[Série #2] Les discours fondateurs du nucléaire civil – La déclaration du triplement du nucléaire d’ici 2050
Qu’ils soient prononcés dans un contexte de crise, de coopération internationale ou de construction institutionnelle, certains discours font basculer l’histoire. Depuis près de 80 ans, plusieurs d’entre eux ont contribué à façonner le nucléaire civil et la coopération internationale telle qu’elle existe aujourd’hui. Cette série revient sur ces prises de parole et décisions fondatrices des usages pacifiques de l’atome. Aujourd’hui, retour sur la déclaration du triplement du nucléaire lors de la COP28 de 2023.
La déclaration visant à tripler la capacité nucléaire d’ici 2050 lors de la COP28 compte parmi les annonces majeures du XXIᵉ siècle ayant marqué un tournant dans le nucléaire civil. Pour la première fois, le nucléaire a été explicitement reconnu comme l’une des solutions indispensables pour ralentir le réchauffement climatique lors d’un grand sommet international dédié à cette question.
En décembre 2023, lors du 28ᵉ Sommet mondial de l’action climatique, 22 pays ont approuvé la Déclaration fixant l’objectif de tripler la capacité nucléaire mondiale d’ici 2050 par rapport à 2020. Celle-ci invite également les actionnaires des institutions financières internationales à encourager l’intégration de l’énergie nucléaire dans leurs politiques de financement énergétique.
Tripler le nucléaire d’ici 2050 : une déclaration historique pour la neutralité carbone
Cette déclaration conjointe s’appuyait sur une étude de l’Agence de l’énergie nucléaire, qui montre qu’un scénario prévoyant un triplement de la capacité nucléaire d’ici 2050 constitue une trajectoire réaliste pour atteindre la neutralité carbone. Les 22 signataires reconnaissaient ainsi le rôle clé de l’énergie nucléaire pour atteindre la neutralité carbone et pour assurer à tous l’accès à une énergie fiable, abordable et durable. « Si vous voulez réconcilier l’emploi, la souveraineté, l’autonomie stratégique et de faibles émissions de carbone, il n’y a rien de plus durable et de plus fiable que l’énergie nucléaire », avait déclaré le président français Emmanuel Macron.
Cette déclaration est historique. Même si elle n’a pas de valeur juridique contraignante, elle représente un signal fort de la volonté collective des pays signataires. « Je suis heureux de voir cette déclaration des dirigeants de 20 pays s’engager à travailler ensemble pour atteindre un objectif mondial ambitieux de tripler la capacité nucléaire d’ici 2050 », avait déclaré le directeur général de l’Agence de l’énergie nucléaire, William D. Magwood.
La coalition nucléaire s’élargit : de 22 à 33 pays signataires en 2025
Encore aujourd’hui, cette déclaration continue de rallier de nouveaux pays. Lors de la COP30, le nombre de pays soutenant la déclaration est ainsi passé à 33[1]. Au‑delà de ces participants, de nombreux autres pays continuent de parier sur le nucléaire. Il est intéressant de noter que la Russie et la Chine, malgré des politiques très favorables à l’énergie nucléaire, ne figurent pas parmi les signataires. L’Inde, qui dispose également d’un programme nucléaire ambitieux, est absente. ■
Par Floriane Jacq, Sfen
Image : @COP28
[1] Arménie, Bulgarie, Canada, Croatie, République tchèque, Salvador, Finlande, France, Ghana, Hongrie, Jamaïque, Japon, Kazakhstan, Kenya, Corée du Sud, Kosovo, Moldavie, Mongolie, Maroc, Pays-Bas, Nigeria, Pologne, Roumanie, République du Rwanda, Sénégal, Slovaquie, Slovénie, Suède, Turquie, Ukraine, Émirats arabes unis, Royaume-Uni et États-Unis d’Amérique.