Il y a 50 ans, le réacteur à neutrons rapides Phénix commençait à produire de l'électricité - Sfen

Il y a 50 ans, le réacteur à neutrons rapides Phénix commençait à produire de l’électricité

Publié le 12 décembre 2023 - Mis à jour le 22 avril 2024

Arrivée de la cuve du réacteur.

Il y a 50 ans, à Marcoule (Gard), le 13 décembre 1973, la centrale Phénix, première centrale équipée d’un réacteur à neutrons rapides de conception française, commençait à produire de l’électricité. Elle a fonctionné pendant près de 40 ans constituant un important retour d’expérience sur les réacteurs à neutrons rapides refroidis au sodium.

Le premier « choc pétrolier » avait eu lieu deux mois auparavant, en octobre 1973. À cette époque, les premiers réacteurs EDF de 900 MW à eau sous pression étaient encore en construction à Fessenheim et au Bugey, leur démarrage interviendra seulement à partir de 1977. La préparation du « plan Mesmer » de lancement du grand programme électronucléaire venait d’être engagée pour répondre à l’urgence.

Phénix a été construit et exploité par une association du CEA à 80 % et d’EDF à 20 % sur la base des connaissances et de l’expérience acquises à Cadarache avec le petit réacteur à neutrons rapides Rapsodie, démarré en 1967. Un pas de géant venait d’être fait en passant de Rapsodie, qui était non électrogène avec une puissance de seulement 20 MW thermiques, à Phénix et ses 563 MW thermiques et 250 MW électriques.

Phénix, avec une telle puissance, était d’une taille industrielle pour l’époque. En témoigne la mise en service en 1974 de la centrale au fioul de 250 MWe de Martigues. C’était encore le temps du « tout pétrole », mais à quel prix depuis le « choc » d’octobre ! On comprend donc l’importance donnée à ce moment précis au démarrage d’une centrale nucléaire de nouvelle technologie bénéficiant de performances thermiques élevées, proches de celles des centrales thermiques au fioul, d’un meilleur rendement, le tout en étant surgénérateur, c’est-à-dire produisant plus de combustible qu’elle n’en consomme !

Jean Charbonnel, ministre du développement industriel et scientifique, André Giraud, administrateur général du CEA, Paul Delouvrier et Marcel Boiteux, président et directeur général d’EDF, assisteront au premier couplage de l’alternateur avec le réseau électrique sous les yeux de la presse locale et nationale.

Entre autres exploits, Phénix a été construit dans le budget prévu et dans un temps record. Les premiers travaux sur la plateforme le long du Rhône à Marcoule ont commencé à l’été 1968 pour une mise en service en 1973. En janvier 1973, le remplissage de la cuve du réacteur par 800 m3 de sodium était effectué et, en août, le combustible était progressivement chargé. Phénix a divergé, première réaction nucléaire, le 31 août et le 13 décembre la nouvelle centrale était connectée au réseau électrique.

Le 12 mars 1974, Phénix atteignait la pleine puissance et la mise en service industrielle fut prononcée le jour de la fête nationale, le 14 juillet 1974. De 1973 à son arrêt définitif en 2009, la centrale a produit 26 milliards de kWh pendant 130 000 heures de connexion au réseau. Indépendamment de cette production d’électricité, Phénix, grâce à ses flux neutroniques très importants, a été un outil expérimental de premier niveau pour toutes les filières nucléaires. Environ un tiers du cœur était constitué d’assemblages expérimentaux et plus de 200 expériences ont ainsi pu être réalisées pour les matériaux et les combustibles de toutes les filières nucléaires. Phénix est un succès technique reconnu à l’international.■

Par Bernard Giraud, ancien adjoint au directeur de la centrale Phénix, Dominique Goux, responsable sureté de la centrale Phénix, Joel Guidez, ancien directeur de la centrale Phénix

Photo : Arrivée de la cuve du réacteur, © CEA