A quelle logique répond le choix des scénarios RTE retenus pour la PPE ?

Début novembre 2017, le gestionnaire de transport d’électricité, RTE, a publié cinq scénarios de prospective électrique. Deux d’entre eux ont été retenus pour la prochaine programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE). Pourquoi ce choix ?
Le climat d’abord
La France a placé la lutte contre le changement climatique comme la première de ses priorités pour sa politique énergétique. Cet engagement se traduit par la volonté d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Un objectif ambitieux qui nécessite de fermer progressivement les installations « émettrices » (les centrales thermiques).
Plus précisément, le gouvernement a annoncé que la réduction de la part du nucléaire impliquait le respect de trois invariants, qui sont autant de principes directeurs dans le cadre de la PPE : pas d’augmentation des émissions de CO2, pas de construction de nouvelles centrales thermiques (hors centrale à gaz de Landivisiau) et fermeture des centrales à charbon d’ici la fin du quinquennat.
C’est donc à l’aune de la priorité climatique qu’il convient de comprendre la sélection des scénarios RTE.
Deux scénarios parviennent à contenir les émissions de CO2
Compte-tenu de ces priorités, trois des cinq scénarios présentés par RTE sont exclus : Watt, Ohm et Hertz.
- Watt implique la fermeture 55 GW de capacité nucléaire d’ici 2035 mais entraine l’ouverture de 21 GW de centrales à gaz.
- Ohm respecte les 50 % de nucléaire en 2025 mais maintient les centrales à charbon et ouvre 12 GW centrales à gaz.
- Hertz suit la même logique à l’horizon 2035 mais nécessite l’ouverture de 10 GW de centrales à gaz pour le passage de la pointe.
Ces trois scénarios prévoient une augmentation des émissions de gaz à effet de serre dans le secteur électrique.
Deux scénarios sont donc compatibles avec l’objectif climatique : « Volt » et « Ampère ». Ce sont ces derniers qui ont été retenus dans le cadre des discussions et débats de la PPE.
- Volt prévoit la fermeture de 9 réacteurs de 900 MW (hors Fessenheim) à l’horizon 2035.
- Ampère prévoit la fermeture de 16 réacteurs.
Le scénario Volt est celui qui permet de réduire les émissions de CO2 du secteur électrique à 9 Mt (vs 12 Mt pour Ampère). C’est d’ailleurs le scénario qui conserve la plus importante part de nucléaire.
Un choix favorable au climat qui ne fait pas consensus
A l’annonce du choix du gouvernement de retenir ces deux scénarios, plusieurs associations ont pointé le manque d’ambition concernant la réduction de la part du nucléaire. Ils regrettent notamment que les scénarios RTE soient trop conservateurs en matière d’efficacité énergétique. Pourtant, RTE estime que la consommation d’électricité n’augmentera pas à court et moyen termes…
En outre, les détracteurs estiment que la part des exportations d’électricité reste trop élevée. RTE les justifie par le maintien d’un mix nucléaire et renouvelables, avec des capacités renouvelables en hausse, dans un contexte de baisse de la consommation. Pour mémoire, la France exporte en moyenne 10 % de son électricité vers ses voisins. Aujourd’hui, le charbon fournit un quart de la production d’électricité en Europe (mais émet 70 % des émissions de CO2 de l’électricité), l’exportation d’une énergie bas carbone est plutôt une bonne nouvelle. La France se place ainsi comme le « poumon vert » de l’Europe avec 90 % d’électricité bas carbone, et contribue, à son échelle, à l’atteinte des objectifs climatiques de l’UE.
Crédit photo : EDF / BONY BRUNO