8/10 – Les nouveaux mouvements citoyens pour le nucléaire - Sfen

8/10 – Les nouveaux mouvements citoyens pour le nucléaire

Publié le 24 septembre 2020 - Mis à jour le 28 septembre 2021
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Ces trois dernières années, une prise de parole libre et puissante de citoyens défendant ouvertement le nucléaire comme moyen de lutte efficace contre le réchauffement climatique a émergé et s’est affirmée d’une manière grandissante. Au-delà d’une présence active sur les réseaux sociaux et dans les médias, ce sont aussi de nombreuses actions qui se sont organisées en France et dans le monde.

Le 28 avril 2019 : à quelques semaines des élections européennes, dans un contexte de sortie annoncée du nucléaire en Belgique [1] et d’enjeux énergétiques majeurs, des citoyens et associations écologistes se rassemblent devant la gare centrale de Bruxelles pour rappeler les atouts de l’énergie nucléaire. Le nom de l’événement ? La Nuclear Pride Fest, qui, à grands renforts de banderoles et de stands, défend les atouts de l’énergie nucléaire de manière conviviale. L’ambiance se veut familiale et festive. Il s’agit de sensibiliser les passants sur les conséquences d’un arrêt de l’énergie nucléaire dans les pays qui en ont la tentation ou le décident. Cette initiative a été lancée par la Nuclear Pride Coalition, un regroupement mondial d’associations environnementales favorables à l’atome.

Des rassemblements festifs pour sensibiliser le grand public

La première édition de cet événement s’était déroulée un an plus tôt, en octobre 2018 à Munich en Allemagne. Pourquoi ce pays en particulier ? Parce qu’aux yeux des citoyens qui soutiennent l’énergie nucléaire, l’Allemagne est devenue le symbole d’un modèle raté de transition énergétique, la fameuse Energiewende. L’obsession consistant à fermer les derniers réacteurs nucléaires (une énergie pilotable bas carbone) au plus tard en 2022 aura pour conséquence l’ouverture de centrales à gaz (énergie pilotable émettrice de CO2) et l’obligation de reporter la fermeture des dernières centrales à charbon à… 2038. Accompagnés de leur mascotte, l’ours polaire « Melty », ces citoyens et associations environnementales venus de tous les pays d’Europe, des États-Unis et même d’Asie, veulent transmettre un message à la population. Paul Bossens, co-fondateur du mouvement citoyen belge 100TWh, le résume : « On veut dire aux politiciens de ne pas faire l’erreur de sortir du nucléaire, parce que ce serait néfaste pour l’environnement et les citoyens seraient amenés à payer plus cher leur énergie [2] ».


Nous pensons que grâce à l’énergie nucléaire nous serons capables d’offrir aux générations actuelles et à venir, à nos enfants, la qualité de vie dont nous bénéficions aujourd’hui


Dans ce contexte, les volontaires de la Nuclear Pride Fest ne s’engagent pas contre mais pour quelque chose : remettre sur le devant de la scène l’énergie nucléaire et ses nombreux atouts. L’initiateur principal de cet événement n’est autre que l’écologiste américain Michael Shellenberger, président de l’association Environnemental Progress  [3]. Le nom Nuclear Pride est emprunté à la « Gay Pride », explique « Mike » Shellenberger qui est devenu un des symboles des « héros de l’environnement », pour le magazine américain Time. Avec ce nom, il « souhaite faire comprendre à quel point l’engagement public en faveur de l’énergie nucléaire est aujourd’hui un sujet tabou et stigmatisé socialement ».

Paris et 34 villes dans le monde 

La France, dont l’énergie nucléaire passera de 72 à 50 % dans le mix énergétique d’ici à 2035, a aussi ses défenseurs de l’environnement pro-climat et pro-nucléaire. Parmi les bénévoles de ce mouvement, apparaissent des associations comme les « Voix du Nucléaire », « l’Association des Écologistes pour le Nucléaire » (AEPN) ou « Sauvons le climat ». Comme le souligne Myrto Tripathi, présidente des Voix du Nucléaire, les personnes qui s’engagent « sont des individus, salariés ou anciens salariés du nucléaire, qui interviennent en tant que citoyens, mais aussi des personnes issues d’autres secteurs que le nucléaire : professeurs d’universités, spécialistes des transports, de l’environnement, du numérique, des RH, des assurances, ou des sympathisants tout simplement, bref des voix… qui représentent la société civile ».

Grâce à ces associations, une journée d’action mondiale, Stand up for Nuclear, a été organisée à Paris en octobre 2019, ainsi que dans 34 autres villes dans le monde simultanément. Une première à cette échelle ! À rebours des écologistes traditionnels, ces bénévoles ont pu sensibiliser des milliers de passants à leur combat. À Paris, Mike Shellenberger, là encore, était présent : « Nous sommes fiers de travailler pour que cette énergie fonctionne encore mieux au service de tous. Et nous sommes fiers de défendre cette « Cendrillon » qu’est l’énergie nucléaire, qui est pour l’instant rejetée, laissée à l’écart, et qui, pourtant, offre de nombreux avantages. Nous pensons que grâce à l’énergie nucléaire nous serons capables d’offrir aux générations actuelles et à venir, à nos enfants, la qualité de vie dont nous bénéficions aujourd’hui. L’histoire de l’humanité, c’est une évolution progressive et croissante de personnes qui tendent vers un accès partagé à l’énergie ». Et rappelle avec force : « près d’un milliard de personnes dans le monde n’ont toujours pas accès à l’électricité et pour celles qui en bénéficient, 80 % de cette énergie provient des ressources fossiles ».


Une première : des manifestations aux portes de Greenpeace

Dernier événement marquant qui a fait la une pendant plusieurs jours dans les médias nationaux et sur les réseaux sociaux : l’arrêt définitif du réacteur 2 de Fessenheim le 30 juin 2020, après celui du réacteur 1, quatre mois plus tôt. Aux yeux des salariés de la filière nucléaire, mais aussi d’élus, d’associations, et de citoyens, cette fermeture clairement négociée entre les socialistes français et EELV pour les Présidentielles de 2012 est une ineptie climatique, économique et sociale. 

Lors de cet événement inacceptable au regard des enjeux du pays, les « Voix du Nucléaire » se sont montrées, là encore, particulièrement combatives, en soutenant d’abord les centaines de salariés, entreprises et élus lors de l’arrêt du réacteur 2 mais aussi… à Paris, la veille, devant les portes de l’ONG Greenpeace France.

« Nous étions là pour dénoncer les contre-vérités de Greenpeace sur le nucléaire, a expliqué Myrto Tripathi. Il y a un amalgame qui est fait entre le nucléaire et les énergies fossiles, et on voit que ces éléments, diffusés par des associations comme Greenpeace, sont repris jusqu’au gouvernement ». 

Les citoyens défendant le nucléaire l’ont bien compris. Pour devenir audible, il faut changer de ton, adopter énergie et enthousiasme, et surtout continuer d’informer, de vulgariser, encore et encore, sans relâche. À n’en pas douter, ces mouvements prennent progressivement de l’ampleur.

RDV au prochain Stand up for Nuclear, le 27 septembre 2020 à Paris.


Le « Pacte énergétique » belge, qui prévoit la fermeture des sept réacteurs nucléaires du pays, propose leur remplacement par des nouvelles centrales à gaz.

Une position défendue par les deux partis écologistes Groen et Ecolo, ainsi que par Greenpeace Belgique, qui prônent les énergies renouvelables, en arrêtant le nucléaire et donc en ayant recours aux seules autres énergies pilotables possibles, les énergies fossiles. Une posture très largement dénoncée par des citoyens belges en faveur du climat.

En 2020, une famille allemande paye en moyenne 70 % plus cher son électricité qu’une famille française.

ONG créée en 2016 par Michael Shellenberger lorsqu’il a réalisé « que les centrales nucléaires fermaient dans le monde entier, mettant en péril les objectifs de protection de l’environnement, alors qu’elles offraient de bonnes conditions de vie aux personnes du monde entier ».


Par Cécile Crampon (Sfen) et Nathalie Guillaume (CEA) – Photo : Stand up for Nuclear, Paris, 2019 ©Voix du Nucléaire