Une nouvelle gouvernance pour le projet Cigéo - Sfen

Une nouvelle gouvernance pour le projet Cigéo

Publié le 23 mai 2016 - Mis à jour le 28 septembre 2021
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Dans un rapport publié en avril dernier, la Cour des comptes s’est penchée sur la gestion de l’Andra entre 2008 et 2013. Les Sages ont conclu à la gestion saine et équilibrée de l’Agence, et se sont, entre autres, intéressés à ses relations avec EDF, le CEA et AREVA. « Un bilan de cinq ans de vie commune » sourit Gaëlle Saquet, Secrétaire générale de l’EPIC, marqué par quelques difficultés de dialogue qui ont fait place aujourd’hui à une nouvelle gouvernance et une nouvelle organisation pour une plus grande efficacité dans la réalisation du projet Cigéo.

 

Des tensions liées à une méconnaissance

La relation entre les acteurs est particulière, « nous n’avons pas le choix de nos financeurs : les trois grands producteurs de déchets nucléaires (EDF, CEA et AREVA). Et eux, n’ont pas le choix de leur fournisseur : nous. Un mariage forcé qu’il faut réussir à dépasser dans l’intérêt général » rappelle Gaëlle Saquet, Secrétaire générale de l’Andra.

Dans le passé, ce positionnement difficile s’est traduit par un certain nombre de difficultés qui viennent, pour la Secrétaire générale, souvent d’incompréhensions mutuelles : « L’Andra a l’impression d’être transparente et les producteurs de déchets ont l’impression qu’on leur cache des choses ». Défiance, difficultés à dialoguer… à quelques occasions, les tutelles ministérielles ont du intervenir pour faciliter les échanges, souligne la Cour des comptes dans son rapport.

Ce n’est pas le principe du projet Cigéo qui est remis en cause précise Gaëlle Saquet : « L’Andra et les producteurs partagent le même objectif : gérer les déchets en toute sécurité au meilleur coût ». Mais plutôt la gouvernance, « imparfaite » et « chronophage », selon les sages de la rue Cambon.

« Sur la période 2008-2013, celle étudiée dans le rapport, la Cour des comptes a constaté qu’il y avait eu un rythme d’échanges entre les acteurs et un degré d’information qui relevaient du micro management » analyse la Secrétaire générale de l’Andra. « Rien que pour les études d’esquisse[1], il y a eu plus de 200 réunions, sans compter les éléments techniques. Soit une réunion tous les deux jours pendant deux ans ! ». A la fin de cette phase, l’ensemble des acteurs a reconnu l’essoufflement général du système. « Cette organisation rigide perdait de vue les grands enjeux et les questions techniques dimensionnantes, en mettant toutes les problématiques au même niveau ».

A son arrivée fin 2014 à la tête de l’Andra, Pierre-Marie Abadie, conscient de la situation, a rencontré les directions d’EDF, du CEA et d’AREVA pour partager avec eux le constat, le risque d’un tel fonctionnement, et leur a soumis des propositions pour une gouvernance plus efficace. Son idée : une rénovation de la gouvernance articulée autour d’un pilotage plus stratégique.

 

Vers une gouvernance rénovée

Pendant une année, l’Andra a muri un modèle de gouvernance qui lui permettrait de gagner en efficacité. Fin 2015, l’Agence a mis en place ce nouveau modèle articulé autour d’un comité stratégique où sont arbitrées les questions structurantes, préalablement instruites par des comités exécutifs ou techniques. « Une organisation en poupées russes pour ne pas perdre de vue l’essentiel » résume Gaëlle Saquet.

Le premier comité dans sa nouvelle version a été lancé fin 2015. Le dispositif sera définitivement mis en place courant de l’année 2016 avec l’instauration d’un reporting stratégique envoyé à tous les décideurs de l’Agence et des producteurs de déchets. D’ores et déjà, le ministère de l’environnement et de l’énergie reconnait des « progrès prometteurs » et la Cour des comptes parle de « relations en voie de stabilisation ». 

A terme, cette nouvelle gouvernance devrait permettre de gérer des sujets stratégiques sans qu’ils ne deviennent des points d’achoppement ou des sources d’immobilisme, d’autant que les problématiques risquent de s’intensifier à mesure que le projet Cigéo se concrétisera.

Par ailleurs, un dialogue de qualité entre l’Andra et les producteurs de déchets est indispensable pour réussir un projet comme Cigéo. « Il faut construire une installation capable de gérer de façon sûre et durable les déchets les plus radioactifs et être en mesure de l’exploiter efficacement ». L’expérience acquise par l’Andra en matière de gestion des déchets radioactifs, combinée à l’expérience acquise depuis plusieurs dizaines d’années par EDF, le CEA et AREVA dans la construction et l’exploitation de grande installation nucléaire, permettra de développer un savoir-faire unique pour la construction de Cigéo.

 

[1] L’ « esquisse » est la seconde phase dans la réalisation d’étude d’un projet industriel. Il s’agit de de dessiner dans les grandes lignes le design de l’installation (Cigéo). L’esquisse a été clôturée en 2013.

Crédit photo : Andra

Publié par Boris Le Ngoc (SFEN)