COP 21 : un Accord de Paris historique et réaliste - Sfen

COP 21 : un Accord de Paris historique et réaliste

Publié le 16 décembre 2015 - Mis à jour le 28 septembre 2021
  • COP 21
  • Nuclear4Climate
x870x489_cop_21.jpg.pagespeed.ic_.d4c0sqgjmi

Samedi 12 décembre, après plus de 10 jours de négociations intenses, les délégations de 195 pays adoptaient à l’unanimité l’Accord de Paris. De l’avis de – presque – tous, cet accord historique est un pas décisif dans la lutte contre le changement climatique.

Le 12 décembre 2015, le changement climatique, ses causes, ses effets et son ampleur ont enfin été  mesurés et reconnus unanimement. Et les 195 pays présents au Bourget ont exprimé collectivement leur volonté de contenir le réchauffement entre 1,5 et 2 degrés. Le lendemain de l’adoption de l’accord, le Premier ministre Indien, Narendra Modi twittait : « Il n’y a ni gagnants ni perdants à la conclusion de l’accord de Paris. La justice climatique a gagné et nous travaillons tous à un avenir plus vert ». Deuxième pays le plus peuplé du monde et quatrième plus gros pollueur de la planète, l’Inde était un « poids lourd » de la COP21.

Le document, fruit de quatre ans de travail et de négociations intenses depuis la conférence de Durban de 2011, est constitué de deux parties. L’accord lui-même est la partie juridiquement contraignante au sens du droit international de l’environnement. Pour être appliqué en 2020, il devra être ratifié par au moins 55 Parties représentant au moins 55 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. La décision, qui a permis l’adoption de cet accord,  décrit en 20 pages les points techniques à mettre en place d’ici 2020, pour permettre la mise en œuvre effective de cet accord historique. 

Si le changement climatique reste un défi, l’Accord de Paris est historique en ce qu’il témoigne de la mobilisation de tous les pays pour avancer dans la même direction et limiter le réchauffement climatique « bien en deçà de 2°C », limite au-delà de laquelle les conséquences du réchauffement seront dévastatrices.

L’Accord de Paris est ambitieux car il contient tous les éléments pour construire collectivement une stratégie mondiale d’atténuation et d’adaptation au changement climatique ainsi que la feuille de route pour instruire avant 2020 les détails de cette stratégie. En ce sens, nous sommes là au début d’un long processus.

De fait, les plus grands émetteurs de CO2 – Chine, USA, Russie, Canada, Australie… –  s’engagent à réduire à terme leurs émissions. Un premier bilan des actions nationales sera dressé en 2023. Puis les progrès des pays seront évalués tous les 5 ans. Et les ambitions devront être revues à la hausse. Déjà, une centaine de pays dont les Etats-Unis, s’engage à réviser leurs contributions initiales (INDC) avant 2020.

Autre point essentiel : l’article 2 rappelle que « l’accord sera appliqué conformément à l’équité et au principe des responsabilités communes mais différenciées et des capacités respectives, eu égard aux contextes nationaux différents ». Les pays développés, historiquement responsables de l’augmentation anthropique des températures, sont appelés à « montrer la voie en assumant des objectifs de réduction des émissions en chiffres absolus. » Ils doivent fournir des ressources financières aux pays en développement, à la fois pour l’adaptation et l’atténuation. Les pays en développement et les pays vulnérables comme les Petits états insulaires, voient là un début de mise en œuvre de la « justice climatique » qu’ils appelaient de leurs vœux. A fortiori quand les Etats les plus riches reconnaissent désormais  l’importance de l’aide à leur apporter. 

La mobilisation des financements climatiques est prévue à partir d’une grande variété de sources et une progression au-delà des efforts antérieurs est prévue. La mobilisation doit se poursuivre jusqu’en 2025 et l’objectif collectif devrait augmenter sur la base d’un plancher de 100 milliards de dollars par an.

Le processus des engagements domestiques des pays, qui peu à peu donneront de la visibilité aux investisseurs sur les stratégies nationales liées à la lutte contre le changement climatique, est précisé. Comme sont déclinées les décisions liées aux transferts de technologie, avec le souhait de favoriser les approches coopératives sur les nouvelles technologies. Un mécanisme destiné à aider les pays en développement à renforcer leurs capacités est également proposé.

Deux absences ont été toutefois été remarquées : celles des émissions de gaz à effet de serre de l’aviation et du transport maritime. Car ces deux secteurs d’activités – notamment le fret maritime qui compte pour environ 3 % des émissions mondiales – sont parmi les gros contributeurs au réchauffement climatique récent.

Réagissant à l’annonce de l’Accord, Jim Yong Kim, Président de la Banque Mondiale, appelle à « de fortes ambitions, avec des partenariats importants, la mobilisation du monde de la finance, et la mise en place de plans climat nationaux. Paris a tenu ses promesses. Maintenant la responsabilité est la nôtre.»

Si certaines associations et organisations non gouvernementales regrettent que l’objectif de 100 % d’énergies renouvelables ne soit pas identifié comme un – sinon LE – moyen de contenir le changement climatique, les 195 Parties de la négociation misent sur l’efficacité énergétique. De nombreux pays misent aussi sur les énergies renouvelables. Mais les Parties n’ont exclu aucune énergie bas-carbone de la panoplie des solutions à mettre en œuvre pour rester en-deçà de l’objectif maximal de réchauffement. Il aurait en effet été difficile d’exclure l’énergie nucléaire, quand le GIEC lui-même la reconnaît comme « bas-carbone », au même titre que les renouvelables et le stockage du CO2. Difficile aussi quand plusieurs pays, comme la Chine, l’Inde ou la Russie investissent déjà significativement dans ce secteur, pour concilier lutte contre le réchauffement et développement. Disons qu’au Bourget, le nucléaire est resté discret, faisant toutefois entendre quand même sa petite musique décarbonée au travers de l’initiative Nuclear for Climate !

Bien sûr, le travail encore à fournir est immense. Mais si l’idiot ne voit que le doigt quand on lui montre la lune, il faut saluer les avancées rendues possibles par ce premier accord unanime. Quand 195 pays réussissent à s’accorder, un premier pas est fait. Maintenant, chaque pays doit mettre ses engagements en œuvre. 

Crédit photo : Droit réservé

Publié par Isabelle Jouette (SFEN)

  • COP 21
  • Nuclear4Climate