Nucléaire et environnement, quel rapport ? - Sfen

Nucléaire et environnement, quel rapport ?

Publié le 25 novembre 2015 - Mis à jour le 28 septembre 2021

L’exploitation d’une source d’énergie implique nécessairement des impacts sur l’environnement. La SFEN organise le 26 et 27 novembre une journée technique pour évaluer, critère par critère (disponibilité des ressources, production de déchets, impact sur la biodiversité, etc.), l’énergie nucléaire au regard des exigences environnementales et de santé publique. Joël Guidez, expert au CEA, apporte son éclairage.

Les ressources nécessaires au fonctionnement des centrales nucléaires sont-elles suffisantes ?  

Joël Guidez – En matière de disponibilité des ressources, il faut penser à long terme : à l’échelle du siècle, voire au-delà. Compte-tenu de l’évolution de la consommation, de l’augmentation de la population et des besoins en énergie des pays émergents, les énergies fossiles vont être de plus en plus chères et de plus en plus rares. Signe de cette raréfaction : les forages de gaz et de pétrole se font dans des territoires reculés, et jusqu’à présent protégés, comme l’Arctique ou des profondeurs marines inaccessibles.

Les énergies renouvelables valorisent une énergie inépuisable, le vent ou le soleil. Mais, les technologies actuelles s’appuient sur des matériaux « finis » comme les terres rares. A terme, si on souhaite produire des quantités importantes d’énergies renouvelables, il faudra s’interroger sur la disponibilité de ces ressources.

La construction d’une centrale nucléaire ne nécessite pas de matériaux « exotiques ». Par contre, le nucléaire utilise comme matière première de l’uranium. Aujourd’hui, on estime à un siècle les réserves d’uranium à travers le monde, plus que la plus part des énergies fossiles. Les faibles prix du minerai n’encouragent pas la prospection de nouvelles mines. A terme, la croissance du nucléaire en Asie pourrait entrainer une hausse de la consommation, et donc des prix, et encourager les entreprises à chercher de nouveaux gisements.

Enfin les réacteurs quatrième génération multiplient par cent les possibilités d’utilisation de cet uranium. Ce qui nous conduit à des millénaires de production d’électricité avec des produits déjà stockés et disponibles.

Quel est l’impact des déchets nucléaires sur notre environnement ?

JG – Le nucléaire est la seule industrie énergétique à fonctionner en « cycle fermé ». Cela veut dire que les déchets ne sont pas rejetés dans la nature par dilution. Par exemple, les energies fossiles – charbon, lignite, et autres – rejettent des milliers de tonnes de gaz, poussières et autres produits chimiques dans l’atmosphère. Emissions que l’on est bien incapables de stocker ou même de confiner. 

C’est parce que le nucléaire génère une faible quantité de déchets par rapport à l’énergie qu’il produit, qu’il est capable de gérer ses déchets. Dans l’état actuel des connaissances et des techniques, il est impossible pour les centrales à charbon de stocker le CO2 ! 

Pour ce qui est des énergies renouvelables, personne ne sait encore ce que deviendront les plaques photovoltaïques… La composition chimique de ces installations impose de bâtir une filière de gestion des déchets et de démantèlement.

Le nucléaire met-il notre santé en danger ?

JG – Aussi bien en matière d’accident qu’en matière de pollution, le charbon est l’énergie qui dispose du plus important niveau de mortalité… Pourtant, c’est l’énergie la plus utilisée dans le monde. Les fumées engendrées par les combustions entraînent le décès de 7 millions de personnes chaque année dans le monde. Même en prenant en compte les accidents, le nucléaire est de loin, avec les renouvelables, l’énergie dont l’impact est le plus faible sur notre santé par térawattheure produit : moins d’un décès par TWh contre environ 40 pour le charbon.

Les centrales nucléaires affaiblissent-elles la biodiversité ?

JG – Les centrales nucléaires sont des grands ouvrages industriels situés en milieu rural et donc à proximité d’espèces et d’espaces naturels. Contrairement à une idée reçue, les centrales nucléaires sont des havres de paix pour les espèces animales ! Sur le site du réacteur Phénix à Marcoule (Gard), il y avait même des espèces en voie de disparition qui étaient venues se loger dans la centrale : nous avions des alouettes Lulu et des lézards ocellés !

De manière générale, les centrales nucléaires permettent de fournir une quantité importante d’énergie sur une petite surface. Il faut presque un facteur 1 000 sur la surface pour produire la même puissance avec des éoliennes…

Contrairement à une autre idée reçue, le nucléaire est l’énergie qui semble avoir de nombreux atouts au regard des exigences environnementales : faible emprise au sol, minimisation et absence de dillution des déchets, disponibilité des ressources pour le futur, et bien sûr absence de rejets de CO2, de produits chimiques ou de poussières en fonctionnement.

Publié par Boris Le Ngoc (SFEN)