Prix de l'électricité : retrouvez l’audition de Valérie Faudon, Déléguée générale de la Sfen - Sfen

Prix de l’électricité : retrouvez l’audition de Valérie Faudon, Déléguée générale de la Sfen

Publié le 11 mars 2024
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La Commission d’enquête sénatoriale portant sur « la production, la consommation et le prix de l’électricité aux horizons 2035 et 2050 » s’est plongée dans la complexité des « Coûts de production » lors de son audition du 5 mars 2024. Retrouvez la présentation de Valérie Faudon, déléguée générale de la Société française d’énergie nucléaire (Sfen).

Synthèse de la présentation de Valérie Faudon : 

Plusieurs chiffres importants sont à retenir sur la contribution du nucléaire à la souveraineté et à la compétitivité du système électrique français :

  • Souveraineté : crise des marchés de l’énergie à partir de fin 2021
    • Le nucléaire est très peu sensible au coût de l’uranium. Cela représente environ 5 % du coût de production, contre 40 % pour le charbon et plus de 70 % pour le gaz :
    • Entre 500 millions et 1milliard d’euros par an d’importations d’uranium en moyenne. En 2022, les imports de gaz et de pétrole ont représenté plus de 110 milliards d’euros.
  • Compétitivité :
    • Trois composantes : la fourniture (marché), le réseau et les taxes.
    • Depuis le 1er février : retour des accises sur l’électricité 21€/MWh plus haut que le gaz (16€/MWh)

Sur la capacité des autorités publiques à calculer ou challenger les coûts de production des différentes technologies :

  • Par le Parlement : Commission d’Enquête sur les coûts passés, présents et futurs d la filière nucléaire à l’Assemblée nationale en 2014.
  • Par la Cour des comptes : 2011 et 2014 sur le coût du nucléaire, et aussi en 2021 sur les coûts du système électrique
  • Par la CRE : une première étude en 2020 puis une récente sur coût du nucléaire existant en septembre 2023
  • Pour le programme de 6 EPR : audit en octobre 2021. Dernière information publique, qui fait l’objet d’une remise à jour.

Quelle méthodologie ?

Le calcul économique sert à informer et objectiver les décisions relevant de politiques publiques. Cela implique des débats sur quelle méthode de calculs utiliser pour une même question et sur quelles données sont utilisées. Par exemple, les études de RTE (Futurs énergétiques 2050 et Ademe n’utilise par le même coût moyen pondéré du capital.

Évolution dans le temps des questions posées de nature différente : est-ce que les coûts de démantèlement et de gestion des déchets sont bien inclus ? Faut-il arrêter les centrales ou continuer à les exploiter ? Faut-il ou non renouveler le parc nucléaire ? Quelle régulation mettre en place pour la rémunération d’EDF ?

Et bien sûr une évolution dans le temps des données : aujourd’hui quand on parle du parc nucléaire, on intègre l’EPR de Flamanville.

Quelles sont les grandes approches ?

  • Différentes dimensions :
    • l’acteur concerné : EDF, le gestionnaire du réseau, le régulateur, la collectivité ;
    • l’horizon de temps : coûts passés, une année donnée, les coûts futurs ;
    • le périmètre considéré (borne de la centrale ou système électrique) .
  • Différentes méthodes :
    • Coût cash (décaissements annuels). Cette méthode est pertinente sur la question de continuer à exploiter les centrales ou les fermer (35-49€/MWh).
    • Il faut distinguer une approche comptable des coûts, plutôt tournée vers le passé (données comptables), et une approche économique des coûts, plutôt tournée vers le futur. Sachant que la Cour des Comptes comme la CRE utilisent des méthodes hybrides.
    • Coût moyen actualisé (LCOE). D’une manière générale, le LCOE est une méthode traditionnelle utilisée pour des décisions d’investissement. Elle intègre toutes les dépenses, de manière actualisée, sur toute la durée du projet, y compris les dépenses d’exploitation, de démantèlement, et de gestion des déchets.

 

Ce qui est important à comprendre sur le nucléaire existant :

  • Dans le parc nucléaire existant, on compte désormais l’EPR de Flamanville qui n’est pas encore amorti.
  • La méthode de calcul de la CRE ne prend pas en compte les dépenses de renouvellement du parc nucléaire.
  • Sensibilité à la production réelle du nucléaire : objectif de 400TWh mais prudence à 360TWh.
  • Étude CRE : sur une base de rémunération fixe (contrat pour différence bi directionnel), or dans le schéma choisi EDF porte le risque marché (pas de protection contre des prix bas). Cela implique un coût moyen pondéré du capital (CMPC).

Ce qui est important à comprendre sur le nucléaire du futur :

Un projet nucléaire n’est pas un projet comme un autre. Sa taille est importante avec des montants nominaux engagés), les temps sont longs (15 ans de cash-flow négatifs) et les risques de construction sont élevés.

Plus le chantier est long, plus les coûts financiers sont importants (intérêts intercalaires).

Trois solutions pour maintenir le taux du capital :

      • Continuité politique (temps long) ;
      • Régulation : revenu garanti CFD ;
      • Intervention de l’État : partage des risques, garantie de la dette, ou investissement direct

Importance des Coûts système :

Le sujet est d’actualité et des études y font référence :

  • Selon l’Agence de l’énergie nucléaire de l’OCDE et l’Agence internationale de l’énergie (AIE), les coûts système permettent d’affecter aux technologies des coûts d’intégration. Dans ce cadre, le nucléaire a des coûts très faibles. Pour les renouvelables, les coûts d’intégration augmentent à mesure que la part des sources variables évolue. Les coûts systèmes mettent en avant les technologies les moins impactantes et les moins coûteuses.
  • RTE établit un consensus sur le fait que plus on a de renouvelables variables, plus les coûts systèmes (coûts de flexibilité, transport et distribution) augmentent. À l’inverse, plus une infrastructure compte de nucléaire, plus ils diminuent (voir scénario N03 de Futurs énergétiques 2050 de RTE).

Il existe d’autres coûts pour prendre en compte les externalités positives ou négatives sur l’environnement : émissions de CO2 et droits à émettre, emprise au sol (densité énergétique), usage des ressources… ■

Par la Sfen

Image : Assemblée nationale