Les Etats-Unis soutiennent l’innovation nucléaire
Aux Etats-Unis, l’énergie nucléaire fournit 20 % de l’électricité et 60 % de l’électricité zéro-carbone. Consciente que l’atome est un des principaux vecteurs de décarbonisation du pays, la Maison Blanche organisait le 6 novembre, à quelques semaines de la COP21, son premier « Summit on Nuclear Energy », pour réaffirmer l’importance du nucléaire dans son mix énergétique et présenter des outils d’optimisation de son soutien aux projets innovants.
Outre-Atlantique, l’industrie nucléaire évolue. Sans aller jusqu’à parler d’une « ubérisation » du secteur, on assiste à la multiplication des start-up. Celles-ci proposent, inventent, innovent et changent le visage de l’industrie. Toutefois, leur petite taille ne leur permet pas de concrétiser, seules, les projets qu’elles imaginent dans un secteur où les développements exigent la mise en œuvre de moyens lourds, notamment pour réaliser les démonstrations de sûreté.
C’est pour accompagner ce foisonnement et faire en sorte que les projets sur le papier prennent vie, que l’Administration a mis en place un large panel d’outils nouveaux au service des développeurs : GAIN (« Gateway for Accelerated Innovation on Nuclear ») en est un excellent exemple. Explications.
De plus en plus de start-up
Outre-Atlantique, l’innovation nucléaire se transforme et n’est désormais plus l’apanage des laboratoires nationaux et des grands industriels. De nouveaux acteurs apparaissent qui proposent un nouveau modèle économique basé sur les levées de fonds. Fraîchement diplômés d’universités prestigieuses, les jeunes ingénieurs du nucléaire ne rêvent plus de travailler pour les acteurs historiques du secteur, mais ont pour ambition de monter leur entreprise. Une grande majorité d’entre eux souhaite développer des innovations qui permettront de faire du nucléaire une technologie au service de la lutte contre le changement climatique.
Un nombre croissant de start-up vient grossir les rangs de l’industrie, portant à 48 le nombre de sociétés développant de nouveaux concepts. Ces jeunes entreprises imaginent des réacteurs de petite taille pour produire de l’énergie qui, pour certains, pourront aussi consommer les déchets nucléaires existants. Cependant, toutes ne disposent pas des moyens colossaux de Terra Power financée par Bill Gates, et se heurtent à des difficultés : les démonstrations de sûreté et le passage à la phase industrielle. L’industrie nucléaire n’est pas accessible au tout venant. Pour innover, les entreprises doivent, à un moment donné, pouvoir s’appuyer sur des moyens logistiques importants, des infrastructures de recherche conséquentes (maquettes, prototypes, etc.) et une expertise scientifique pointue sur un spectre relativement large (experts en matériaux, thermo-hydraulique, etc.). Tout ceci a un coût. C’est seulement l’ensemble de ces éléments qui peut en particulier permettre de consolider les concepts et réaliser les démonstrations de sûreté exigées par l’Autorité de sûreté, la NRC (« Nuclear Regulatory Commission »).
Le programme GAIN
Pour accompagner ce changement profond du modèle de l’innovation dans le nucléaire, le gouvernement a donc mis en place un portail dédié : GAIN (« Gateway for Accelerated Innovation on Nuclear »). Cette plate-forme doit fournir à ces nouvelles entreprises, et en particulier les start-up, le support technique (des personnes, des installations, du matériel et des données), réglementaire et financier nécessaire pour mettre leurs innovations sur les rails de la commercialisation. GAIN fournira un guichet unique à la communauté nucléaire.
D’abord, le DoE continuera à soutenir la recherche dans le secteur de l’énergie nucléaire, avec comme l’année dernière un montant de plus de 900 millions de dollars inscrits au budget fédéral 2016. Le DoE contribue également à l’accompagnement du déploiement de nouveaux réacteurs avec 12,5 milliards de garantie de prêt pour les projets nucléaires. Le DoE prévoit enfin 2 millions de dollars sous la forme de vouchers pour assister les entrepreneurs dans l’obtention des savoir-faire nucléaires, à partir du réseau des laboratoires nationaux.
Le soutien à l’industrie nucléaire américaine traduit la volonté du gouvernement de s’imposer comme un leader sur le marché mondial. Dans un contexte où la compétitivité du nucléaire américain est souvent mise à mal par l’utilisation croissante des gaz non conventionnels, mais où l’industrie nucléaire américaine représente 40 à 50 milliards de dollars de chiffre d’affaires et près de 180 000 emplois, le gouvernement a parfaitement pris conscience de la nécessité de soutenir l’innovation dans le domaine. Ceci contribuera d’abord à rendre plus compétitive l’exploitation des 99 réacteurs en fonctionnement et de les préserver, puis favorisera l’éclosion de nouvelles technologies (dont les petits réacteurs modulaires, « Small Modular Reactor ») encore plus sûres, moins coûteuses et donc susceptibles d’être plus facilement déployables aux Etats-Unis et ailleurs.
Ce premier sommet en faveur du nucléaire organisé par la Maison Blanche est un signal positif de soutien très important en direction de l’industrie nucléaire américaine, qui se voit rassurée sur le rôle qu’elle doit continuer à jouer en matière d’énergie durable et de contribution à l’activité économique et à l’emploi.
Vidéo du « Summit on Nuclear Energy »
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