Le nucléaire intègre (enfin) le label français Greenfin sur l’investissement durable - Sfen

Le nucléaire intègre (enfin) le label français Greenfin sur l’investissement durable

Publié le 29 janvier 2024

Dans une note du ministère de la Transition écologique parue au journal officiel le 9 janvier, le label de finance verte Greenfin réintroduit le nucléaire dans son référentiel des activités éligibles. Ce label sert aux épargnants de certification pour les fonds contribuant à la transition écologique.

Le label « Greenfin » (anciennement label “transition énergétique et écologique pour le climat”) a été créé par le ministère de la Transition écologique fin 2015 au moment de la COP 21 pour permettre aux acteurs d’identifier les fonds contribuant au financement de la transition et de flécher les flux financiers à cette fin. Il s’agit du premier label d’État (français) dédié à la « finance verte », et reconnu comme l’un des plus exigeants.

Jusqu’alors, les règles d’éligibilité à ce label prévoyaient une exclusion des activités liées au nucléaire. Plus exactement, étaient exclues du périmètre d’investissement des fonds labellisés les sociétés dont plus de 5 % de l’activité relève du nucléaire. L’atome était ainsi écarté au même titre que les activités fossiles. Les critères d’exclusion ont été réévalués en cohérence avec ceux fixés dans la taxonomie européenne pour laquelle le nucléaire a obtenu gain de cause au prix de très longues discussions et sur laquelle le référentiel de finance verte français a vocation à s’aligner.

« L’ensemble des activités économiques permettant la production d’énergie à partir de technologies nucléaires, y compris les technologies du cycle des combustibles et de gestion des déchets radioactifs » est désormais inclus au nouveau référentiel, publié au journal officiel. Ce changement radical dans la doctrine témoigne d’une nouvelle reconnaissance institutionnelle du rôle du nucléaire dans la transition. Dans le secteur, « nous n’observons pas de réactions des sociétés de gestion dans la presse pour l’instant. Probablement que la décision était anticipée de longue date, après le revirement de la taxonomie européenne », nous informe une source proche du dossier.

Quels changements pour l’investissement dans le nucléaire ?

Les évolutions de stratégie d’investissement à long terme des 103 fonds éligibles (pesant pour 35 milliards d’euros) lié à ce changement de référentiel prendront du temps. En outre, il est possible que l’investissement « nucléaire » fasse l’objet d’un traitement dédié dans le reporting des activités puisque les « épargnant restent frileux pour les fonds implantés hors France, Grande-Bretagne et États-Unis ».

Le portefeuille des fonds non cotés ne changera pas significativement : « les acteurs présents sur les marchés d’infrastructure énergétique investissent essentiellement dans les EnR et le biogaz. Il y aurait ainsi peu de chance que ces structures investissent dans des projets nucléaires », par exemple les EPR2.

Pour les fonds cotés, « l’effet sera plus notable », dans la mesure où l’évolution en bourse de ces fonds suivent en gros les actifs qu’ils gèrent : actions d’entreprises ou titres de dettes. On peut ici faire l’hypothèse d’une levée de verrou sur les obligations vertes d’EDF par exemple, ou encore sur les titres d’entreprises ou obligataires d’exploitants canadiens, américains ou coréens dont plus de 5 % du chiffre d’affaires provient du nucléaire. L’important est que la voie réglementaire est dégagée, reste à voir si le marché y verra un appel d’air. ■

Par Ilyas Hanine (Sfen)

Image : @Shutterstock