L’administrateur général du CEA s’exprime sur Astrid au Sénat - Sfen

L’administrateur général du CEA s’exprime sur Astrid au Sénat

La Commission sénatoriale d’enquête sur l’électricité s’est intéressée au « nucléaire du futur » lors de son audition du 13 février 2024. Interrogé sur la fin du projet Astrid, l’Administrateur général du CEA, François Jacq, est revenu sur le sujet soulignant les réalisations du projet et un « phasage » ne justifiant pas la construction à court terme d’un réacteur à neutrons rapides de type Astrid.

Lancé en 2010, le projet Astrid (Advanced Sodium Technological Reactor for Industrial Demonstration) est un projet de prototype de réacteur à neutrons rapides refroidi au sodium. Au cours du projet, « trois configurations ont fait l’objet d’un remontage d’ingénierie complet » détaille le CEA : Astrid 600 vapeur, Astrid 600 gaz (azote) et New Astrid Vapeur, une version de 150 MWe. En 2019, l’État, avec les industriels et le CEA, a décidé de ne pas construire le démonstrateur. Le sénateur et rapporteur de la commission d’enquête sénatoriale portant sur la production, la consommation et le prix de l’électricité aux horizons 2035 et 2050, Vincent Delahaye a questionné François Jacq, administrateur général du CEA sur cette décision : « On a arrêté Astrid, est-ce que vous pensez que nous pourrions le redémarrer ? ».

« Pas d’arrêt d’Astrid »

« De mon point de vue, nous n’avons pas arrêté Astrid », tient à nuancer François Jacq, « nous avons fait tous les travaux nécessaires pour concevoir un projet de réacteur et nous avons décidé de ne pas le construire », précise-t-il. « Ce que je veux dire, c’est que nous avons  travaillé utilement pendant toute la période. On a capitalisé sur un certain nombre de connaissances de dispositifs technologiques de concept de réacteurs,  mais on a décidé de ne pas le construire. J’assume totalement cette décision et j’assume totalement d’avoir recommandé cette décision au gouvernement ».

Une question de phasage

« Ce n’est pas une question de principe, c’est une question de phasage » appuie l’administrateur général du CEA.

La première explication donnée est économique : « Si vous doubliez le prix de l’uranium, qui est la seule raison pour laquelle vous feriez ce type de réacteur, vous ne faites qu’un renchérissement de 4 euros du prix du MWh sur le prix du courant. Ce n’est pas le bon moment pour le faire, c’est trop tôt », argumente-t-il.

La seconde concerne la préparation du cycle du combustible. « Pour faire ça (des réacteurs à neutrons rapides, ndr), et que ça ait un intérêt, il faut le cycle du combustible associé et c’est la partie qui n’avait pas été regardée. On se serait donc retrouvé en train de construire quelque chose sans les besoins économique et industriel et sans la maturité du cycle qui allait avec ».

Enfin, François Jacq a souligné dans un troisième temps un autre élément relatif aux ressources humaines qui seraient nécessaires pour le lancement d’un programme de construction de réacteurs à neutrons rapides et s’interroge sur la capacité à faire face, avec le programme EPR2, à deux programmes d’envergure en parallèle. « On voit bien le volume que [le programme EPR2] demande  en termes de ressources et de compétences. Est-ce que nous pouvions, alors que nous faisons ça et que c’est la priorité, nous mettre un autre programme de grande ampleur ? […], je ne crois pas que c’était accessible ».

Audition à retrouver dans son intégralité ici.

Continuité des programmes de recherche

L’administrateur général du CEA a rappelé que les programmes de recherches sur cette technologie de réacteur continuaient ainsi que la coopération avec les partenaires étrangers, dont les États-Unis et le Japon. Il a également rappelé que l’appel à projets France2030 comprenait des startups essaimées par le CEA qui permettront sur des réacteurs beaucoup plus petits « non pas de régler tout le problème, mais  de garder la compétence, de continuer à progresser et d’acquérir un certain nombre de technologies ».■

  1. https://videos.senat.fr/video.4379381_65cbc7b655761.le-nucleaire-du-futur–enjeux-et-perspectives

Gaïc Le Gros (Sfen)

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Publié le 31 octobre 2024