3e visite décennale : Paluel ouvre le bal

Le réacteur 2 de la centrale nucléaire de Paluel (Seine-Maritime) a été découplé du réseau électrique le 16 mai. Pendant une centaine de jours, d’importantes modifications seront apportées pour que ce réacteur de 1 300 MW puisse être exploité 10 années supplémentaires. Cette troisième visite décennale est une première pour les réacteurs de cette puissance (« palier »). Elle donne le départ d’un programme industriel d’envergure : le Grand Carénage. Visite du chantier. 

Visite décennale, qu’est-ce que c’est ? 

En France, tous les dix ans, les centrales nucléaires doivent se soumettre à une inspection particulièrement approfondie. Cette visite est, bien plus qu’un arrêt pour maintenance, un véritable « réexamen de sûreté » qui permet à l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) de s’assurer que la centrale est conforme aux exigences prévues à la conception.

Programmée sur une centaine de jours, la visite décennale – la « VD » – est un arrêt exceptionnel par son ampleur, le nombre de contrôles et de travaux réalisés. C’est l’occasion d’intégrer les progrès technologiques, le retour d’expérience de l’ensemble des installations nucléaires dans le monde pour intégrer les meilleures pratiques et les techniques les plus récentes notamment en matière de sûreté.

Lors des visites décennales, trois examens réglementaires majeurs sont menés sur les principaux éléments garantissant la sûreté des installations : la cuve du réacteur, le circuit primaire et l’enceinte de confinement du bâtiment réacteur.  Au terme des opérations de maintenance et de contrôle, l’ASN décide si la centrale peut, ou non, être exploitée dix années supplémentaires, jusqu’à la prochaine visite décennale.

Les grands travaux de Paluel

Cette VD3 de la centrale normande est historique : Paluel est la première des centrales 1 300 MWe à commencer les travaux du programme « Grand carénage ». Le « Grand carénage » est un important programme de maintenance approfondie et de remplacement de gros composants déployé sur le parc nucléaire français, avec pour objectif de prolonger la durée d’exploitation des centrales au-delà de 40 ans.

Au total, 20 000 activités sont planifiées tout au long de cette visite décennale qui durera environ 8 mois. Au pic de l’activité, près de 3 500 professionnels travailleront chaque jour sur le site. Cet afflux de personnels a été préparé par la construction de nouveaux espaces de restauration et de stationnement et la mise en place de nouvelles organisations logistiques.

Outre la réalisation de travaux de maintenance courante et du remplacement d’un tiers du combustible du réacteur, des opérations exceptionnelles sont prévues : remplacement des quatre générateurs de vapeur, rénovation du  contrôle commande et rénovation des salles de commande.

Cette troisième « VD » est aussi l’occasion de mettre en œuvre les améliorations issues du retour d’expérience de l’accident de Fukushima. Trois mesures sont attendues : l’installation de Diesels d’Ultime Secours, la diversification des sources froides et la mise en place d’un centre de crise local. Elles permettront d’améliorer la robustesse aux agressions externes (séisme majoré, grands chauds, vents extrêmes, explosion, inondation interne et externe) et à l’accident grave tout en minimisant les conséquences radiologiques. Sans oublier l’implantation de la Force d’Action Rapide Nucléaire.

Pour Bertrand Riboulet, pilote stratégique du projet VD3 1 300 d’EDF, « la 3e visite décennale du palier 1 300 intègre un réexamen de sûreté très ambitieux. En plus de l’important volume de modifications, l’ensemble doit être mis en œuvre dans un contexte croissant d’exigences, d’évolutions réglementaires et de contraintes économiques. »

Les unités de production 1, 3 et 4 de la centrale de Paluel connaîtront leur troisième visite décennale respectivement en 2016, 2017 et 2018. 

Chez nos voisins

La France est le seul pays dont les centrales nucléaires doivent, tous les dix ans, se soumettre à un réexamen de sûreté aussi complet.

La Suède, les Pays-Bas, la Suisse, la Belgique et d’autres pays sont déjà engagés dans l’exploitation de leurs centrales au-delà de 40 ans. Aux Etats-Unis, plus de 70 réacteurs ont reçu une licence d’exploitation jusqu’à 60 ans, et des études sont en cours pour une exploitation au-delà.

Pour permettre l’exploitation des réacteurs au-delà de 40 ans, sous réserve de l’autorisation de l’ASN, EDF prévoit d’investir près de 55 milliards d’euros d’ici 2025 en rénovations, soit plus d’un milliard d’euros par réacteur. Ce montant, plus élevé que dans les autres pays, répond à l’exigence fixée par l’Autorité de sûreté nucléaire de rapprocher les réacteurs, à l’étape des 40 ans, des objectifs de sûreté des réacteurs de troisième génération de type EPR.

Chaque année entre 2015 et 2025, près de 4 réacteurs seront soumis à leur troisième visite décennale. 

Grand carénage : la mobilisation de la filière nucléaire 

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