ARC ne remet pas en cause la nécessité de faire Iter
Ces dernières semaines, la presse, majoritairement anglo-saxone, s’est beaucoup intéressée à un concept de machine pour la fusion par confinement magnétique basé sur de nouveaux supraconducteurs, présenté par le MIT (ARC/ A compact, high-field, fusion nuclear science facility and demonstration power plant with demountable magnet, Fusion Engineering and Design, Juillet 2014).
Contrairement à l’annonce faite en octobre 2014 par la société privée Lockheed Martin, qui expliquait pouvoir mettre au point dans les cinq ans un récteur de fusion « de la taille d’un camion », cette étude est publiée dans une revue à referee. Donc son contenu scientifique a été validé par les pairs. Elle émane d’une équipe du Plasma Science & Fusion Center (MIT), reconnue par la communauté internationale de la recherche sur la fusion.
Une contribution originale et précieuse
Comme le soulignent les auteurs de l’article, l’étude ARC ne prétend pas correspondre à un design technologique complet, mais elle souligne les attraits d’un tokamak compact à fort champ magnétique. C’est une contribution originale et précieuse à l’avancement de la R&D pour la fusion, montrant tout l’intérêt que porte la communauté internationale au développement de la fusion comme filière énergétique.
Toutefois, ARC s’inscrit dans des constantes de temps relevant de l’étape après Iter, celle du réacteur de démonstration Demo qui fera le pont entre Iter et le réacteur industriel.
Pourquoi ? Parce que, concept très innovant, ARC fait appel à plusieurs technologies dont le niveau de maturité technologique (Technology readiness level) est faible et dont les temps de R&D avant leur application dans un démonstrateur technologique, se comptent en décades plutôt qu’en années.
En particulier, nous en relèverons ici deux exemples :
Dans l’environnement d’un tokamak, les câbles supraconducteurs sont soumis à des conditions extrêmes : bobines de grandes tailles (plusieurs mètres) soumises à des contraintes mécaniques énormes, champs variables, avec des pertes… On peut estimer que le niveau actuel de maturité de la technologie de supraconducteurs Rebco incluse dans l’étude ARC est similaire à celui qu’avait la technologie des câbles supraconducteurs mise en œuvre dans Iter dans les années 70. Or il a fallu attendre l’année 2000, soit 30 ans de développement, pour que cette technologie soit disponible et qualifiée pour les bobines d’Iter.
Une des questions importantes auxquelles Iter doit apporter une réponse est celle de l’extraction en continu de la puissance du plasma sur la surface de la chambre du réacteur et ce, à des densités de puissance élevées (jusqu’à 20 MW/m² sur Iter). A cet égard, ARC n’échappe pas au problème générique des dispositifs de fusion compacts : pour une puissance fusion donnée, plus le tokamak est petit, plus la densité de puissance à extraire sur la paroi est importante. Cette densité de puissance est ainsi trois fois plus importante sur ARC que sur Iter, rendant le problème d’autant plus difficile à résoudre.
La recherche sur la résistance face au plasma
La résistance et la performance des composants face au plasma est d’ailleurs un des axes de recherche du CEA avec le tokamak Tore Supra/West.
Cette installation réunit l’ensemble des moyens techniques permettant de réaliser des plasmas de longue durée. Sa transformation en West (W-tungstène Environment in Steady-State Tokamak) en fait une plateforme de test pour Iter.