La Belgique lance la construction du réacteur Myrrha - Sfen

La Belgique lance la construction du réacteur Myrrha

Publié le 5 juillet 2024 - Mis à jour le 4 juillet 2024

Le 25 juin 2024, la ministre de l’énergie belge a donné le coup d’envoi de la construction du réacteur de recherche Myrrha. Le projet comprend trois phases, les deux premières seront dédiées à l’accélérateur de particules et la troisième sera la construction de la partie réacteur. L’installation devrait pleinement être opérationnelle à partir de 2038 pour étudier la réduction des déchets nucléaires par transmutation.

La construction de Myrrha a officiellement commencé sur le centre du SCK CEN, l’homologue belge du CEA. Situé à Mol, à la frontière avec les Pays-Bas, Myrrha sera un réacteur de recherche dit piloté par accélérateur (ADS). Ce sera même le premier du genre ! Ce concept se compose d’un accélérateur de particules et d’un réacteur sous-critique pensé avant tout pour la transmutation des déchets nucléaires – des actinides mineurs en particulier – et ainsi réduire leur radiotoxicité et leur volume.

Réduire la radiotoxicité des déchets

Myrrha est ainsi un type de réacteur bien particulier : l’accélérateur de particules fait office d’interrupteur pour faire fonctionner un réacteur « sous-critique » c’est-à-dire n’ayant pas assez de matière fissile pour une réaction nucléaire autoentretenue. En envoyant des protons sur les noyaux atomiques lourds du plomb-bismuth, l’accélérateur provoque la séparation des neutrons des atomes de plomb et de bismuth, qui provoquent à leur tour la fission du combustible. Les réacteurs pilotés par accélérateur sont conçus pour « utiliser des cœurs sans uranium [mais] fortement chargés en actinides mineurs dont les contre-réactions thermiques (effet Doppler) et la faible proportion de neutrons retardés seraient rédhibitoires avec des cœurs critiques », explique le CEA [1].

Hamid Aït Abderrahim, physicien des réacteurs et directeur du projet, explique: « Si vous prenez les déchets belges hautement radioactifs après 40 ans de fonctionnement des centrales nucléaires, vous obtiendrez la superficie d’un terrain de football, sur un demi-mètre de haut. Grâce à la technologie que nous étudions avec MYRRHA, nous pourrons réduire cette hauteur à seulement 5 millimètres ».

Les trois phases du projet

Avant d’étudier la transmutation, le projet va servir la recherche fondamentale, la médecine avec la production de radio-isotopes et la recherche sur les matériaux au service des futurs réacteurs. Dès la phase 1, nommée Minerva, le projet sera fonctionnel. Minerva sera un accélérateur de 100 MeV relié à deux stations de cibles. L’une dédiée à la production de radio-isotopes à des fins de recherche et d’applications médicales et l’autre consacrée à la recherche de matériaux pour les applications de fusion[2]. « Minerva sera notamment utilisée pour le développement d’une nouvelle génération de nouveaux radio-isotopes thérapeutiques, qui ciblent plus efficacement les cellules cancéreuses et réduisent ainsi considérablement les effets secondaires pour les patients », a fait savoir le Centre de recherche nucléaire belge SCK CEN. La deuxième phase viendra prolonger l’accélérateur pour monter à 600 MeV et la troisième phase donnera naissance au réacteur.■

Gaïc Le Gros (Sfen) 

Image : Modèle 3D de Minerva ©DR

[1] https://www.cea.fr/multimedia/Documents/publications/rapports/rapport-gestion-durable-matieres-nucleaires/Tome%202.pdf

[2] https://www.sckcen.be/fr/infrastructure/myrrha/myrrha-phase-1-minerva