Nombreuses réactions émues après le décès de Marcel Boiteux, l’un des pères du programme nucléaire français

« Serviteur de l’État », « Bâtisseur visionnaire », « économiste hors pair », « père de la souveraineté énergétique nationale » … Les hommages affluent depuis qu’EDF a annoncé le décès de son ancien Président directeur général Marcel Boiteux, qui a travaillé pendant 38 ans dans l’entreprise dont 20 ans en tant que Directeur général puis PDG (1967-1987).

Né en 1922 et décédé ce 7 septembre 2023, Marcel Boiteux a connu une longue carrière au service de l’État. Durant la Seconde Guerre mondiale, il sert au sein de l’Armée française en Afrique du Nord.
Après l’École normale supérieure et l’agrégation de mathématique en 1946, il rejoint le CNRS. Il travaillera sur le coût marginal et la tarification de l’électricité. Mission qu’il continuera ensuite des années chez l’électricien à la direction des ressources économiques. Il devient Directeur général en 1967 puis Président en 1979, il lancera le grand programme électronucléaire français pour répondre aux deux chocs pétroliers. Un engagement qui lui vaudra d’être la cible d’un attentat à son domicile en 1977, dont lui et famille se sortiront sans séquelles.

Un héritage vivant

Déjà lors de son centenaire en 2022, les célébrations avaient afflué. Depuis l’annonce de sa disparition, de nombreuses personnalités et associations soulignent leur émotion. À commencer la ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher qui rend « Hommage à celui qui fut un artisan essentiel de notre indépendance électrique et de notre parc électronucléaire ».

Marcel Boiteux, président d’EDF de 1967 à 1987, nous a quittés.

Hommage à celui qui fut un artisan essentiel de notre indépendance électrique et de notre parc électronucléaire.

Pensées émues pour ses proches. pic.twitter.com/Igk4kQOw5P

— Agnès Pannier-Runacher 🇫🇷🇪🇺 (@AgnesRunacher) September 8, 2023

Antoine Armand, le député Renaissance et rapporteur de la Commission sur la souveraineté énergétique de la France rappelle que Marcel Boiteux nous a « légué une industrie nucléaire unique au monde ». Il ajoute que cet industriel « nous rappellera aussi sans cesse ce que nous, Français, pouvons avoir l’espoir de réussir ».

L’ancienne présidente du Medef, Laurence Parisot s’enthousiasme : « Quelle vie, mais surtout quelle contribution exceptionnelle à la prospérité et au génie industriel de notre pays ! ». Tout comme Emmanuelle Wargon, présidente de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) qui écrit sur Twitter : « Hommage à Marcel Boiteux qui nous a quittés ce jour, membre des Forces françaises libres, président emblématique d’EDF et bâtisseur de notre système énergétique ».

Dans un communiqué, l’Association des économistes de l’énergie (AEE) exprime sa tristesse. « Outre ses importantes responsabilités professionnelles, Marcel Boiteux a été et reste pour la communauté des économistes de l’énergie une référence incontestée en France et dans le monde entier », peut-on lire. L’Association rappelle d’ailleurs qu’en son honneur a été créé en 2011 le Prix Marcel Boiteux du meilleur ouvrage d’économie de l’énergie.

De son côté la Fédération nationale des Mines et de l’Énergie (FMNE-CGT) écrit : « Marcel Boiteux est décédé. Ancien président d’EDF de 1979-1987, il fut un ardent défenseur du service public de l’énergie. Partisan de l’industrie nucléaire, il instaura la péréquation tarifaire ».

Mémoire d’EDF

L’actuel PDG d’EDF, Luc Rémont écrit sur LinkedIn : « Plusieurs générations d’électriciens se retrouvent orphelines d’un dirigeant visionnaire qui a œuvré pour le bien-être d’un pays tout entier ». Plus loin il écrit : « Aujourd’hui nous héritons de décisions et d’actions remarquables. Sa mémoire doit nous guider collectivement et l’ensemble des salariés d’EDF seront toujours très fiers de s’inscrire dans ses pas ».

Cédric Lewandowski, directeur du parc nucléaire et thermique chez EDF, écrit dans un long post sur LinkedIn : « La dette du parc nucléaire et thermique d’EDF envers lui est immense. Marcel Boiteux fait partie de ces hommes rares qui ont su allier science et conscience, vision et action, réflexion et construction ». Il ajoute : « La contribution de Marcel Boiteux à la pensée économique a été exceptionnelle. La tarification au coût marginal de long terme dont il est le père, demeure une référence dans le monde entier pour qui souhaite marier efficacité et stabilité dans la durée des prix de l’électricité ».

Hommage de la Sfen

La Sfen s’associe à ces très nombreux hommages et à la qualité de l’homme qui a su bâtir notre parc nucléaire tout en ayant une vision lucide sur l’émergence d’autres technologies, sur l’impact environnemental de l’énergie. Son travail fondateur sur les prix de l’électricité est également essentiel.

En 1975, il nous avait fait l’honneur d’écrire un article dans la revue générale nucléaire (RGN) pour présenter la nécessité de bâtir un grand parc nucléaire. Visionnaire, il écrivait déjà : « L’énergie n’est pas la seule chose qui soit rare en ce monde. Il faut économiser aussi le cuivre, le béton, l’acier et le travail des hommes, arbitrer entre ces diverses raretés pondérées par leur prix, donc se préoccuper des coûts ».

Plus loin, il ajoute : « l’Idéal serait que ce débat — dont l’atome n’est finalement que le prétexte — engendre une société réellement ouverte aux problèmes écologiques, consciente de la vanité des consommations purement ostentatoires, et apte à maîtriser la croissance authentiquement consacrée à l’amélioration des conditions de vie dont l’énergie nucléaire nous offre le moyen ». ■