Débats sur la place du nucléaire dans la stratégie hydrogène à Bruxelles - Sfen

Débats sur la place du nucléaire dans la stratégie hydrogène à Bruxelles

Publié le 24 octobre 2022 - Mis à jour le 25 octobre 2022

Dans le contexte d’invasion de l’Ukraine, la Commission européenne a présenté en mai 2022 un plan pour se dégager de la dépendance au gaz russe. Ce plan, nommé REPowerEU, vise entre autres à développer la filière hydrogène à un rythme inouï. Une bataille se joue actuellement à Bruxelles autour du rôle du nucléaire pour la production d’un hydrogène bas carbone, à date exclu du dispositif de financement.

REPowerEU est le plan de l’Union européenne présenté en mai 2022, au début de l’invasion de l’Ukraine, afin de se dégager de la dépendance au gaz fossile russe pour son approvisionnement énergétique. La Commission a fixé l’objectif de développer dix millions de tonnes d’hydrogène renouvelable et d’importer la même quantité d’ici 2030. A priori, le nucléaire, bien que bas carbone, en est exclu, que ce soit pour produire l’hydrogène ou pour bénéficier de subventions pour les investissements nécessaires à la prolongation de l’exploitation des réacteurs. Mais l’actualité européenne récente pourrait faire bouger les choses.

En effet, les membres du parlement du comité de l’industrie ont voté, le 13 octobre dernier, en faveur d’un amendement visant à inclure le nucléaire parmi les projets éligibles au plan de financement. Concrètement, l’amendement permettrait aux États membres de demander des prêts pour l’extension de la durée de vie des centrales nucléaires « tant que la sécurité énergétique de l’Union n’est pas rétablie »[1]. D’autre part, il prône pour un traitement indifférencié de l’hydrogène bas carbone, qu’il provienne d’une production nucléaire ou renouvelable.

Oppositions au nucléaire

Quelques jours plus tôt, le 10 octobre, dans une lettre à l’adresse de la Commission, 19 députés européens issus de tous les horizons politiques ont demandé à y inclure l’hydrogène à faible teneur en carbone dans les objectifs de production d’hydrogène décarboné et de promouvoir la production nationale plutôt que les importations.

Il appartient maintenant aux instances européennes (Conseil, Parlement, Commission) de discuter pour se mettre d’accord sur une version finale du document « dans les plus brefs délais ». Toutefois, les discussions pourraient s’avérer extrêmement tendues et fastidieuses puisque, la même semaine, l’Autriche, comme elle l’avait promis, a déposé une plainte auprès de la Cour de Justice européenne contre le texte de la taxonomie qui inclut le nucléaire au titre d’énergie de transition. La Taxonomie est un classement des activités vertes en Europe pour la raison que le nucléaire y est inclus.

Vienne espère obtenir le soutien d’autres pays au-delà du Luxembourg, qui a d’ores et déjà annoncé son soutien pour l’action en justice. Pendant la COP26, on se souvient que l’Autriche et le Luxembourg avait formé une alliance avec l’Allemagne, le Portugal et le Danemark pour s’opposer à l’inclusion du nucléaire dans la taxonomie européenne. Quelle sera la nouvelle position allemande ? Quel impact sur l’hydrogène bas carbone produit à partir de nucléaire ? Affaire à suivre. ■

Par Ilyas Hanine

Image : ©Shutterstock