Oublions l’Energiewende et regardons vers la Chine
La Chine, première puissance économique mondiale, réfléchit, comme la France, à un modèle de transition énergétique. L’intérêt des Chinois pour ce sujet est d’autant plus grand que les populations sont, dans leur quotidien, lourdement impactées par la pollution due aux énergies fossiles. Des vies humaines sont touchées : en 2010 selon l’OCDE, 1,2 millions de Chinois auraient perdu la vie à cause de la pollution atmosphérique. Les grandes métropoles comme Pékin sont désormais tristement célèbres pour leur épais brouillard, le smog. En mars dernier, la capitale enregistrait des niveaux extrêmes, 505 microgrammes par mètre cube (µg/m3), bien au-delà des recommandations fixées par l’OMS (20 µg/m3). En quelques années, la Chine est devenue devant les Etats-Unis le premier pays émetteur en gaz à effet de serre. Conscientes de l’état d’urgence, les autorités ont décidé de décarboner leur économie en misant sur le nucléaire et les renouvelables.
Vers une « civilisation écologique »
Depuis plusieurs années déjà, les autorités chinoises ont développé le concept de « civilisation écologique ». Loin du green washing, cette idée structurante figure dans l’ensemble des plénums chinois et s’intègre au développement économique, politique, culturel et social du pays. L’objectif est d’arriver à mettre en place un système économique dans lequel croissance et préservation de l’environnement ne seraient pas antinomiques. A la veille d’un sommet climatique décisif, la Chine prend la mesure des enjeux et adresse un signal fort à l’ensemble de la communauté internationale. Le défi est colossal puisque qu’à ce jour, aucun pays n’a su se développer sans impact sur l’environnement.
Renouvelables et nucléaire pour sortir du « tout charbon »
Ces déclarations se traduisent dans les faits par le développement de l’ensemble des énergies décarbonées permettant d’ici à 2030 de sortir du « tout charbon » (le champion des énergies polluantes) pour amener sa part de 67 à 44% du mix électrique.
Ainsi, selon Ernst & Young, la Chine est en passe de détrôner les Etats-Unis comme premier pays en matière d’investissements et de développement des infrastructures renouvelables : d’ici à 2018, Pékin prévoit d’augmenter ses capacités éoliennes de 100 gigawatts et solaires de 60 gigawatts.
Parallèlement, toujours dans l’optique de dépolluer l’air et réduire les émissions de CO2, les autorités chinoises misent sur l’énergie nucléaire. Sur les 70 réacteurs actuellement en construction dans le monde, 40% se trouvent en Chine.
Inspiré par le modèle français, le pays s’est fixé des objectifs ambitieux : accéder à une puissance installée de 58 gigawatts en 2015 et 88 gigawatts d’ici à 2020. Pour les atteindre, la Chine devra construire 5 nouvelles unités par an d’ici 2015 et 6 unités par an entre 2015 et 2020. De sorte qu’à certain moment, près de 40 unités pourraient être en phase de construction simultanément. A terme, le parc nucléaire chinois dépassera celui des Etats-Unis et de la France. Un marché colossal dans lequel la filière nucléaire française, reconnue pour son excellence, a un rôle à jouer.
Oublions l’Energiewende et regardons vers la Chine
Si pour réaliser sa transition énergétique, la France doit s’inspirer de l’expérience des autres pays, elle doit se détourner du mauvais exemple allemand et regarder ce qu’il se passe en Chine. Deux éléments doivent être connus.
Tout d’abord, contrairement à une idée reçue, un chinois pollue nettement moins qu’un allemand – mais un peu plus qu’un français (voir graphique ci-dessous). De plus, la transition énergétique allemande semble se traduire par toujours plus de charbon quand la Chine, elle, entame un mouvement inverse : moins de charbon et plus d’énergie bas carbone.
La Chine, une source d’inspiration pour la France ?