Point de situation sur les incendies en Ukraine - Sfen

Point de situation sur les incendies en Ukraine

Publié le 21 avril 2020 - Mis à jour le 28 septembre 2021
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Afin d’apporter des éléments de réponse aux questions concernant l’impact potentiel radiologique des incendies déclarés début avril près du site de Tchernobyl, la SFEN, avec l’aide de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), fait le point sur les conséquences de ces incendies en France et en Ukraine.

Un premier incendie s’est déclaré le 4 avril 2020, à l’extérieur de la zone d’exclusion d’un rayon de 30 kilomètres autour de la centrale nucléaire de Tchernobyl, et dans ce périmètre dès le 8 avril. Le 14 avril au soir le feu semblait avoir été maîtrisé, plus aucun foyer d’incendie n’était visible sur les images satellites du 15 avril. Mais le 17 avril, des vents violents ont réactivé plusieurs foyers d’incendies notamment un, plus étendu, de 220 km2, à 70 km à l’Ouest de la centrale de Tchernobyl, un autre, en limite de zone d’exclusion situé également à l’ouest et deux foyers plus petits, à environ 2 kilomètres de la centrale, selon l’IRSN. Au 21 avril, « les feux semblent décroître mais suite à la reprise du 17 avril nous préférons restons prudent quant à l’évolution des incendies », précise François Besnus, Directeur de l’environnement à l’IRSN.

Comment mesure-t-on la radioactivité dans l’air ?

La radioactivité dans l’air est mesurée grâce à l’analyse de filtres qui collectent les poussières atmosphériques. Les données récoltées permettent notamment d’estimer les doses par par inhalation. En France, ces relevés sont assurés par l’IRSN grâce au réseau OPERA-AIR qui se compose d’une cinquantaine de station de collecte. La balise dite « Téléray » de l’Ambassade de France en Ukraine est, elle, moins sensible aux variations de la radioactivité dans l’air.

En effet les balises Téléray, au nombre de 400 sur le territoire français, mesurent la radioactivité ambiante, qui comprend également les rayonnements tellurique et cosmique. Ainsi, la stabilité des mesures de la balise de l’Ambassade permet de rendre compte du faible impact des incendies sur la radioactivité à Kiev mais ne permet pas de suivre avec précision l’évolution de la radioactivité dans l’air. Dans sa note d’information du 7 avril 2020, l’IRSN précise que du 23 mars au 08 avril, « la balise Téléray de l’IRSN installée à l’Ambassade de France à Kiev n’a pas détecté d’élévation anormale de la radioactivité ».

A ce jour, pas d’impact sanitaire lié à la radioactivité



Réalisée en collaboration avec Météo France, la modélisation de l’IRSN permet de visualiser le déplacement des masses d’air qui étaient au-dessus de la France du 7 au 17 avril avec un taux de radioactivité très faible, 0,1 µBq/m3 3. « Même si on détectait le césium à 1 µBq/m3 cela reste très faible comparé à la radioactivité naturelle » précise François Besnus.

En effet, même en Ukraine où le taux de césium maximum relevé est de l’ordre de 700 µBq/m3, l’exposition liée à l’inhalation est très faible. Philippe Renaud, spécialiste de la radioactivité dans l’environnement à l’IRSN, précise qu’« une masse d’air présentant une activité de césium 137 de 700 µBq/m3 (soit proche de 1 mBq/m3) entraine une exposition de l’ordre de 5 pSv/h (5 10-6 µSv/h), essentiellement liée à l’inhalation ; le débit de dose externe ne représentant que 0,2 pSv/h. Pour 1 µBq/m3, la dose est 1000 fois moindre.

A titre de comparaison, l’exposition est donc largement inférieure à la consommation de 100 g de moules qui conduit à une dose de 5 µSv principalement en raison principalement du polonium 210 contenu dans les moules (de l’ordre de 40 Bq/kg).

« Les inquiétudes sanitaires portaient non pas sur la radioactivité ambiante mais sur la pollution de l’air liée aux importantes fumées et à la tempête de sable qui s’est abattue sur la ville de Kiev vendredi dernier, faisant momentanément de la capitale, une des villes les plus polluées au monde », a rapporté la presse.

Concernant les installations

Les sites d’entreposage et de stockage que comprend Tchernobyl « demeurent peu vulnérables au risque d’incendie car les déchets sont enterrés et recouverts d’une couche de terre ou de sable […], analyse l’IRSN, et que cette radioactivité apparaît donc peu mobilisable par le feu ». Par exemple, le site de Buriakovka, à proximité, est constitué de tranchées recouvertes d’une couche compacte d’argile et il est par ailleurs défriché[1].

Mise à jour du 5 mai 2020 :

Les incendies étant terminés, l’IRSN a publié une dernière note revenant sur les évènements et une modélisation de la dispersion en Europe des masses d’air complète qui confirme les conclusions des notes précédentes.




Gaïc Le Gros (SFEN) – © Crédit Photo France Diplomatie – La Forêt rousse ou Forêt rouge, est le nom donné à la végétation forestière dans une zone de dix kilomètres autour de la centrale nucléaire de Tchernobyl.