Réforme de la sûreté nucléaire : l’Assemblée nucléaire vote le texte
L’Assemblée nationale a voté, de justesse, en faveur du projet de loi qui vise à réformer la gouvernance de la sûreté nucléaire à travers un rapprochement de l’ASN et de l’IRSN. Les différences de fond entre le Sénat et l’Assemblée nationale devront désormais être tranchées en Commission mixte paritaire.
Le 19 mars 2024, le projet de loi visant à fusionner l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) avec l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) a été approuvé, d’une très courte tête, à l’Assemblée nationale, par un vote de 260 voix pour et 259 voix contre. Les débats se sont déroulés dans une ambiance électrique. Le vote a été marqué par l’opposition des communistes, socialistes, écologistes, du groupe Liot (Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires) et, de manière inattendue, du RN – ce dernier ayant pourtant soutenu l’article 1 qui entérinait la fusion des deux entités. Finalement, l’approbation a été obtenue grâce au soutien de la majorité présidentielle, incluant Renaissance, Horizon et le MoDem, ainsi que la contribution des députés Républicains.
Le projet de loi relatif à l’organisation de la sûreté nucléaire est adopté. C’est une étape essentielle dans la relance du nucléaire. Je remercie l’ensemble des parlementaires, de la majorité comme des oppositions, qui ont voté ce texte. #DirectAN
— Roland Lescure (@RolandLescure) March 19, 2024
Le projet est structuré en deux parties : la première se concentre sur la création de la nouvelle entité, tandis que la seconde traite de l’adaptation des règles de la commande publique.
Un débat sur la dualité expertise et décision
La première partie détaille l’essence de la réforme, à savoir la fusion de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) avec l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) (article 1). Elle spécifie également l’organisation de cette nouvelle entité, un sujet qui a fait l’objet de longs débats. Alors que le Sénat voulait faire une distinction stricte entre l’expertise d’une part et les activités d’instruction/décision d’autre part, l’Assemblée a opté pour une approche plus flexible, permettant à cette nouvelle autorité indépendante de s’organiser selon son règlement intérieur (Article 2, alinéas 8 et 9).
Le même article insiste sur la transparence, garantissant la publication des résultats d’expertises et des avis des groupes permanents d’experts. Le texte prévoit que ces avis seront publiés de manière concomitante aux décisions, sauf décision contraire (Article 2, alinéa 12).
Un organisme de recherche réaffirmé
Le projet de loi réaffirme les missions de radioprotection, d’évaluation, d’accréditation, d’expertises, et de recherche de cette nouvelle autorité (Article 3), ainsi que sa liberté de définir ses programmes de recherche. L’Assemblée a choisi d’équiper cette entité d’un conseil scientifique, dont les membres, non rémunérés, sont sélectionnés pour leurs compétences scientifiques et techniques. Le texte consolide également les relations existantes entre l’autorité de sûreté et l’Opecst (Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques) (Article 4).
Parmi les dispositions plus consensuelles, le texte comporte des règles temporaires concernant le personnel, leur représentation, et l’organisation de comités (articles 6 à 11). Comme le Sénat, l’Assemblée nationale veut que le rôle du Haut-commissaire soit défini par la loi, mais que ses missions précises soient fixées plus tard par un décret (Article 12). Pour bien suivre le processus de fusion, une mesure a été ajoutée pour vérifier l’avancement de la préparation de la nouvelle structure (Article 15 bis). Enfin, le texte établit des exceptions dans les règles d’achat public pour certains projets nucléaires (Articles 16 à 18).
Une Commission mixte paritaire à suivre de près
La version du texte présente des divergences entre le Sénat et l’Assemblée nationale. Les parlementaires devront trouver un consensus sur un texte commun lors d’une Commission mixte paritaire (CMP), programmée pour début avril. Si la CMP aboutit à un accord, le texte convenu sera soumis à un vote final par chacune des chambres dans les jours suivants. Au vu des divergences de fond entre les deux chambres, cette étape sera à suivre de près. ■