Belgique : le nucléaire joue la prolongation

Le gouvernement belge a décidé ce vendredi 18 mars de repousser de dix ans sa sortie du nucléaire. La guerre en Ukraine et la crise des prix du gaz a poussé le gouvernement à revoir ses positions, y compris chez le parti écologiste belge.
La guerre en Ukraine, les incertitudes concernant la sécurité d’approvisionnement ont poussé le gouvernement belge à retarder la sortie du nucléaire à horizon 2035. Ainsi les réacteurs de Doel 4 et Tihange 3 vont être prolongés de dix ans. « Nous choisissons la certitude dans des temps incertains », justifie le Premier ministre belge, Alexander de Croo.
Pour rappel, la sortie du nucléaire est inscrite dans la loi en Belgique depuis 2003 et la dernière échéance retenue est l’année 2025 pour arrêter l’ensemble des réacteurs du pays. Dans le cadre d’un accord de coalition en octobre 2020, le gouvernement actuel s’était engagé à respecter cette fermeture sous la pression des partis verts (Écolo et Groen). C’est donc un revirement pour le parti écologiste belge qui rejoint la position du Mouvement réformateur (MR) le parti libéral francophone membre de la coalition gouvernementale.
Georges-Louis Bouchez, président du MR, s’en félicite : « le maintien du nucléaire sans discontinuer était une condition du MR et a été obtenu ! Il n’y aura pas d’arrêt de production nucléaire ». Cela reste insuffisant pour Marie-Christine Marghem, ancienne ministre de l’Environnement et membre du MR. Elle déclare : « je suis le rapport de la CREG (Commission de Régulation de l’Électricité et du Gaz, ndr), et effectivement, je demande la prolongation de quatre centrales nucléaires dans cette proposition de loi ».
Exigences de l’exploitant
Les deux réacteurs prolongés sont exploités par Engie. L’industriel, dans un communiqué de presse, déclare que le profil de risque « dépasse, par son caractère imprévisible et par son ampleur, l’activité normale d’un opérateur privé » et demande ainsi un « partage des risques et des opportunités ». Le gouvernement belge a donné mandat au Premier ministre et à la ministre de l’Énergie pour négocier avec Engie qui estime que cet allongement coutera près d’un milliard d’euros.
Outre la prolongation des deux réacteurs, l’accord du gouvernement belge annonce une enveloppe de 1,16 milliard d’euros consacrés au développement d’énergies renouvelables. Ainsi les objectifs du gouvernement belge pour 2030 sont les suivants : 1 GW d’énergie renouvelable supplémentaire chaque année, 30 % de l’électricité produite sera renouvelable, 15 % d’énergie fossile en moins.
Un vote à surveiller fin mars
Au-delà d’acter la fermeture des capacités de production à horizon 2025, la loi belge de 2003 sur la sortie du nucléaire, interdit, dans son article 3, la construction de toute future centrale nucléaire destinée à la production industrielle d’électricité. Cependant, l’accord du 23 décembre 2021 de la coalition gouvernementale prévoit une enveloppe de 100 millions d’euros sur quatre ans dans la recherche sur les « nouvelles technologies nucléaires émergentes ».
Il s’agit des Small Modular Reactor (SMR), qu’en l’état la Belgique n’a pas le droit de construire. La modification à venir de la loi de 2003 pour respecter la décision de prolonger des réacteurs pourrait aussi être l’occasion d’autoriser la construction de petits réacteurs modulaire dans le pays. « La modification de la loi de 2003 avant la fin du mois permettra le nucléaire du futur. La raison l’a emporté sur le dogme », se réjouit Georges-Louis Bouchez. ■