Deep Fission : un SMR enterré à 1,6 km et déjà 12,5 GW en portefeuille
Certains creusent pour trouver du pétrole, Deep Fission prospecte pour de l’électricité. Avec un portefeuille de projets de 12,5 GW, la sélection de trois sites de développement et le statut de lauréat du programme de réacteurs pilotes du DOE, la start-up nucléaire enchaîne les annonces. En ligne de mire : un SMR opérationnel dès l’automne 2029.
Si avec son « drill, baby, drill », Donald Trump s’adressait aux énergies fossiles, la start-up nucléaire Deep Fission n’en a pas perdu une miette. L’entreprise américaine qui compte construire des réacteurs à 1,6 kilomètre sous terre a annoncé avoir signé le 15 octobre des lettres d’intention avec des clients potentiels pour une capacité totale de 12,5 GW. Si aucun nom de partenaires n’a été dévoilé par Deep Fission, « des centres de données, des co-développeurs, des parcs industriels et des partenaires stratégiques » sont cités dans leur communiqué. Mais le teasing de son portefeuille de projets n’est que la dernière annonce de cette jeune pépite qui se rêve déjà comme l’un des fers de lance de la relance du nucléaire américain.
Un mois avant de narguer ses concurrents avec son volume impressionnant de projets potentiels, Deep Fission a finalisé une levée de fonds de 30 millions de dollars. Ce tour de table a pour objectif de faire entrer la start-up en bourse. Mais aussi de lui permettre de débuter « la construction de notre réacteur pilote, avec pour objectif son achèvement en 2026 ». Un objectif ambitieux qui répond à une autre réussite de l’entreprise : sa sélection dans le programme d’accélération de développement de réacteurs avancés du Département de l’Energie américain (DOE).
Trois sites déjà sélectionnés
Ce dernier a pour but en effet d’atteindre « la criticité d’ici le 4 juillet 2026 » avec au moins trois de ses onze lauréats. Si le programme ne fournira pas d’aide financière, le soutien du DOE permet d’accélérer les procédures administratives, en limitant les interventions de la Commission de régulation du nucléaire (NRC). Le programme est « spécifiquement conçu pour favoriser la recherche et le développement de réacteurs nucléaires, et non pour démontrer la viabilité commerciale des projets », assure le Département.
Dans ce cadre, la sélection de trois sites américains pour développer des unités nucléaires par Deep Fission prend une autre dimension. « Ces projets reflètent la demande urgente d’une énergie de base fiable et décarbonée, et nous sommes ravis de contribuer à la solution pour y répondre », précise le groupe. Ces premiers projets d’implantation sont situés au Texas, dans l’Utah et au Kansas. La start-up assure que des lettres d’intention ont été signées avec des partenaires pour chaque site, mais ces derniers restent une nouvelle fois anonymes. Actuellement, seules deux entreprises partenaires de Deep Fission sont connues : Deep Isolation qui commercialise une solution de stockage de déchets nucléaires et Endeavour, un développeur d’infrastructures, notamment de datacenters.
Un pilote commercial en 2029
Depuis sa présentation publique en août 2024, Deep fission assume une double ambition. Côté calendrier, l’entreprise souhaite soumettre une demande de licence auprès du régulateur américain dès 2026. L’approbation et le commencement des travaux de construction est attendu deux ans plus tard. L’objectif : vendre ses premiers électrons à l’automne 2029. D’autre part, l’entreprise promet un coût moyen actualisé de l’énergie compris entre 5 et 7 centimes de dollars par kilowattheure (soit entre 42,9 et 60 €/MWh). Ce double objectif de construction rapide et de compétitivité s’explique par le design de l’entreprise.
La technologie reprend les standards des réacteurs à eau pressurisée (REP) pour une capacité de 15 MWe, avec les mêmes méthodes de contrôle, et les mêmes combustibles. La différence majeure repose sur le système de pressurisation et de sûreté. En effet, pour ces deux aspects, Deep Fission souhaite enterrer son réacteur à environ 1,6 km de profondeur. « La dépense principale d’un REP standard est l’énorme cuve sous pression du réacteur en acier de 20 à 30 cm d’épaisseur, le grand pressuriseur et l’immense enceinte de confinement aux murs de béton de 0,9 à 1,8 m d’épaisseur », explique la start-up.
Ce design s’appuyant sur une chaîne d’approvisionnement déjà robuste permettra de « réduire de 70 à 80 % les coûts globaux par rapport à une centrale nucléaire traditionnelle », estime Deep Fission. Côté sécurité, le réacteur sera « hors de portée des tornades, des inondations, des ouragans, des tsunamis, des accidents d’avion et des terroristes ». De quoi encore limiter les mesures de sûreté et donc les coûts des unités. ■