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L’Allemagne et le climat, je t’aime moi non plus

Publié le 26 novembre 2019 - Mis à jour le 28 septembre 2021
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Fin septembre 2019, le gouvernement d’Angela Merkel a présenté son plan pour le climat à l’horizon 2030, à la suite d’âpres négociations avec les partenaires de sa coalition. Pourtant championne des renouvelables, l’Allemagne est aussi l’un des plus gros émetteurs de CO2 d’Europe. Une situation paradoxale partie pour durer.

Angela Merkel l’affirme, défendre le climat est « un défi pour l’Humanité ». C’est donc tout naturellement que l’Allemagne a levé le voile sur son plan climat, alors que le pays n’atteint pas, loin de là, ses objectifs climatiques pour l’année 2020 selon le baromètre semestriel de McKinsey consacré au suivi de la transition énergétique allemande [1]. 

La mesure phare de ce plan est l’instauration d’une taxe carbone dans le secteur du transport et du chauffage/refroidissement – non couverts par le système européen d’échange de quotas d’émission. Prenant la forme de certificat d’émission, la taxe carbone à l’allemande entrera en vigueur en 2021 avec un tarif de 10 €/t éqCO2 et passera à 35 €/t éqCO2 d’ici 2025. Une décision loin d’être révolutionnaire quand on sait que le prix de CO2 préconisé par le FMI est de 75 $ (67 €) la tonne d’ici 2030.

Une opinion publique en faveur du climat

Alors que plus d’un million de personnes ont défilé outre-Rhin le 20 septembre 2019 à l’occasion de la marche pour le climat, l’Allemagne peine à endiguer ses émissions de gaz à effet de serre. En effet, Berlin s’appuie massivement sur ses centrales à charbon au lignite pour produire son électricité. Sa décision, en 2011, de sortir de l’énergie électronucléaire n’est pas pour arranger les choses. Les dernières centrales fermeront en 2022, soit une perte sèche de 9,5 GW de moyens pilotables bas carbone en moins.

Le pays est à l’heure actuelle l’un des plus importants émetteurs de CO2 de l’UE avec 11,3 t éqCO2 par habitant en 2017 selon Eurostat (contre 7,2 t éqCO2 pour un Français). Sa stratégie visant à tout miser sur les énergies renouvelables intermittentes ne semble pas fonctionner. À tel point que la presse allemande s’interroge : le principal hebdomadaire du pays, Der Spiegel, a consacré un dossier à la transition énergétique allemande en mai 2019. La Une était sans appel : « Travail bâclé en Allemagne » avec, en guise d’illustration, une forêt d’éoliennes cassées et de pylônes électriques déconnectés.

Les énergies fossiles toujours au coeur de l’Energiewende [2]

La situation n’est pas près de changer. La « Commission Charbon », préconise une sortie du charbon et du lignite pour produire de l’électricité au plus tard d’ici 2038. En parallèle, pour sécuriser son approvisionnement en électricité pilotable, l’Allemagne mise sur le gaz au travers du très contesté projet Nord Stream 2 qui permettra d’acheminer le gaz russe en Europe.

À ceci s’ajoute le projet de construction d’un, voire de deux terminaux méthaniers pour importer du Gaz naturel liquéfié (GNL). Une décision est attendue fin 2019 pour un lancement prévu en 2022. 

Pendant ce temps, et comme le disait le président Chirac : « Notre planète brûle et nous regardons ailleurs ».


McKinsey (2019), communiqué de presse du 5 septembre 2019 : « Indice de transition énergétique de McKinsey : l’Allemagne menace de créer un goulot d’étranglement ».

Le concept d’Energiewende, que l’on peut traduire par « révolution » ou par « transition » énergétique, est né dans les années 1980 en Allemagne. Mais son optique, originellement, était bien

l’abandon de la dépendance à l’atome et… aux énergies fossiles.


Par Maruan Basic, SFEN

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