4. Le Royaume-Uni mise sur l’EPR

Le Royaume-Uni souhaite renouveler et même agrandir son parc nucléaire. Une volonté qui, jusqu’à récemment, se traduisait par la construction de deux EPR à Hinkley Point C. Désormais, cela s’entend également par le projet d’en construire deux autres, identiques, à Sizewell C. Un chantier qui a reçu le feu vert du gouvernement le 20 juillet 2022.
Le Royaume-Uni mise sur le nucléaire et cela se voit ! « Nous allons faire en sorte que le Royaume-Uni soit l’un des meilleurs endroits au monde pour investir dans le nucléaire », peut-on lire dans la « Stratégie britannique de sécurité d’approvisionnement en énergie » (British energy security strategy) publiée en avril 2022. Le gouvernement vise 24 GW de capacité nucléaire en 2050, soit trois fois plus qu’aujourd’hui. Cela passe par un renouvellement complet du parc de réacteurs dont les particularités technologiques limitent la durée d’exploitation.
Le nucléaire au Royaume-Uni
En 2019, le nucléaire a produit 17 % (56 TWh) de l’électricité britannique. Un mix électrique qui compte également 40 % (131 TWh) de gaz et 23 % (76 TWh) de solaire et d’éolien1. En 2022, le parc nucléaire se compose de dix réacteurs dont seulement un à eau pressurisée (Leiston). Les neuf autres sont des réacteurs AGR refroidis au dioxyde de carbone avec un modérateur graphite. Les spécificités techniques des AGR limitant leur durée d’exploitation, tous seront arrêtés d’ici à 2028. « La France dispose actuellement d’une capacité nucléaire neuf fois supérieure à celle du Royaume-Uni. Pendant des décennies, les gouvernements successifs n’ont pas fait les investissements nécessaires […] », constate le gouvernement britannique2. Aujourd’hui, huit sites nucléaires ont été identifiés pour renouveler le parc : Hinkley, Sizewell, Heysham, Hartlepool, Bradwell, Wylfa, Oldbury et Moorside. Tous pourraient accueillir des réacteurs de forte puissance comme l’EPR ou des réacteurs de petites puissances comme le SMR développé par Rolls-Royce. Dans le passé, les Britanniques se sont également intéressés à des projets japonais pour le site de Wylfa et chinois pour celui de Bradwell, mais ces derniers ne sont plus d’actualité.
Hinkley Point C, le modèle à imiter
Pour atteindre ses objectifs, le gouvernement mise notamment sur l’EPR de 1 650 MWe dont deux unités sont en construction à Hinkley Point C. Le chantier a commencé en 2016 dans le Somerset, au sud-ouest de l’Angleterre. Le premier béton de la première unité a été coulé en décembre 2018 et celui de la seconde en décembre 2019. Ce sont respectivement les cinquième et sixième EPR construits dans le monde. Ils bénéficient donc d’un retour d’expérience important malgré les légères différences de design entre la France, la Finlande, la Chine et le Royaume-Uni. Un gain d’efficacité est néanmoins aujourd’hui observé entre les deux unités : « On coule deux fois plus de béton qu’il y a un an, et malgré ça on a moins de stock d’aléas en management de projet à gérer », avait notamment souligné Alain Tranzer, délégué général à la qualité industrielle et aux compétences nucléaires d’EDF en novembre 2021. Le début des opérations commerciales de la centrale est prévu pour juin 2027.
Sizewell C : capitaliser sur les acquis d’Hinkley Point C
Le projet de Sizewell C nous emmène dans le Suffolk, à l’est de l’Angleterre. Il consiste en une totale réplication d’Hinkley Point C, et ce afin de bénéficier au maximum d’un effet de série. « Les personnes que nous voulons avoir à Sizewell C, ce sont celles qui ont les compétences, le savoir et l’expérience du chantier d’Hinkley Point C afin de faire de la réplication un succès », a déclaré Tilly Spencer, directrice d’Edvance UK3, lors de la Convention Sfen de juin 2022. Il s’agit donc là aussi de construire deux EPR pour une centrale d’une puissance de 3,2 GW. La réplication n’est pas une chose évidente et le projet a dû convaincre comme l’explique Bertrand Michoud, Sizewell C Engineering and Delivery Director. « L’une des grandes parties de notre activité a consisté à sécuriser la réplication ». En effet, ce processus implique d’embarquer sur le long terme les mêmes fournisseurs, mais aussi une stabilité des standards de sûreté. « Nous avons démontré que nous pouvons le faire et la réaction de la supply chain a été très positive », complète Bertrand Michoud. Concernant les autorités de contrôle, il souligne notamment qu’« il a été important pour nous d’assurer un environnement réglementaire stable et sur ce point l’autorité de sûreté nucléaire (ONR) et l’Agence environnementale ont été très réceptives à la notion de réplication, reconnue comme un facteur de sûreté sur le long terme ».
Le projet a reçu l’aval du secrétaire d’État aux Affaires, à l’Énergie et à la Stratégie industrielle, Kwasi Kwarteng le 20 juillet 20224. Le premier béton de l’unité 1 est aujourd’hui planifié en 2028 pour une entrée en service commerciale en 2034 et l’année suivante pour la seconde unité. Reste maintenant, en particulier, à prendre la décision finale d’investissement.
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