nucléaires. Dix diplômes de l’enseignement supérieur long sont déjà bénéficiaires de la marque et quinze formations labellisées I2EN (Institut international de l’énergie nucléaire) sont en cours d’attribution. En moyenne, plus de 80 % des diplômés trouvent un emploi dans la filière !

Anne Jancovici en quelques dates

Anne Jancovici débute sa carrière chez EDF en 2002 et occupe des postes de consultante, cheffe de cabinet et manager avant de rejoindre, en 2008, la DRH du parc nucléaire. En 2011, elle devient DRH de la centrale nucléaire de Cruas puis, en 2015, directrice de cabinet auprès du directeur exécutif groupe en charge des parcs nucléaire et thermique. En 2019, elle prend la direction du pôle approvisionnement en combustible nucléaire. En 2021, elle est nommée directrice de l’opérateur de formation technique EDF puis, en 2025, présidente de l’Université des métiers du nucléaire (UMN).


1. Les membres fondateurs de l’UMN sont le CSFN (Comité stratégique de la filière nucléaire), EDF, le CEA, Orano, Framatome, l’ANDRA (Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs), le Gifen (Groupement des industriels français de l’énergie nucléaire), Nuclear Valley, l’UIMM (Union des industries et métiers de la métallurgie), France Travail, France Industrie et l’UFE (Union française de l’électricité).
2. Match est l’outil de pilotage évolutif de l’adéquation besoins-ressources de la filière nucléaire civile (Gifen – avril 2023).
3. Appel à manifestation d’intérêt Compétences et métiers d’avenir (AMI-CMA).

Propos recueillis par Sylvie Delaplace, Sfen

Photo I Anne Jancovici

© Lucie Pellerin / Abacapress