Confinement, réparation, environnement… Cinq questions sur la situation de l’arche endommagée de Tchernobyl - Sfen

Confinement, réparation, environnement… Cinq questions sur la situation de l’arche endommagée de Tchernobyl

Publié le 9 décembre 2025

En février 2025, un drone a gravement endommagé l’arche de Tchernobyl, mettant temporairement hors service ses fonctions de confinement. L’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) appelle à engager urgemment des travaux de restauration pour rétablir la pleine capacité de protection de cette installation unique au monde.

En février 2025, l’arche de protection du réacteur accidenté de Tchernobyl — une structure métallique massive et unique au monde — a été gravement endommagée par un drone chargé d’explosif. Depuis, l’installation est placée sous haute surveillance. Début décembre, l’Agence internationale de l’énergie atomique a alerté que « l’arche a perdu ses principales fonctions de sécurité, notamment sa capacité de confinement », tout en précisant « qu’il n’y avait aucun dommage permanent à ses structures porteuses ni à ses systèmes de surveillance. » L’Agence appelle à effectuer rapidement des réparations définitives. Point de situation.

1. Qu’est-ce que l’arche de Tchernobyl ?

Le New Safe Confinement (NSC), nom officiel de l’arche, a été construit pour recouvrir le réacteur n°4 de Tchernobyl, gravement accidenté en avril 1986. Mis en place en 2016, il a pour fonction de contenir les matériaux radioactifs — combustible fondu, déchets hautement contaminés, débris — et de stabiliser l’ancien “sarcophage” soviétique très fragilisé. Il doit également permettre le démantèlement du réacteur grâce à sa durée de vie prévue d’un siècle.

C’est la plus grande structure mobile jamais construite par l’Homme. Bâtie à quelques centaines de mètres du réacteur, elle a ensuite été déplacée en position finale. Une prouesse compte tenu des dimensions cyclopéennes : 162 mètres de long, 108 mètres de haut, 257 mètres de portée et 36 000 tonnes au total.

2. Quels sont les dégâts suite à l’attaque de drone de février 2025 ?

Dans la nuit du 14 février 2025, un drone chargé d’explosif a frappé l’arche. L’impact a provoqué un incendie dans le revêtement extérieur, suivi d’un feu prolongé. Résultat : un trou d’une quinzaine de mètres carrés et plusieurs centaines de perforations dans le revêtement externe. Ces dégâts ont endommagé l’isolation et l’étanchéité de l’arche.

Les inspecteurs de l’AIEA ont conclu à une perte des fonctions principales, y compris la capacité de confinement, mais les structures porteuses (ossature métallique et fondations) ne semblent pas avoir subi de dommages irréversibles, et les systèmes de surveillance radiologique restent en grande partie fonctionnels.

3. Quelles sont les recommandations de l’AIEA ?

Si des réparations temporaires ont été réalisées, l’AIEA recommande une restauration complète et urgente de l’arche : réparation des blindages, des fonctions de confinement, de l’isolation et de l’étanchéité, ainsi qu’une remise en état des systèmes internes (ventilation, déshumidification, suivi de corrosion).

L’Agence insiste également sur la sécurisation maximale autour du site, soulignant le danger que représente toute nouvelle attaque ou intrusion.

4. Y a-t-il un impact environnemental suite à l’attaque ?

À ce jour, selon les autorités ukrainiennes et l’AIEA, aucune augmentation des niveaux de radiation — ni dans la zone d’exclusion, ni à l’extérieur — n’a été relevée. Cependant, l’Agence rappelle que l’enjeu environnemental reste réel et à long terme : une structure fragilisée pourrait avoir des conséquences sur l’écosystème si elle n’est pas rapidement réparée.

5. Quand auront lieu les travaux ?

Le projet de l’arche a été financé par la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD), via un fonds international dédié à Tchernobyl. Le coût total de l’ouvrage dépasse 1,5 milliard d’euros. En mai 2025, la BERD a annoncé que le Gouvernement français s’engage à verser 10 millions d’euros au International Chernobyl Cooperation Account (ICCA) pour financer les réparations du NSC.

Ces fonds viseront dans un premier temps à réparer le revêtement extérieur afin d’empêcher les infiltrations d’eau, puis à restaurer les fonctions principales de l’enceinte de confinement, limitant les risques de dispersion de matériaux contaminés — une étape essentielle vers un démantèlement sécurisé de l’ancien réacteur.

On ne sait pas encore qui mènera ces travaux, mais l’arche avait été construite par le consortium Novarka, réunissant les entreprises françaises Bouygues TP et Vinci Construction Grands Projets. Quant au calendrier, il dépend largement de l’évolution du conflit, condition indispensable à la réalisation d’une opération industrielle de cette ampleur. ■

Par Ludovic Dupin, Sfen

Image : Photo du NSC prise le 16 février 2025 – @VOLODYMYR TARASOV / NURPHOTO / NURPHOTO VIA AFP