« La société ne peut prendre le risque du nucléaire » - Sfen

« La société ne peut prendre le risque du nucléaire »

Publié le 26 mai 2015 - Mis à jour le 28 septembre 2021
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Rapporteur d’un rapport parlementaire sur les coûts de production de l’énergie nucléaire, opposant assumé de l’atome, Denis Baupin, est un homme politique convaincu et engagé, qui aime confronter ses idées avec celles et ceux qui ont « une position éloignée » de la sienne. « J’ai envie de convaincre mes interlocuteurs que le cheminement intellectuel qui m’a amené à mes positions, ils peuvent le faire aussi ! ».  

Sourire en coin, Denis Baupin prévient « je suis un antinucléaire primaire ! » Encore adolescent, le normand s’est très tôt forgé une conviction sur le nucléaire. Au départ, « c’était une intuition qui a commencé avec Nagasaki et Hiroshima ». Puis au fil du temps et des manifestations, contre la construction de l’usine de retraitement de La Hague et celles contre Superphénix, l’intuition est devenue « conviction », avant de devenir une « réflexion étayée ». « Malheureusement, les événements m’ont donné raison » estime le député Europe Écologie Les Verts (EELV). Étudier la physique à l’École Centrale n’y changera rien : le jeune ingénieur restera antinucléaire, certain que « la société ne peut prendre un risque trop grand comme le risque nucléaire ».

 

Produire de l’électricité autrement

« Tous les pays du monde, sauf la France, ont un taux de nucléaire qui est très largement inférieur à 75 %, voire, pour la grande majorité, à 0 %. Or ces pays ne s’éclairent pas à la bougie ! On sait et on peut produire de l’électricité autrement. » La loi sur la transition énergétique est pour lui, « l’occasion pour la France d’engager une politique énergétique jusque-là laissée à l’abandon. » D’autant que « cela fait des années que la majorité des Français souhaite le développement des renouvelables aux dépens du nucléaire. »

Le programme Grand carénage d’EDF en ligne de mire, Denis Baupin prévient : « il faudra choisir entre faire des investissements massifs dans des installations en fin de vie, construire de nouveaux réacteurs ou bien mener une politique d’efficacité énergétique, en produisant de l’énergie de manière raisonnable et raisonnée ». À la question « pourra-t-on faire les trois ? », l’écologiste répond du tac au tac : « ça n’a pas de sens de produire trois fois plus d’électricité ! »

 

Ne pas offenser les travailleurs du nucléaire

Conscient que ses positions peuvent heurter les femmes et les hommes de la filière, Denis Baupin ajoute qu’il « ne (veut) pas offenser les gens qui depuis des années, se sont investis en pensant qu’ils contribuaient à faire émerger une technologie qui allait améliorer la collectivité. Ils sont sincères. Ils font leur maximum pour que la sûreté soit garantie. Il n’empêche : si un jour il y a un pépin, le pépin a des conséquences sans commune mesure avec toute autre

technologie ».

 

Les réacteurs « durables »

Denis Baupin le réaffirme : le nucléaire est une impasse, même pour lutter contre le réchauffement climatique. « Puisqu’il y a des technologies qui n’émettent ni CO2 ni déchets radioactifs, alors tant qu’à faire, autant aller vers celles-là ! ». Les réacteurs de quatrième génération, qui pourront multirecycler le combustible, inquiètent le vice-président de l’Assemblée nationale, surtout « ceux au sodium ». Il identifie « trois gros défis pour le nucléaire ». D’abord, « maintenir en sécurité les installations tant qu’elles fonctionnent, avec un renouvellement des générations massif et des pertes de savoir-faire qu’on a pu constater sur le chantier de l’EPR ». Ensuite, « affronter les charges futures du nucléaire qui sont aujourd’hui sous-provisionnées ». Denis Baupin est « impatient » que l’audit indépendant commandé par la ministre de l’Écologie sur les coûts du démantèlement soit remis. D’autant que « l’intérêt des entreprises est de sous-provisionner pour que cela coûte le moins cher possible dans le budget du jour ». Et enfin, « l’avenir du nucléaire, c’est de gérer ce que l’on va léguer aux générations futures comme étant l’après-nucléaire ». Rendez-vous est pris !

 

 
Article paru dans le Revue Générale Nucléaire de Janvier – Février 2015

Abonnement : abo-rgn@grouperougevif.fr

 

 

Copyright photo – Andra

Publié par Boris Le Ngoc (SFEN)

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