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2/7 – Décarboner l’acier : un défi colossal à portée d’hydrogène bas carbone

Publié le 12 juillet 2022 - Mis à jour le 27 juillet 2022

Industrie la plus émettrice de gaz à effet de serre (GES), secteur dépendant à 40 % du prix de l’énergie, l’acier a du mal à clarifier son avenir dans un contexte de décarbonation drastique de nos sociétés et de flambée des prix de l’énergie. La sidérurgie française doit donc se tourner vers l’hydrogène bas carbone ainsi que vers une électrification généralisée de son process industriel. Une double nécessité qui appelle le recours au nucléaire.

La sidérurgie, en France, est le secteur industriel le plus polluant, comptant pour 22 % des émissions de l’industrie française et pour 4 % des émissions nationales. Dans le cadre de la Stratégie nationale bas carbone (SNCB), l’industrie a pour objectif de diminuer ses émissions de GES de 35 % par rapport à 2015 d’ici à 2030. Cela représente pour la filière sidérurgique une diminution de 31 % de ses émissions.  De plus, avec une perte de 20 % de ses effectifs en quinze ans et une économie fortement soumise aux aléas énergétiques actuels, l’acier français semble en perte d’attractivité et de compétitivité. La sidérurgie française, et plus largement européenne, doit donc faire face à un défi majeur : le maintien de ses avantages concurrentiels. Cela passera par une transition totale de la filière vers une production  bas carbone.

Le défi des hauts fourneaux

Dans le monde, une majorité de la production de l’acier (85 %) provient de la filière dite « intégrée », ou « voie hauts fourneaux ». Elle permet de fabriquer l’acier plat, un acier de qualité supérieure nécessaire  à certaines industries comme l’automobile ou l’emballage. Étant donnés la nature de son process et son besoin important en chaleur, la voie hauts fourneaux est une grande consommatrice d’énergie fossile.  Elle est donc très exposée aux prix du charbon et du gaz.

C’est en se tournant du côté de l’électrification des usages et de l’hydrogène que l’industrie sidérurgique arrivera à s’en sortir. En remplaçant le coke – charbon obtenu par pyrolyse de la houille – par l’hydrogène dans le processus de réduction du minerai de fer, la sidérurgie assurerait une réduction de 40 % au moins de ses émissions. À l’intérieur d’un système appelé DRP (Direct Reduction Plant), l’hydrogène s’associe en effet avec l’oxygène du minerai et forme de l’eau d’une part et du fer solide d’autre part. Ainsi, la voie hauts fourneaux qui émettait précédemment du CO2 ne produirait désormais plus que de l’eau. Cependant, le fer étant solide, il faut encore le faire fondre pour pouvoir le travailler. Les aciéristes comptent pour cela utiliser des fours à arcs électriques faisant fondre le fer grâce à un fort  courant. Passer à l’hydrogène permet donc à la sidérurgie de réduire drastiquement son empreinte carbone ainsi que sa dépendance aux énergies fossiles. Cependant, ce changement de paradigme de l’industrie sidérurgique s’accompagne de nombreux défis.

Le principal d’entre eux consiste à prendre en compte un fort besoin en électricité. Premièrement, il faudra désormais payer l’électricité de l’ensemble des usines du processus. Dans la filière traditionnelle, l’électricité produite sur une aciérie est principalement produite à partir de gaz sidérurgiques, récupérés comme coproduits dans les hauts fourneaux. Ces gaz sont alors brûlés dans une centrale thermique  présente sur site. Ce double usage n’existera plus. Deuxièmement, il faudra électrifier les fours électriques nécessaires à la fonte de l’acier réduit par hydrogène. Ce rôle était au préalable assuré par le coke. oCe type de fours est déjà utilisé dans la filière des aciers longs et de recyclage. En considérant que la filière recyclage de ferraille soit appelée à augmenter, voire doubler pour certains aciéristes  comme ArcelorMittal, il faut s’attendre à une demande en électricité accrue du côté de la sidérurgie française.

La production d’hydrogène

Plus important encore, il faudra produire de l’hydrogène bas carbone pour assurer une mue totale de la filière sidérurgique.

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Par Matthias Avice (École polytechnique), stagiaire Sfen

Photo I © François Lo Presti / AFP – La décarbonation des hauts fourneaux d’ArcelorMittal à Dunkerque réclamerait 167 kt de dihydrogène bas carbone par an.