Retour du nucléaire en Allemagne : un débat relancé à la veille des élections anticipées ?
Alors que des élections anticipées sont attendues au début de l’année 2025, la CDU/CSU, favorite des sondages, propose un retour du nucléaire. Dans un pays qui a fermé ses derniers réacteurs en 2023, la question divise encore.
À la COP29, qui se tient cette semaine à Bakou en Azerbaïdjan, le directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), Rafael Grossi, interrogé sur la politique énergétique en Allemagne, a estimé que revenir à l’énergie nucléaire serait “logique” et “rationnel”. Ces déclarations résonnent particulièrement fort à l’heure où la CDU/CSU, principal parti d’opposition, est, selon les sondages, la favorite des élections législatives anticipées qui se profilent.
L’éclatement de la coalition
Olaf Scholz va se soumettre le 16 décembre à un vote de confiance des députés du Bundestag. Une épreuve présentée comme perdue d’avance à cause de l’éclatement de la coalition entre les sociaux-démocrates, les écologistes et les libéraux[1]. Le président allemand, Frank-Walter Steinmeier, aura ensuite trois semaines pour dissoudre la Chambre basse. La CDU/CSU, qui avait pourtant initié la sortie du nucléaire après la catastrophe de Fukushima en 2011 sous l’égide d’Angela Merkel, se positionne aujourd’hui pour une réouverture[2] du dossier nucléaire.
Un retour du nucléaire ?
Bien que l’accident de Fukushima en mars 2011 ait alimenté des politiques énergétiques en défaveur de l’atome, l’Allemagne est le seul pays au monde à avoir procédé à la fermeture de tous ses réacteurs nucléaires. L’exploitation des trois derniers, fermés en avril 2023, avait été rallongée de quelques mois en pleine crise énergétique et les critiques se faisaient alors de plus en plus virulentes. Selon certains sondages, deux Allemands sur trois étaient contre l’arrêt des derniers réacteurs nucléaires à cette échéance. C’est dans ce nouveau contexte que les conservateurs de la CDU/CSU proposent, dans leur programme fondamental[3] intitulé “Vivre en liberté”, de réintégrer cette énergie désormais considérée comme indispensable dans le mix énergétique, en soutien aux énergies renouvelables.
Un système de coalition complexe
Néanmoins, le système politique allemand, fondé sur des coalitions, rendra les futures négociations de coalitions complexes. La question énergétique pourrait bien être un point de fracture dans les alliances à venir. Si la CDU/CSU partage certains points communs avec le SPD (socio-démocrate) — comme le développement des infrastructures d’hydrogène et la modernisation des réseaux énergétiques —, les deux partis restent profondément divisés sur le nucléaire.
Pourtant, selon une étude récente publiée dans l’International Journal of Sustainable Energy, si l’Allemagne avait maintenu ou renforcé son parc nucléaire, elle aurait pu décarboner son économie de manière plus efficace et économiser des centaines de milliards d’euros. Ces conclusions alimentent le débat, renforçant l’idée que l’abandon du nucléaire pourrait avoir été une erreur stratégique.■
[1] https://www.france24.com/fr/europe/20241107-%C3%A9clatement-de-la-coalition-scholz-en-allemagne-l-opposition-demande-un-vote-de-confiance
[2] https://www.nuklearforum.ch/fr/nouvelles/des-partis-allemands-reclament-un-retour-au-nucleaire/
[3] https://assets.ctfassets.net/nwwnl7ifahow/2EL5GCfZkrwIGaWfsW0zAB/64d5811f7ded113693095b1d7fb0ba67/240113_CDU_GSP_2024_Beschlussfassung_FINAL.pdf