Services aux réacteurs: les perspectives du marché
Avec 435 unités en exploitation dans le monde, les perspectives et les axes de développement du marché des services aux réacteurs sont importants. Les industriels français en sont des acteurs incontournables : ils exportent chaque année pour environ 6 milliards d’euros de biens et services.
Le dernier exemple de cette présence internationale est le contrat remporté cet été par AREVA pour la réalisation des arrêts de tranche[1] et des opérations de maintenance de cinq centrales aux États-Unis. Un contrat d’un montant d’une dizaine de millions d’euros.
Sur quel type de réacteur les industriels français interviennent-ils ? Quels sont les marchés les plus importants ? Quelles sont les innovations ? Quelles sont les conséquences pour le « Grand carénage » du parc nucléaire français ? Passage en revue des principales questions.
La maintenance nucléaire dans le monde
Actuellement, 80 % des réacteurs en service sont en exploitation depuis plus de 20 ans, dont la moitié depuis plus de 30 ans. Pour continuer à les exploiter jusqu’à 40, 60, voire 80 ans, la majorité des électriciens décident d’investir dans d’importants travaux de maintenance.
Ces travaux sont examinés par les autorités de sûreté nationales – en France l’ASN – qui, à l’issue de la maintenance, décident d’accorder ou non l’autorisation d’étendre la durée d’exploitation. En Europe, les renouvellements de licence ont d’ores et déjà été donnés en Finlande, aux Pays-Bas et en Suisse. Des opérateurs s’apprêtent à demander ces renouvellements et engagent les programmes d’investissement correspondants en Bulgarie, en République tchèque…
Les regards se tournent vers les Etats-Unis
Les européens regardent attentivement ce qui se déroule aux Etats-Unis. Avec une centaine de réacteurs, le pays est doté du premier parc nucléaire mondial. Cette flotte est technologiquement variée, comptant des réacteurs à eau bouillante (REB) et des réacteurs à eau pressurisée (REP), comme en France. Mais surtout ce parc est exploité depuis 35 ans et 75 % des réacteurs ont déjà vu leurs licences renouvelées pour une exploitation sûre jusqu’à 60 ans.
Tous ces éléments permettent de disposer d’un retour d’expérience solide sur les coûts, les délais et les technologies à déployer.
AREVA interviendra sur huit réacteurs américains
À partir de 2016, AREVA réalisera aux Etats-Unis des opérations d’arrêt de tranche et de maintenance sur huit réacteurs de technologie différentes : deux REB et six REP.
Le contrat signé porte sur des services de contrôle et de maintenance de la cuve du réacteur, des internes de la cuve et des générateurs de vapeur, ainsi que sur la rénovation des moteurs de pompes primaires. Au total, le contrat représente une dizaine de millions d’euros.
Le groupe français renforce ainsi sa présence aux Etats-Unis, où il est intervenu sur plus de 50 % des renouvellements de licence déjà accordés, que ce soit à travers des analyses de sûreté ou la fabrication et l’installation de composants de rechange. AREVA détient également 25 % du marché pour la fourniture de combustible pour les REP et près de la moitié du marché des transports de déchets nucléaires.
Vers le « Grand carénage »
En France aussi, EDF prévoit d’exploiter ses réacteurs jusqu’à 40 ans, voire au-delà. Avec ce programme baptisé « Grand carénage », l’électricien souhaite investir près de 55 milliards d’euros d’ici 2025 en rénovations, soit plus d’un milliard d’euros par réacteur. Ce montant, plus élevé que dans les autres pays, répond à l’exigence fixée par l’ASN de se rapprocher des objectifs de sûreté des réacteurs de troisième génération de type EPR.
Plusieurs réacteurs sont concernés. EDF a signé avec AREVA un contrat de plus de 600 millions d’euros pour la modernisation des systèmes de contrôle-commande de 20 réacteurs, une première mondiale. Ce contrôle-commande numérique sera installé sur le réacteur n°2 de la centrale de Paluel (Seine-Maritime), « tête de série » des réacteurs de 1 300 MWe.
D’autres chantiers sont prévus : remplacement des générateurs de vapeur, maintenance des pompes primaires, remplacement des détecteurs de neutrons, réalisation des épreuves hydrauliques, inspection et maintenance de la cuve et du couvercle…
[1] Un arrêt de tranche est un arrêt pour maintenance programmée d’un réacteur nucléaire. Les activités concernent les zones nucléaires (bâtiment réacteur, combustible, etc.) et non nucléaires (salle des machines, source de refroidissement, etc.).
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