Nouvelle contribution de la SFEN au projet de loi sur la transition énergétique
La SFEN publie une nouvelle contribution au projet de loi sur la transition énergétique pour la croissance verte et rappelle sa position sur six axes :
- la priorité de la transition énergétique doit être la diminution des énergies carbonées,
- la prolongation de l’exploitation des centrales nucléaires est la solution bas carbone la plus compétitive pour les années à venir,
- la filière nucléaire maîtrise des solutions techniques de recyclage, de conditionnement et de stockage responsables
- sur la sûreté nucléaire et l’information des citoyens, la filière nucléaire est déjà exemplaire
- garantir l’effort de recherche nucléaire est nécessaire pour atteindre les objectifs de la transition énergétique
- la filière nucléaire est un des leviers pour financer la transition énergétique
Téléchargez la note de position de la SFEN
Il s’agit d’une transition « énergétique » et non d’une transition « électrique »
Les débats se sont trop souvent concentrés sur la seule question de l’électricité et sur un débat « pour ou contre le nucléaire ». Or, l’objectif prioritaire de la loi doit rester la réduction de la consommation des énergies carbonées (pétrole, charbon et gaz). En 2013, celles-ci ont représenté 70% de la consommation énergétique[1] et 69 milliards d’euros d’importations[2], soit la quasi-totalité du déficit de la balance commerciale. Il ne faut pas se tromper de transition : il s’agit avant tout d’engager une transition « énergétique », et non une transition « électrique ».
La France doit capitaliser sur la performance et l’exemplarité de son système électrique (bas carbone à 90%) pour réduire encore la consommation d’énergies carbonées dans le transport et l’habitat.
Face aux incertitudes, il faut garder les options ouvertes et poursuivre l’exploitation de l’ensemble des centrales nucléaires
Le marché de l’électricité européen est aujourd’hui en crise profonde[3]. L’Agence Internationale de l’Energie a sonné l’alarme en juin 2014[4] soulignant que les rythmes actuels des nouveaux investissements, découragés par la baisse des prix de gros, sont largement insuffisants pour assurer la fiabilité de l’offre d’électricité dans l’Union européenne à l’horizon 2035.
Dans ce contexte, le parc nucléaire protège les Français et garantit la sécurité d’approvisionnement en électricité de l’Hexagone. Pour permettre l’exploitation des réacteurs au-delà de 40 ans, sous réserve de l’autorisation de l’ASN, EDF projette d’investir près de 55 milliards d’euros d’ici 2025 en rénovations, soit plus d’un milliard d’euros par réacteur.
Ce montant, plus élevé que dans les autres pays, répond à l’exigence fixée par l’ASN de se rapprocher, à l’étape des 40 ans, des objectifs de sûreté des réacteurs de troisième génération de type EPR.
La filière nucléaire maîtrise des solutions techniques de recyclage, de conditionnement et de stockage responsables
Les déchets de la filière nucléaire, y compris ceux d’origine médicale, représentent 2% du volume total des déchets. L’ensemble des déchets radioactifs fait l’objet de déclarations par leurs producteurs respectifs et d’un inventaire national sous la responsabilité de l’Andra[5].
La filière nucléaire met en œuvre des solutions avancées pour le conditionnement des déchets finaux. Aujourd’hui, 90% des déchets radioactifs produits chaque année ont une solution de stockage à long terme avec les centres spécialisés et surveillés. Pour les 10% restants, l’Andra étudie depuis plusieurs années des installations de stockage notamment pour les déchets hautement radioactifs : le projet CIGEO.
La chaîne de retraitement permet de recycler potentiellement 96% des combustibles nucléaires usés, tout en divisant par 5 le volume des déchets de haute activité. Les études doivent être poursuivies pour évaluer l’intérêt économique et la maîtrise des risques d’une filière de recyclage et de réutilisation qui comprendrait une palette plus large de matériaux valorisables (comme les ferrailles et les bétons très faiblement radioactifs).
Sur la sûreté nucléaire et l’information des citoyens, la filière nucléaire est déjà exemplaire
Le devoir de toujours progresser en matière de dialogue et de transparence ne doit pas faire oublier que la filière nucléaire française est exemplaire dans sa culture et son dispositif réglementaire. Les nouvelles mesures doivent rester proportionnées au regard des objectifs poursuivis.
Rappelons que dès 1981, l’Etat a développé des structures de concertation et d’information : les commissions locales d’information (CLI). Aujourd’hui au nombre de 38[6], les CLI rassemblent les élus, les syndicats, les associations et les personnes qualifiées, représentant la société civile.
Elles sont reconnues par le législateur et les parties prenantes pour leur pratique de la concertation et de l’information. Les prérogatives dont bénéficient les CLI sont importantes. Celles-ci peuvent réaliser des expertises indépendantes et des mesures et analyses dans l’environnement. En cas d’incident ou d’accident, les CLI sont, au même titre que le Préfet et les maires de proximité, informées dans l’immédiat.
Garantir l’effort de recherche nucléaire pour atteindre les objectifs de latransition énergétique
Grâce aux travaux menés par les acteurs de la filière, la France occupe une place de premier plan dans le monde en matière de recherche nucléaire. Ces points forts de la recherche nucléaire doivent être préservés en maintenant l’effort consacré à la recherche nucléaire.
La R&D nucléaire est une recherche d’excellence, d’un haut niveau technologique, mettant en œuvre des outils expérimentaux et des méthodes de pointe comme la simulation numérique. Pluridisciplinaire, elle va de la recherche fondamentale à la recherche appliquée, est cofinancée par le public et par le privé (industriels français et étrangers), et fait l’objet de nombreux partenariats internationaux.
Les grands acteurs, comme le CEA, font appel au savoir-faire des petites et moyennes entreprises créant un effet d’entrainement leur permettant de bénéficier de transferts de technologie comme dans le domaine de l’instrumentation. A court et moyen terme, la recherche est nécessaire pour l’industrie nucléaire, notamment pour garantir toujours mieux la sûreté des installations, gérer les déchets radioactifs et exploiter les centrales dans la durée.
A long terme, la R&D prépare les centrales nucléaires de 4ème génération, qui seront en rupture technologique et permettront une meilleure gestion des ressources d’uranium, une plus grande valorisation des matières recyclées et une réduction des déchets radioactifs.
La filière nucléaire est un des leviers pour financer la transition énergétique
Il n’existe à ce jour aucune étude économique prospective sur le financement de la transition énergétique. L’Etat peut s’appuyer sur les atouts économiques et financiers de la filière nucléaire pour aborder sereinement les incertitudes liées à la transition énergétique.
L’énergie nucléaire représente une importante ressource financière pour l’Etat et les territoires. En 2013, l’exploitant a versé plus de 2 milliards d’euros de dividendes à l’Etat[7], et payé 1,5 milliard d’euros d’impôts sur les sociétés. Dans les territoires, chacune des 19 centrales nucléaires a contribué en moyenne à hauteur de 40 millions d’euros par an en taxes et impôts locaux.
L’ensemble des exploitants a versé 600 millions d’euros pour la taxe relative aux INB (installations nucléaires de base). Cet apport est une ressource utile pour financer la transition énergétique et le restera sous réserve que les prix reflètent les coûts des différents moyens du mix. Dans son rapport publié en 2013, la Cour des comptes a estimé que la contribution au service public de l’électricité (CSPE), nécessaire au développement des renouvelables, demandera à elle seule 40,5 milliards d’euros entre 2012 et 2020.
Des financements importants seront aussi nécessaires, par exemple pour la rénovation des logements et l’évolution des modes de transport. Pour financer la transition énergétique, il est essentiel de préserver la bonne santé financière de la filière nucléaire en maintenant et en prolongeant l’exploitation des centrales nucléaires.
Commissariat général au développement durable – Chiffres clés de l’énergie (2013)
Ministère du développement durable – Panorama énergies-climat (2013)
CGSP – La crise du système électrique européen (2014)
Energy Technology Perspectives 2014 – Agence Internationale de l’Energie (2014)
Andra, Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs
Site internet de l’Association Nationale des Comités et Commissions Locales d’Information (ANCCLI)
Agence des Participations de l’Etat (2014)