La Corée du Sud, un pays nucléaire en contradiction - Sfen

La Corée du Sud, un pays nucléaire en contradiction

Publié le 26 mars 2019 - Mis à jour le 28 septembre 2021
wolsong

La Corée du Sud est un grand pays nucléaire. Son parc électrique le classe à la sixième place mondiale en termes de production. Ce pays se distingue aussi dans l’ingénierie nucléaire avec des grandes entreprises comme Kepco, très active à l’export. La nouvelle politique de mix électrique voulue par le président, Moon Jae-in, rebat les cartes.

La Corée du Sud est une nation énergivore. Elle a produit 553 TWh en 2017, soit une production nette légèrement supérieure à la France pour une population environ 25 % moins nombreuse. Cet appétit provient du dynamisme industriel du pays (54 % de sa production électrique en 2017) et de sa politique d’export très volontariste (construction navale, automobile…). 

En matière d’énergie, ce pays, qui est dépourvu de ressources minières, mise sur le charbon (40 %), le nucléaire (30,3 %), le gaz naturel (16 %) et les énergies renouvelables (5 % dont l’hydroélectrique). Ce mix devrait changer à l’horizon 2031 selon le « 8e plan à long terme » qui prévoit la réduction de la part du nucléaire et du charbon au profit des énergies renouvelables et du gaz. Le but annoncé est de réduire les émissions domestiques et de particules fines, devenues un problème de santé publique dans les villes, tout en soutenant la croissance.

Baisse de régime

En 2019, la Corée du Sud opère 24 réacteurs nucléaires (majoritairement des REP). Le dernier a été mis en service en 2016. Leurs capacités devraient augmenter d’ici 2022 avec l’arrivée de quatre nouveaux réacteurs (types REP) qui apporteront 6,7 GW supplémentaires. Toutefois la décision de ne pas renouveler les licences des réacteurs les plus anciens provoquera une baisse de 7,9 GW. L’objectif est de réduire la part du nucléaire de 30 % à 24 % pour un arrêt total en 2060.

Des orientations énergétiques qui laissent songeur

Il ne s’agit pas d’une sortie précipitée sur le modèle allemand. Mais l’accident de Fukushima et une série de scandales dus à de faux certificats de sécurité des centrales ont influencé l’opinion. Ces orientations laissent songeur. 

La volonté de porter à 20 % la part des énergies renouvelables (éolien, solaire) dans le mix en baissant le nucléaire et le charbon semble difficilement atteignable sans se rabattre sur le secteur gazier. Nonobstant le fait que ce dernier reste très émetteur de CO2, l’État prévoit de le renforcer. Or, la Corée du Sud, déjà troisième importateur de gaz naturel liquéfié, dépend de sa flotte de tankers pour garantir ses flux, dont la consolidation sera difficile sans un raccordement, aujourd’hui inexistant, à un réseau de gazoducs. Le raccord au réseau russe, via la Chine et la Corée du Nord, est encore au stade de rumeur et potentiel objet de frictions diplomatiques.

Le principal enjeu industriel mais aussi climatique serait alors de devoir reporter la fermeture des centrales à charbon. Parallèlement, la Corée du Sud affiche sa volonté de réduire, d’ici 2030, de 26 % ses émissions de gaz à effet de serre et de 62 % ses émissions de particules fines. Des objectifs qui semblent impossibles à concilier en l’état.


Par la rédaction