Rejets des eaux de Fukushima : radionucléides et politique

L’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) considère que le plan de rejet de l’eau actuellement stockée sur le site de la centrale accidentée de Fukushima Daiichi est en accord avec les standards internationaux. Malgré cela, le sujet reste fortement instrumentalisé dans les pays voisins notamment en Chine et en République de Corée.
Le 4 juillet 2023, l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) a annoncé la fin de son évaluation du plan de rejet des eaux stockées sur le site de la centrale de Fukushima Daiichi. « L’examen de sûreté a conclu que les plans du Japon sont conformes aux normes de sûreté de l’AIEA, qui servent de référence mondiale pour la protection des personnes et de l’environnement », note l’agence onusienne.
From a boat off #Fukushima Daiichi, I'm overlooking the treated water discharge site. After a 2-year review, @IAEAorg finds Japan's plan aligns with safety standards.
But our work isn't over. We've been here, we're here, and we'll be here until the last drop is safely discharged. pic.twitter.com/6W7a1n8ssm— Rafael MarianoGrossi (@rafaelmgrossi) July 5, 2023
Les rejets seront effectués à 1 km de la côte à 12 mètres de profondeur après traitement (pour éliminer tous les radionucléides sauf le tritium qui est un isotope de l’hydrogène composant l’eau (H2O)), et dilution. Les rejets représenteront ainsi une quantité de tritium égale ou inférieure à celle de la centrale lorsqu’elle était en fonctionnement (1 500 Bq/L). Ils seront même bien en dessous des seuils de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) qui recommande une valeur guide de 10 000 Bq/L pour le tritium dans l’eau de boisson, à considérer en cas de consommation permanente de l’eau (730 L/an pour un adulte, source IRSN).
Des rejets qui feront l’objet d’analyses croisées
Par ailleurs, un travail d’échantillonnage sera réalisé en continu par différents laboratoires de l’AIEA, mais aussi par des laboratoires d’autres pays comme la Chine, la France, les États-Unis, la Suisse et la République de Corée. « L’objectif est de confirmer que les résultats des entités nationales sont similaires à ceux des autres laboratoires et ainsi d’assurer la transparence et le libre accès aux données », explique Paul McGinnity, expert de la radioactivité en mer de l’AIEA. Cela permettra peut-être également de limiter l’instrumentalisation de ces rejets dans certains pays voisins.
Des contestations en dehors du champ radiologique et sanitaire
Selon Jean-Christophe Gariel, directeur général adjoint en charge de l’environnement et de la santé à l’IRSN, les contestations s’expliquent par d’autres facteurs que la radioactivité. « Si l’on parle dans un premier temps des pêcheurs [japonais], je pense que leur souci n’est pas la quantité de radioactivité ni un quelconque risque sanitaire, en effet négligeable, c’est surtout une histoire d’image. Ces pêcheurs ont subi l’accident de Fukushima, il n’y a pas eu de pêche pendant près de 10 ans, et bien évidemment à l’annonce de ce genre de rejet va se poser la question de l’image de marque des produits de Fukushima », a expliqué le spécialiste à l’antenne de RFI.
« Pour ce qui concerne les pays voisins, la Corée du Sud voire la Chine, c’est un peu plus difficile à comprendre d’un point de vue technique car les niveaux de tritium seront extrêmement faibles, je crois qu’il faut y voir un aspect politique voir diplomatique », a-t-il souligné. Le Japon entretient des relations tendues avec ses voisins pour des raisons historiques et territoriales.
La Corée du Sud maintient les restrictions d’import mais partage les conclusions de l’AIEA
En République de Corée, le gouvernement a déclaré le 7 juillet que les rejets étaient bien en accord avec les standards en s’appuyant notamment sur une étude indépendante. Mais l’opposition politique reste importante avec des protestations du Parti démocrate (parti d’opposition) dont le chef de file a par exemple exhorté le gouvernement à porter l’affaire au Tribunal international du droit de la mer (TIDM). D’autre part, le pouvoir en place ne compte pas pour autant lever le bannissement des denrées alimentaires de la préfecture en vigueur depuis 2011.
La Chine annonce l’interdiction de denrées alimentaires
En parallèle de l’annonce de l’AIEA, la Chine a annoncé le 7 juillet limiter l’import de certains aliments provenant d’une dizaine de préfectures japonaises alors que selon le Yomiuri Shimbun, les centrales chinoises rejettent par an 6 fois plus de tritium que ce que prévoit le plan de rejets des eaux de Fukushima Daiichi. ■