Vague de chaleur en France, point de situation des centrales

Une nouvelle vague de chaleur, la deuxième de l’année, conduit naturellement à se poser la question sur le fonctionnement des centrales nucléaires, et de comprendre la raison pour laquelle il peut être décidé d’arrêter certains réacteurs.
Cela est le cas pour les deux réacteurs nucléaires de 1 300 MW de la centrale de Golfech dans le Tarn-et-Garonne en raison des prévisions d’une vague de chaleur confirmée pendant ces prochains jours. Cet arrêt avait été envisagé il y a quelques jours, en raison d’une potentielle hausse de température de la Garonne, n’autorisant plus la centrale à prélever de l’eau dans le fleuve si celui-ci atteignait une certaine température, en l’occurrence, au niveau local, de 28°.
En fonction des prévisions météorologiques dans les jours et semaines à venir, il n’est pas exclu que d’autres réacteurs soient arrêtés ou réduisent leur fonctionnement, en raison du réchauffement de cours d’eau.
Revenir sur des Idées reçues
Il faut savoir que contrairement aux idées reçues, si une centrale a besoin d’eau pour fonctionner, la température de l’eau peut être bien plus chaude. Cela n’a pas de conséquence sur le plan de la sûreté d’une centrale. Si un arrêté est publié pour l’arrêt de telle ou telle centrale, c’est pour éviter un impact sur la flore et la faune aquatiques locales.
Concernant la centrale de Golfech, elle fonctionne en circuit fermé ; elle est refroidie à l’air via des tours réfrigérantes et a un rejet très faible, de l’ordre de quelques dizièmes de degrés ; mais suffisamment importants pour renforcer l’impact de l’eau, déjà touchée par la vague de chaleur sévissant dans la région.
A noter que les centrales nucléaires sont localisées et dimensionnées pour répondre à leurs besoins de refroidissement et faire face aux agressions externes, y compris naturelles comme les épisodes caniculaires. Ainsi, en plein désert, la centrale nucléaire de près de 4 000 MW à Palo Verde aux Etats-Unis, est éloignée de tout cours d’eau et produit pourtant en utilisant pour son refroidissement les eaux usées traitées de la métropole voisine de Phoenix. Les centrales chinoises et émiraties utilisent des eaux de mer pour leur refroidissement à une température plus élevée que celles rencontrées en Europe, et ce, toute l’année.
Autre idée reçue sur l’eau prélevée par une centrale nucléaire, 99 % de cette eau est restituée, soit en totalité pour celle qui est en circuit ouvert, soit pour 1/3, sous forme de vapeur d’eau, par les tours réfrigérantes et pour 2/3 sous forme liquide dans la rivière, la mer.
Les vagues de chaleur, un impact de 0,3 % de la production d’électricité nucléaire en France
Sur les dix dernières années, alors que la France a connu plusieurs épisodes caniculaires, en 2003, 2006 et 2018, l’impact sur la production électrique des centrales n’a été que de 0,3 % par an.
De plus, il faut savoir que ces vagues de chaleur se produisent l’été alors que la demande en électricité est plus faible. Les énergies renouvelables, variables, comme le solaire, peuvent alors tenir leur rôle, comme c’est le cas cette semaine en France. La France est même exportatrice en électricité depuis quelques jours, grâce au solaire et au nucléaire ; l’éolien est absent du fait de l’absence de vent. Cette combinaison d’énergies bas carbone, solaire et nucléaire, est rendue possible grâce à la souplesse d’une centrale qui peut varier sa production de 80 % en 30 mn, deux fois par jour, pour laisser la place prioritairement aux renouvelables de produire. Cet arrêt se fait en toute sûreté et en accord avec le gestionnaire du réseau, RTE, qui veille à la préservation de l’équilibre entre la production et les besoins en électricité en France. Dans le cas présent, Il n’y a donc aucun impact sur la continuité d’approvisionnement en électricité.
Voir l’interview de Valérie Faudon dans BFM Story le 23 juillet 2019

Des dispositions depuis la première vague de chaleur en 2003
Fort du retour d’expérience des épisodes caniculaires de 2003 et 2006 et dans la perspective de la multiplication d’événements extrêmes de cette nature, EDF a engagé en 2008 un projet « Grands chauds ». Des modifications destinées à renforcer la robustesse des installations vis-à-vis de l’accroissement des températures de l’air et de l’eau ont été décidées. Elles concernent la sûreté nucléaire avec une augmentation des capacités des groupes froids de production d’eau glacée et des échangeurs eau/eau, un rembobinage de certains moteurs. Ont également été engagés des travaux importants de réhabilitation des aéroréfrigérants afin de renforcer le refroidissement de l’eau utilisée et ainsi produire plus avec la même quantité d’eau. Une rénovation complète des stations de surveillance des paramètres physico-chimiques de l’eau a aussi été menée afin de sécuriser les mesures dans l’environnement, notamment de la température. La stratégie d’adaptation opérationnelle au changement climatique retenue par EDF pour les centrales nucléaires se fonde sur une ré-interrogation tous les 5 ans des évolutions climatiques (températures de l’air et de l’eau, débit).
Deux mises à jour ont été réalisées en 2009 et 2014 ; leurs conclusions n’ont pas remis en cause les valeurs de température retenues pour le référentiel « Grands chauds ». Les conséquences de ces ré-interrogations sur les ouvrages sont intégrées dans les études et travaux réalisés lors des réexamens décennaux.
C’est un des volets du 4e réexamen périodique des centrales de 900 MWe en cours.
À l’avenir, les limites réglementaires de température de l’eau en amont des prélèvements mériteront d’être réexaminées à l’aune de ce que seront les températures lors de canicules possiblement plus fréquentes.
Peut-on parler de situation de crise ? NON
EDF réalise en continu une surveillance de la météo et de l’hydrométrie, permettant d’anticiper les périodes de forte sécheresse et de canicule et prendre, en lien avec les pouvoirs publics et le gestionnaire du réseau, les décisions adaptées. En parallèle, l’exploitant surveille régulièrement la faune et la flore des milieux aquatiques au voisinage des centrales pour s’assurer de l’absence d’impact du fonctionnement des centrales sur la biodiversité des rivières.