Le Chinois CNNC teste une plate-forme pour extraire l’uranium de l’eau de mer

Les océans terrestres recèlent une ressource quasi inépuisable d’uranium, mais son exploitation pose des enjeux techniques et économiques difficiles à résoudre. Pourtant, la China National Nuclear Corporation (CNNC) croit dans cette possibilité et teste la plus grande plateforme d’essai à ce jour en mer de Chine méridionale.
Cela fait plusieurs années que l’industrie chinoise fait des annonces sur sa volonté de récupérer l’uranium dissous dans les océans. La société CNNC a franchi un grand pas vers cette ambition en mettant en service, le 17 mai dernier, une plateforme dédiée en mer de Chine méridionale. Cette installation doit permettre de vérifier « en condition réelle » la faisabilité du process et l’efficacité des matériaux d’absorption. La capacité de ces derniers dépend de nombreux facteurs externes comme la pollution marine et les conditions climatiques.
S’exprimant lors de la conférence Seawater Uranium Extraction Technology Innovation Alliance Council and Academic Exchange de 2023 à Hainan, Cao Shudong, directeur général adjoint de la CNNC, a déclaré que l’exploration des ressources d’uranium non conventionnelles, marines en particulier, est un choix stratégique pour assurer le développement durable et régulier de l’industrie chinoise de l’énergie nucléaire.
Filtrer toute la mer du Nord
À terre, selon les données de Nuclear engineering international, « les ressources totales d’uranium dans les minerais terrestres récupérables à des coûts – allant jusqu’à 130 dollars par kilogramme[1] – s’élèvent à environ 3,7 millions de tonnes ». Un article de la Sfen publiée en 2014 rappelle « La valeur moyenne de la teneur en uranium dissous dans les océans, est estimée à 3,3 microgrammes par litre (avec des dispersions de 1 à 5 microgrammes suivant les emplacements). Avec un volume des océans estimé à 1,37×1018 m3, on obtient un contenu uranifère de 4 500 millions de tonnes d’uranium ».
On approche alors d’une ressource quasiment infinie. Mais dans le même article, l’auteur donne un peu la démesure des volumes d’eau à traiter. Il écrit : « Des quantités d’uranium extrêmement importantes sont dissoutes dans les océans mais leur faible concentration nécessiterait, pour répondre à la demande mondiale, d’extraire tous les ans l’uranium d’un volume d’eau supérieur à celui de la mer du Nord ».
Un enjeu qui n’effraie pas CNNC et ses partenaires industrielles. Leur objectif est d’aboutir dans leur R&D aux alentours de 2035, puis de déployer une plateforme industrielle à grande échelle à l’horizon 2050. ■
Ludovic Dupin (Sfen)
Photo : plateforme d’extraction de l’uranium en mer de Chine méridionale.
[1] À date, le cours est inférieur à 50 dollars par kilogramme