Climat : les SMR pourraient changer la donne
A l’aune du défi climatique, les Etats-Unis s’intéressent de nouveau à l’énergie nucléaire et soutiennent l’innovation dans les projets de « Small Modular Reactors » (SMR). Selon Ernest Moniz, Secrétaire d’Etat à l’Energie de Barack Obama, présent au Bourget à l’occasion de la COP21, une cinquantaine d’entreprises américaines élabore des concepts de ces petits réacteurs modulaires. Pour le directeur du DoE, les SMR acquerront une maturité technologique et se déploieront à grande échelle dans une dizaine d’années.
A la différence des centrales nucléaires en exploitation dont la puissance égale ou dépasse 1 000 mégawatts (MW), les SMR ont une puissance comprise entre 50 et 300 MW. Autre singularité par rapport aux centrales « classiques », la majorité des composants utilisés dans ces réacteurs sont plus petits et plus compacts, et peuvent donc être fabriqués en usine pour ensuite être transportés vers le site d’installation pour y être assemblés.
Pour Ernest Moniz, les bénéfices des SMR sont nombreux. Ils disposent par exemple « d’excellentes caractéristiques de sécurité ». Les concepts en développement incluent des améliorations en matière de sûreté et de non-prolifération qui pourront bénéficier à l’ensemble de la communauté internationale. Par ailleurs, la plupart des SMR pourront résister à des agressions externes comme les événements naturels extrêmes ou les attaques terroristes, affirme le secrétaire d’Etat. Certains concepts prévoient même d’étendre la période d’exploitation de plus de dix ans sans qu’il ne soit nécessaire de recharger le combustible du réacteur, réduisant ainsi les risques associés à la manipulation des matières nucléaires.
En étant fabriqués à partir de modules et de petits composants, les SMR nécessitent un capital de départ moindre que pour une centrale de plus grande puissance. Le talon d’Achille du nucléaire – disent les détracteurs de cette industrie – serait que les projets nucléaires sont trop capitalistiques et leur temps d’amortissement trop long. Les petits réacteurs modulaires requièrent moins de temps et donc moins d’argent pour être construits, et permettent donc aux investisseurs de percevoir plus rapidement les fruits de leurs investissements. Vers un changement de modèle économique ? C’est ce qu’espère Ernest Moniz : « Si nous avons une voie viable à la construction de SMR, l’ensemble de la structure de financement peut changer et rendre le nucléaire beaucoup plus abordable ». Last but not least, couplés aux énergies renouvelables intermittentes, les SMR pourraient aider à équilibrer le réseau électrique et assurer la sécurité d’approvisionnement des pays qui les utilisent.
Récemment, le département de l’énergie américain a lancé le programme GAIN pour soutenir le développement des SMR. Actuellement, la recherche, le développement et la démonstration de nouvelles technologies nucléaires sont extrêmement exigeantes et les installations nécessaires pour tester des prototypes coûteuses. Dans ces conditions, difficile pour une jeune start-up de faire naître un projet. Le programme GAIN permettra de lever une partie de ces contraintes en mettant à la disposition des entreprises innovantes les outils, la logistique et l’expertise dont elles ont besoin pour valider leurs concepts. Ce programme permet d’accélérer le processus de maturation d’une technologie et d’élaborer un prototype avant qu’il ne soit commercialisé.
« Dans l’industrie nucléaire, les choses mettent du temps à changer » souligne Ernest Moniz lors de sa conférence de presse. « La maturité industrielle et commerciale des SMR n’arrivera pas avant le milieu des années 2020. Si nous pouvons démontrer que le premier réacteur modulaire est viable dans la première partie de la prochaine décennie, alors ce que nous espérons est que cela fera partie du processus de planification dans le milieu de la prochaine décennie pour nos services publics », conclut-il. M. Moniz rappelle également que « vers 2030, nous entrerons dans la prolongation d’exploitation au-delà de 60 ans pour les réacteurs américains. Et c’est un moment particulièrement important pour les énergéticiens qui pourront alors s’engager dans un nouveau cycle nucléaire. » Selon lui, les SMR pourraient « changer la donne ».
Les Etats-Unis ne sont pas les seuls à développer les SMR. En novembre 2015, le ministre du Trésor britannique a annoncé qu’il consacrerait 250 millions de Livres pour financer la recherche dans les SMR.