« S’il est impossible de nier les risques liés au nucléaire, il est essentiel de les relativiser » - Sfen

« S’il est impossible de nier les risques liés au nucléaire, il est essentiel de les relativiser »

Publié le 3 juillet 2017 - Mis à jour le 28 septembre 2021
rebecca-abergel

Formée en France et aux Etats-Unis, Rebecca Abergel intègre en 2009 le Lawrence Berkeley National Laboratory. A 37 ans, cette directrice de recherche y développe des molécules capables d’éliminer une partie des radionucléides introduits dans les organismes vivants après des retombées radioactives.

Diplômée de l’École Normale Supérieure, Rebecca Abergel prend rapidement le chemin des États- Unis pour réaliser un stage de recherche au département de chimie de l’Université de Californie à Berkeley. Elle y obtiendra son doctorat. En 2009, elle est recrutée par le Lawrence Berkeley National Laboratory pour développer des contre-mesures médicales contre la contamination interne aux radionucléides. En 2014, après avoir reçu une bourse de l’Office of Science Early Career Research Program du Département de l’énergie américain, la revue du Massachussets Institute of Technology (MIT) la sélectionne parmi les innovateurs français de moins de 35 ans les plus

influents.

L’intérêt de cette scientifique pour le nucléaire naît tôt. « Je me rappelle avoir visité une centrale nucléaire au cours d’un voyage de classe, peu de temps après l’accident de Tchernobyl. J’en ai gardé un souvenir partagé entre des discussions sur les questions sanitaires des suites de l’accident et la place de l’atome dans le mix énergétique français. » Aujourd’hui, la chercheuse estime : « le nucléaire nous a permis de répondre à nos besoins énergétiques en croissance », ajoutant que « même dans l’éventualité d’une future transition énergétique réussie, nous devrons toujours nous appuyer sur une certaine proportion d’énergie nucléaire. » Rebecca Abergel se

dit aussi impressionnée par « la prouesse scientifique de l’utilisation civile de l’atome. »

Pour autant, cela ne l’empêche pas d’être « exigeante » : « nous devons rester vigilants pour assurer la sûreté des installations en exploitation et des opérations de démantèlement, et veiller au renouvellement de nos connaissances et améliorer nos procédés pour minimiser les risques liés aux déchets. »

C’est justement contre les impacts potentiels de ces risques propres au nucléaire que travaille cette amoureuse de la nature, en développant un médicament qui atténue les effets de la contamination par des éléments radioactifs. À Berkeley, Rebecca Abergel dirige des travaux de recherche dans le domaine de la chimie biologique des éléments lourds et radionucléides. La scientifique a activement participé à la création du nouvel Institut Lawrence Berkeley National Laboratory pour la résilience communautaire, dont la partie radiologique a été initiée à la suite de l’accident de Fukushima en 2011.


Même dans l’éventualité d’une future transition énergétique réussie, nous devrons toujours nous appuyer sur une certaine proportion d’énergie nucléaire.


« Pour minimiser l’impact d’un accident, nous devons être préparés » souligne la scientifique. « Pour cela, nous devons accepter de remettre en question nos acquis scientifiques et communiquer auprès du grand public ». Rebecca Abergel rapporte à ce sujet les lacunes du grand public lorsqu’il s’agit d’énergie nucléaire : « À Fukushima, j’ai été choquée de constater qu’une majorité des personnes évacuées après l’accident ne savait pas qu’elle vivait à proximité d’une centrale nucléaire, ne connaissait pas la contribution du nucléaire dans la production énergétique au Japon, et n’avait accès qu’à très peu d’information quant aux risques de contamination ». Pourtant, Rebecca Abergel considère que « s’il est impossible de nier les risques liés au nucléaire, il est aussi extrêmement important de les relativiser. » Ainsi, elle conclut qu’« une meilleure compréhension de l’énergie nucléaire par le grand public est indispensable pour pouvoir assurer une exploitation sûre du parc nucléaire, former une main-d’oeuvre experte, mais aussi pour pouvoir prendre des décisions informées et préparer les générations futures à la fermeture éventuelle de certaines centrales ou à leur renouvellement. »

 

Bio express
Diplômée de l’Ecole Normale Supérieure et titulaire d’un doctorat en chimie de l’Université de Californie à Berkeley, Rebecca Abergel intègre le Lawrence Berkeley National Laboratory en 2009 avant de prendre la Direction du laboratoire de chimie des actinides [1] en milieu biologique avec lequel elle a développé un médicament permettant de réduire l’impact sanitaire des radionucléides sur la santé des personnes affectées. En 2014, elle est sélectionnée par la revue du Massachusetts Institute of Technology (MIT) parmi les innovateurs français de moins de 35 ans les plus influents.
 


Les actinides sont une famille de métaux lourds radioactifs.


Par Tristan Hurel (SFEN)