Le nucléaire est-il antidémocratique ?
Les institutions et les acteurs du nucléaire ont depuis plus de 40 ans mis en place des enceintes de dialogue permettant à la société civile de s’exprimer, de participer à la décision et, in fine, de contribuer à l’amélioration de la sûreté.
Des instances plurielles et indispensables à la démocratie locale : les CLI et le HCTISN
Les commissions locales d’information (CLI)
Dès 1981, des structures de concertation pluralistes constituées d’élus, d’experts, d’industriels, d’associations et de citoyens ont été mises en place : les commissions locales d’information (CLI). Aujourd’hui, plus de 3 000 Français sont engagées dans ces commissions.
Au fil des années, les CLI sont devenues un acteur incontournable du processus décisionnel, y compris sur des dossiers très sensibles.
La loi sur transition énergétique de 2015 a même renforcé leurs prérogatives. Elles peuvent désormais demander l’inspection d’un site suite à la déclaration d’un événement significatif de sûreté. Il s’agit là d’une opportunité pour les parties prenantes de pouvoir appréhender la réalité des installations et de leur exploitation.
Le Haut comité pour la transparence et l’information sur la sécurité nucléaire (HCTISN)
Le HCTISN rassemble depuis 2006 des parlementaires, des membres de CLI ainsi que des associations environnementales. Il est un excellent outil pour recueillir l’information et contribuer ainsi à un éclairage sur les grandes questions liées à la sécurité/sûreté nucléaire.
Cependant, l’un des regrets que l’on peut avoir concernant le HCTISN est qu’il demeure méconnu. C’est un paradoxe à déplorer que cette instance créée pour apporter davantage d’information et de transparence sur le secteur nucléaire français ne rencontre qu’un faible écho auprès des médias et du public…
Des initiatives pour ouvrir davantage le dialogue
La participation directe du public au processus de décision s’est également accrue, comme en témoigne le recours, désormais courant, à une consultation formelle du public préalablement à certaines décisions de l’ASN ainsi que l’ouverture des « groupes permanents d’experts » à des personnes extérieures au secteur nucléaire.
A titre d’exemple : en 2017, l’ASN, l’IRSN, l’exploitant EDF et le constructeur AREVA (devenu Framatome) ont pris le temps d’échanger avec la société civile sur un dossier sensible et techniquement complexe : la question des calottes et du couvercle de la cuve de l’EPR.
Ces initiatives doivent permettre aux citoyens de se forger librement leur esprit critique en s’appuyant sur les documents mis à disposition par les groupes de travail. La consultation publique lancée sur le site de l’ASN a révélé des limites : de nombreux internautes ont simplement copier/coller des réponses toutes faites.
Toutes les instances existent pour se faire entendre
Certaines associations militent pour que leurs actions bénéficient de la protection juridique accordée aux lanceurs d’alerte. Se faisant, elles en oublient que le cadre juridique (loi Sapin 2) a été mis en place pour protéger des citoyens qui ne disposeraient pas de possibilité d’expression.
Pour ce qui est du nucléaire, il existe aujourd’hui de très nombreuses instances qui permettent aux associations de s’exprimer et de voir leurs remarques entendues et prises en compte : les groupes permanents d’experts constitués auprès du directeur général de l’ASN, les commissions locales d’information, le Haut comité pour la transparence et l’information sur la sécurité nucléaire, mais aussi l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) et les commissions parlementaires qui les auditionnent régulièrement.
Les associations n’ont pas besoin d’enfreindre la loi pour se faire entendre. Au contraire, elles doivent utiliser pleinement les enceintes consacrées au dialogue. Par leurs intrusions, certaines associations créent une brèche de sécurité : les manifestants, n’ayant fait l’objet d’aucune enquête administrative, pourtant obligatoire pour toutes personnes entrant sur un site, mobilisent inutilement des équipes dont la mission est d’empêcher que se déroulent de véritables attaques.
Crédit photo : CLI de Gravelines
Légende : le 15 décembre 2017, près de 70 citoyens et élus locaux se sont rendus à la séance plénière de la Commission locale d’information de la CNPE de Graveline pour évoquer le bilan de l’année 2017 ou encore le sujet des piscines d’entreposages.